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512829 août 2020 – Nos lecteurs ont déjà lu divers textes où est citée la commentatrice et auteure Diana Johnstone, ou bien où sont commentées certaines de ses positions. J’ai rencontré Diana Johnstone à deux reprises, disons que nos chemins se sont croisés dans les longues marches de la dissidence antiSystème de cette formidable et terrible époque. Elle fut une des meilleures commentatrices des sanglants événements de l’ex-Yougoslavie dans les années 1990, surtout dans la deuxième période de la décennie et l’épouvantable guerre du Kosovo, la première guerre virtuelle, le premier simulacre sanglant et puant de notre civilisation, criblée de mensonges et de manipulations, de constructionnisme maléfique et de moraline “démocrorompue”.
(“démocrorompue” : guillements acceptables pour la réunion de deux mots si jumeaux, tellement l’un-vaut-l’autre & Cie, – “démocratie” et “corrompue” [venue en droite ligne, sans correspondance, de “corruption”])..
La caractéristique principale de Johnstone, dissidente antiSystème de longue date et de belle tradition, est son véritable ancrage à gauche, sans ambiguïté possible, mais accompagnant en toute honnêteté et complète objectivité l’attitude extrêmement rare de ce que je pourrais nommer “la doctrine de l’ennemi principal” : vous, esprit indépendant honnête et lucide, que vous soyez de gauche ou de droite, que vous divergiez sur tel ou tel sujet, même d’une certaine importance certes, mais parce que vous êtes honnête puisqu’indépendant, parce que vous avez une conscience aiguisée des priorités fondamentales puisque lucide, alors vous devez vous unir contre “l’ennemi principal”, – et dans ce cas, le Système certes.
Johnstone est partisane de ce ‘front commun’ auquel nous faisons nous-mêmes, sur ce site, si souvent allusion ; ce ‘front commun’ qui doit rassembler tous les antiSystème et hors-Système, de droite et de gauche ou de gauche et de droite. Il s’agit de la seule voie pour installer une force dangereuse pour le Système, la seule conception tactique qui honore l’esprit et promet de déboucher sur une stratégie métahistorique triomphante.
Deux rappels extraits de nos archives, sur Diana Johnstone :
• Le 2 août 2017, sur le livre dont elle a dirigé la confection, réunissant les notes et réflexions de son père sur la manufacture de la terreur nucléaire au Pentagone dont il (Paul H. Johnstone) avait une connaissance de première main :
« Dans ce cadre qui est le nôtre aujourd’hui, où des forces d’une puissance inimaginable agissent sur la psychologie pour pousser vers des affirmations, des imprécations et des engagements dont rien de la dangerosité n’est apprécié, un rappel de la situation générale de la planification des guerres nucléaires durant la Guerre Froide constitue une source précieuse pour tenter de ramener à la vérité-de-situation du risque de guerre nucléaire. C’est dans ce courant que se place le livre dont le titre joue sur le fameux acronyme de ‘Mutual Assured Destruction’ : “From MAD to Madness – Inside Pentagon Nuclear War Planning”, réunissant les notes, commentaires et mémoires de Paul H. Johnstone (décédé), analyste principal au Groupe d’Analyse Stratégique du Pentagone ; le livre est publié sous la direction de sa fille, Diana Johnstone, commentatrice et activiste antiguerre qui signe l’introduction. (Avec un avant-propos de Paul Craig Roberts, “From MAD to Madness” a été publié au début de cette année. Il a déjà trouvé la voie d’une publication en traduction italienne et il serait bienvenu qu’il en trouve une en français et une en allemand, pour contribuer à une nécessaire prise de conscience en Europe de ce risque nucléaire. »
• Le 28 août 2018, son texte exposant en détails révélateurs les véritables dessous de ce qu’on désigne comme “l’ingérence russe dans les affaires US” (ou Russiagate pour l’aspect de l’utilisation que firent les démocrates de ce simulacre). Un texte toujours à lire pour ce qu’il nous dit des arrière-plans de “l’arnaque-cosmique” que furent certaines accointances entre les milieux du business US et ceux des oligarques russes pendant les années1990 de la grande braderie de l’URSS, et tout cela transmutée des années plus tard en cette bouillie pour les chats, le simulacre grossier de l’“ingérence russe” du Russiagate-2016.
Je savais que Johnstone avait sorti un livre de mémoires que je supposais du plus grand intérêt, intérêt où j’ai été conforté il y a quelques jours, me conduisant à enfin commander le livre. En effet, il y a eu cet article paru dans MintPressNews.com le 24 août 2020, du journaliste indépendant Rick Sterling, de San Francisco. Stirling rend compte du livre de Diana Johnstone, – peut-être après une rencontre, cela n’est pas précisé mais la photo en tête de l’article ainsi que les citations de Johnstone pourraient en témoigner. ‘Circle in the Darkness’, des ‘Mémoires d’une observatrice du monde’, tel est le titre du livre, – ‘Des cercles dans l’obscurité’, très beau titre... (A acheter notamment [parce que rapidement obtenu] chez l’inévitable Amazon.)
Un passage de cet article (en attendant le livre) m’a particulièrement intéressé, qui concerne les événements actuels d’une façon indirecte mais révélatrice, lorsqu’elle rapporte sa rupture avec le site où elle a si longtemps publié, surtout du temps d’Alexander Cockburn, – le site CounterPunch. Comme c’est souvent le cas, l’esprit originel du créateur (Alexander Cockburn) a été trahi ; et comme c’est souvent le cas dans le sujet exposé ici, la gauche dogmatique, “complice utile” (et souvent rémunérée) du Système, a remplacé la gauche libre et indépendante.
Diana Johnstone conte ces péripéties en parallèle et en connexion directe avec l’attitude évolutive, jusqu’à l’opprobre et l’invective, du site vis-à-vis de l’Australienne Caitline Johnstone. On connaît également cette Johnstone-là, à dedefensa.org, et on reconnaît chez elle cette gauche indépendante libre de toute attache et ennemie de toute attitude dogmatique lorsqu’il s’agit de la mission pressante de l’attaque de l’“ennemi principal”. (Cherchez Caitline Johnstone sur CounterPunch, et vous disposerez des principaux éléments directs du dossier, d’une attaque qui a eu lieu essentiellement en juillet 2017.)
« Sur l’offensive médiatique massive de la presseSystème dans le but de contrôler le jugement populaire et la colère qui en découle, Diana Johnstone note :
» “Les grands médias se sont de plus en plus éloignés de l'information du public et se sont rapprochés d’un travail d’influence consistant à indiquer à ce public ce qu’il doit penser et faire”.
» Elle exprime sa conviction que la gauche est complètement gangrenée par le dogmatisme. Johnstone raconte sa brouille avec le site et magazine CounterPunch après qu’il ait développé un tir de barrage d’attaques contre l’analyste et écrivaine Caitlin Johnstone (aucun lien de parenté).
» “Ce fut en effet le début de la montée en puissance de Caitlin dans les cercles anti-guerre en parallèle au début du déclin de CounterPunch, passé de la position d’un “franc-tireur intrépide” à celui de critique sarcastique des véritables héritiers de l'esprit indépendant du fondateur du site, Alexander Cockburn. L’essentiel des attaques de CounterPunch contre l’Australienne Johnstone était qu’elle osait dire qu’elle s’allierait même avec quelqu'un de droite s’il s’agissait de se battre contre la guerre. C'est tout simplement du bon sens, mais cela a été dénoncé par l’escouade de purification Antifa comme une preuve d’une tendance fasciste. Quand je les ai vus s’en prendre à Caitlin, je me suis dit qu’ils en viendraient à s’en prendre à moi, et que ma collaboration avec CounterPunch allait par conséquent bientôt prendre fin”.
» Johnstone plaide en faveur d’un travail pour la paix (antiguerre) avec toutes les forces s’accordant sur ce thème, qu’elles s’accordent ou pas sur les questions de “politique identitaire”. Elle soutient que nous ne devrions pas nous laisser distraire des causes profondes de la guerre et de l'inégalité sociale. Lorsque la gauche concentre ses attaques sur droite, l’establishment n’est pas seulement heureux, il encourage et favorise ce détournement.
» “La spécialité d’AntiFa est de cantonner les menaces de tyrannie aux marges sans réelles capacités du spectre politique, – des groupes isolés de néo-nazis costumés aux personnalités de gauche s’exprimant librement et accusées d’être de tendance “rouge-brune”. Cela revient à maintenir la gauche au calme sous surveillance dans sa bergerie, tandis que les loups rôdent librement”.
» Johnstone est pleine d’espoir et encouragée par deux choses : une nouvelle génération de chercheurs de vérité et le fait que la vie est pleine de surprises. »
De tout cela et pour mon compte, je retiens ce qu’il faut penser de l’action des ‘AntiFas’ dans l’actuelle période de trouble aux USA, qui vaut bien celle des ‘Black Blocs’ par rapport aux Gilets-Jaunes et pour le bénéfice du gouvernement/du Système. (Diana Johnstone parle également, et longuement, des GJ : elle connaît parfaitement la France, ayant résidé pendant des décennies à Paris, et donc parfaitement informée de la politique française.)
La différence entre ces deux composants proches, ces ‘brutes utiles’ du Système figurant une contestation de gauche ultra-violente sans risque pour le Système, c’est que justement le Système en France était à peu près unifié alors qu’il est absolument fracturé aux USA. Du coup, les ‘Antifas’ agissant pour une faction du Système qui leur laisse les mains (ou les poings) libres, agit nécessairement contre l’autre faction avec autant de force ; et s’ils vont trop loin, comme ils sont en train de faire, ils vont finir par être un handicap pour Biden et un avantage indirect pour Trump, ce qui alimentera encore un peu plus la guerre civile interne du Système. La seule remarque importante, c’est le constat que le Système, pourtant si puissant aux USA, est également largement fragilisé à mesure par ses luttes internes. Du coup, chacune de ses manigances aux effets très destructeurs comporte en négatif un effet indirect également destructeur ; l’un exacerbe l’autre et ainsi de suite, accentuant la lutte interne... Vieille rengaine surpuissance-autodestruction.