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324117 janvier 2024 (07H15) – Je reprends à mon compte cette « Défense de l’espèce » mais à condition que cette “espèce” veuille bien qu’on la défende et se défende elle-même... Ou bien, larguez les amarres ! Et nous aurons une catastrophe qui ne sera nullement un ouragan transhumaniste qui n’a aucune chance de se faire parce que le transhumanisme n’a comme seul destin que l’effondrement une fois la chasse tirée, mais une chute sans fin au fond du fond du trou noir pendant que les dieux travailleront à nous fabriquer un substitut un peu moins tarte... Comme l’écrit Pecchioli :
« Construisons l'arche des hommes, chassons ceux qui veulent notre mort et nous le disent sans honte. Sinon, ils auront raison : l’homo sapiens ne méritera pas de survivre. »
Je reprends donc se dossier pour le compléter en deux parties, en m’appuyant sur la référence de départ dont on a signalé l’intérêt (notre intérêt, donc le mien) dans le texte-I, qui est Günther Anders et son ’Obsolescence de l’homme’.
• La première partie est une analyse « à-la-dedefensa » de la position superbe d’Anders. En fait, je reprends la partie commentaire d’un texte du 6 novembre 2018, à partir d’une observation des derniers avatars du porte-avions le plus récent et le plus puissant de l’US Navy : « Le USS Gerald R. Ford et l’ascenseur ». Le titre de cette première partie : « L’“obsolescence de la Machine” ? Horreur ! »
• La deuxième partie est une appréciation différente de la situation présente que pouvait nous faire craindre Anders, et que Roberto Pecchioli reprend à son compte. Pour moi, l’évolution actuelle ne conduit pas vers le transhumanisme mais vers son échec, son effondrement complet, d’autant plus bruyants qu’il croit que l’affaire est dans le sac. Désolé, Harari & Cie. Le titre de cette deuxième partie est évidemment : « L’obsolescence du transhumanisme ? Horrrreur ! »
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Malgré et au-delà des agitations des bestioles de la communication, du simulacre et du fakenewsisme des autorités officielles du Système, il est temps de développer et de sortir quelque enseignement fondamental de ce qui est l’agonie du technologisme au travers d’une crise qui a pris des allures terminales. Ce qui est en jeu, c’est un concept non moins fondamental qui est apparu depuis le début du XXème siècle et qui a notamment été magnifiquement développé par Gunther Anders dans son livre L’obsolescence de l’homme.
Gunther Anders fut l’élève de Husserl et de Heidegger, et le mari d’Hanna Arendt de 1929 à 1936. Militant pacifiste connu par ses actions contre la bombe atomique après la guerre (notamment ses entretiens avec un pilote d'un des B-29 de reconnaissance des missions atomiques sur le Japon), il se signala par une critique extrême du progrès qui le classe parmi les antimodernes. Il est de ces intellectuels juifs (son nom était “Stern”, qu’il changea en “Anders” à la fin des années 1920) qui ont développé une appréciation antimoderne de l’Holocauste. (Cette conception a été reprise par le professeur Rubenstein, que nous avons cité à plusieurs reprises.) Comme le note son profil Wikipédia,
« ... son livre ‘Nous, fils d’Eichmann’ reprend les textes qu'il a publiés sous la forme de lettres ouvertes adressées au fils du haut fonctionnaire du Troisième Reich et officier SS Adolf Eichmann. Anders voit dans l'entreprise d'extermination nazie, non un accident historique, mais le produit d'une modernité marquée d'une part par le décalage entre ce que l'homme est capable de faire et ce qu'il est capable de penser, et de l'autre par la division du travail qui, poussée à l'extrême, tend à transformer les hommes et le monde lui-même en machines. »
C’est justement sur la question de “la machine” que porte L’Obsolescence de l’homme, – Sur l’âme à l’époque de la deuxième révolution industrielle. Publié en 1956, le livre connut une nouvelle édition en 1979 ; dans son introduction, Anders estimait que les thèses présentées et qui faisaient de l’homme un esclave volontaire des machines qu’il avait créées étaient « encore plus actuelles », non pas en raison de ses propres capacités de visionnaire mais parce que la dégradation qu’il décrivait s’était encore accrue. Le livre initial a paru en français en 2005, neuf ans après la mort d’Anders, et il n’était toujours pas dépassé, là aussi « encore plus actuel ». Aujourd’hui, il peut servir comme remarquable outil de référence pour comprendre la portée de la crise du technologisme dont on a vu plus haut quelques signes.
Une des thèses du livre d’Anders se nomme “la honte prométhéenne”, qu’Anders décrivait ainsi, dans son “journal de Californie”, le 11 mars 1942 :
« La honte qui s’empare de l’homme devant l’humiliante qualité des choses qu’il a lui-même fabriquées ».
Anders rapporte l’anecdote d’une visite d’usine où étaient exposées des machines en parfait état de fonctionnement, c’est-à-dire fonctionnant à la perfection. Il nota le comportement de son compagnon de visite, qui manifestait une sorte de honte
« comme s’il avait honte d’avoir introduit ses propres instruments balourds, grossiers et obsolètes dans une haute société composée d’appareils fonctionnant avec une telle précision et un tel raffinement ».
(Dans ce cas et puisqu’il est abondamment question de la Grande Guerre, y compris sur ce site, on pourrait remarquer que ce conflit terrifiant, marqué par une mécanisation extraordinaire, avec deux tiers des morts au front tués par l’artillerie, – autrement dit la machine, – pourrait avoir signifié par avance et par l’absurde “l’obsolescence de l’homme”, y compris dans l’exercice ultime de la guerre...)
Anders construit donc sa thèse autour de cette idée : l’homme conscient de son imperfection, a honte de lui-même devant la perfection des machines qu’il a fabriquées, – effectivement “parfaite” description d’une “honte prométhéenne”.
« [D]ans sa “honte prométhéenne”, l’homme préfère, lui aussi, la chose fabriquée au fabricant, accordant à la chose fabriquée un degré d’être supérieur. »
Il en vient alors à se placer sous l’empire des machines qu’il construit, projetant dans ses machines son propre hybris en même temps qu’une confiance d’autant plus aveugle qu’elle semblerait ne pas être compromise par une sorte de complexe de l’égotisme puisque la machine est autre que lui-même.
Cette confiance est devenue si grande avec l’ère de l’électronique et de l’informatique qui sont devenus le machinisme producteur de la machine à la place d’homme pour assurer l’ultra-perfection, – Anders aurait pu modifier son sous-titre en « Sur l’âme à l’époque de la troisième révolution industrielle », – qu’il n’a plus paru nécessaire, dès les années 1990, de commencer le développement de nouveaux systèmes par une phase d’essais (prototypes) mais de passer directement à la production. (Ce cas est celui du F-35, archétype de la méthode qui est l’une des causes de la mise en valeur et de l'accélération du processus marquant l’effondrement du technologisme.)
Le temps est désormais suffisamment long depuis les décisions des années 1990 qui sanctionnaient le passage à la phase active de la “troisième révolution industrielle”, celle de la machine à fabriquer des machines, ou “système de systèmes”, ou encore l’électronique/informatique assurant directement la fabrication de machines ultra-avancées et, si on peut l’imaginer, ultra-parfaites, c’est-à-dire, comme l'autorise la grammaire du verbe, “plus-que-parfaite”. Presque un quart de siècle, c’est bien assez pour voir le doute fondamental s’insinuer et se justifier dans le sens du pire devant des échecs si retentissants qui, jusqu’ici, n’ont pu être redressées, mais simplement camouflés comme simulacres derrière le déferlement de la communication-fakenewsisme du Système, – autre trouvaille de l’homme pour maquiller son obsolescence comme les vieilles gloires du trottoir espèrent encore séduire grâce à un maquillage qui s’apparente à une véritable reconstruction en simulacre.
...C’est-à-dire que, pour suivre et utiliser la thèse d’Anders, à L’Obsolescence de l’homme répondrait un siècle plus tard (cent ans après 1918) le spectre affreux de “l’obsolescence de la Machine”.
Ainsi pourrait-on avancer la thèse très opportuniste et en bonne partie ironique qu’au moins voilà validée l’utilité du F-35 et du USS Gerald R. Ford, – du nom d’un des plus stupides dans la galerie pourtant scintillante à cet égard des présidents des États-Unis. Ils nous démontrent l’“obsolescence de la Machine” et, par conséquent, le désespoir où se trouve plongé l’homme postmoderne.
Ô dieux, que leur reste-t-il ?
L’idée principale du texte précédent est donc que les craintes absolument justifiées de Günther Anders se heurtent finalement sur l’imperfection de machines jugées pourtant par les hommes de son temps parfaites et devenant même plus-que-parfaites”. Mon sentiment est guidé par une tonalité de type F-35 ainsi que d’innombrables exemples d’une hypermodernité s’enferrant dans des programmes kafkaïens et semant un nouvel et paradoxal “ordre de désordre complet” entre les blocages du technologisme et les labyrinthes bureaucratiques auxquels nous nous trouvons confrontés.
Mais il y a à mon sens un problème beaucoup plus grave qui est mis en évidence dans des domaines beaucoup plus vastes que ceux qui sont abordés. Ils dépassent, “au jour le jour”, les formidables prévisions théoriques du sherpa de la pensée-Schwab, le brillant alpiniste du programme Homo-Deus, sans doute rebaptisé ‘Program Man-God’ et probablement impulsé par le secrétaire à la défense Llyod Austin, – cela expliquerait son escapade hospitalière classée Top-top Secret puisque personne n’en fut dit-on informé.
Ce “problème beaucoup plus grave” est le fait d’un phénomène qu’Anders ne pouvait prévoir et qu’Hariri ne considère certainement qu’en fonction de la promotion de ses bouquins globaux : l’extraordinaire puissance de rapidité et de brouillage du système de la communication dans une époque que tout le monde s’entend à qualifier de ‘postvérité’. Du coup, les réalisations postvérités ne sont plus confrontés au verdict de la réalité et sont présentés, perçus et absolument crus selon les intenses déformations dans tous les sens, – mais surtout dans le sens qu’on sait et pour satisfaire les croyances cde qui l’on sait, – que les manipulations permises par l’hypercommunication font subir à cette réalité...
La postvérité engendre la post-réalité au moment où le système du technologisme s’enfonce dans des marigots de sables douteux, boueux et mouvants régis essentiellement par les contraintes sublimes de l’idéologie globaliste de Davos & Cie. Voyons quelques cas de cette post-réalité...
• ... Justement, à Davos on s’est réunis en grand nombre avec Zelenski pour régler le sort de l’Ukraine, évidement victorieuse contre la Russie absente du débat, et déclarer ce sort comme absolument favorable aux projets américanistes-occidentalistes (donc, Russie vaincue). Pourquoi ne traiterait-on pas les avancées du transhumanisme de cette même façon ? Hariri en ferait un nouveau ‘global best-seller’.
• L’Ukraine justement : cette affaire devait démontrer l’immense supériorité morale (et technologique) des technologies américanistes-occidentalistes. Il y a plusieurs cas du genre : l’immense supériorité du système ‘Patriot’, les divers blindés occidentaux, la maîtrise de toutes les technologies de la communication. La post-réalité a tranché. Le sort des technologies transhumaniste suivra-t-il le même chemin ?
• On peut avancer les mêmes remarques concernant les étonnantes performances d’une IDF hyper-américanisée et technologisée face aux hordes barbares et incultes du Hamas et des Houthis. Certes, la morale est évidemment du côté israélien puisqu’il doit en être ainsi, comme elle l’est du côté du transhumanisme : la victoire est donc acquise pour le second et nous seront bientôt tous “transhumanisés” façon-Netanyahou.
• Je prends des exemples d’applications générales sans trop m’attarder à des cas particuliers que nous connaissons tous : le triomphe du vaccin, celui du F-35 et du grand porte-avions ‘Gerald Ford’ forcé d’interrompre sa croisière de protection de la liberté pour remettre en place quelques vis et boulons que des matelots absents n’ont pu manipuler.
• Je ne vous parle pas non plus des fantastiques embouteillages informatiques et bureaucratiques qui mettent tant de piments dans notre vie devenue si morne et si lente, ou bien des sommets de vérités-postvérité atteints par l’immense système d’information (presseSystème et FakeNewisme) développés par toutes ces petites plumes zélées de l’éliteSystème du domaine soutenant, avec toute la postvérité qu’il faut, le triomphe ‘postvrai’ de la croisade transhumaniste. Ce serait, comme une formule en miroir complice, une nouvelle campagne triomphante d’Ukraine haussée à un niveau global sinon cosmique.
• Vous voulez parler politique ? Que dire de tous ces mouvements qui s’accumulent, qui engendrent et menacent d’engendrer des gouvernements qui ne comprennent rien au transhumanisme, qui soutiennent in fine et discrètement mais fermement ces Russes hypersoniques ressuscitant la Tradition avec tout le "Sud global’ suivant avec une solide conviction ; tout cela est bien orchestré pour mortellement entraver l’équipe Schwab-Hariri... Oui, que dire et faire de tout ce bazar ?
... Bref, je m’interroge pour savoir si la route vers le transhumanisme qui prétend se faire sur une formidable autoroute à 15 voie et en sens unique ne va pas se perdre sur un chemin poussière et boueux à la fois, plein de nids de poule non-autorisés et encombrés de caillasses vulgaires, et tournant en rond au milieu d’une nature hostile et non-informée de la puissance unique de cette entreprise ? Là-dessus, imaginez que ces multiples erreurs présentes dans les grands programmes de liquidation des populations « inutiles » se trompent de cibles et liquident les hordes des élites-Système plutôt que les ‘Deplorables’ identifiés en 2016 par Hillary Clinton et qui élurent finalement Trump ?
Note de PhG-Bis : « PhG n’a jamais dissimulé sa conviction que l’époque présente s’appuie sur deux puissances considérables : le système du technologisme et le système de la communication. Mais il juge que le système du technologisme a atteint son Principe de Peter et qu’il est aujourd’hui, dans un formidable embrouillamini de diverses formes antagonistes en pleine expansion comme autant de rhizomes à-la-Deleuze, dans l’entraînement d’une chute vertigineuse qui le vide de sa puissance proclamée lorsqu’il se trouva au sommet de son aventure... »
Voyez-vous, moi ce qui m’inquiète pour leur cas, c’est donc bien la communication plutôt que la technologie pour mener à bien le programme transhumaniste. La communication, véritable Janus et faux-jeton de première, se tient avec sa capacité de répandre à une hyper-vitesse les simulacres que les “petits-hommes” de Davos (des ‘réplicants’ du “dernier homme” nietzschéens) se montent pour la vérité de demain, engendrant les erreurs de programmation, les entrelacs et mélanges labyrinthiques des technologies en tous sens, des collisions frontales et sans pitié, des ‘blockbusters’ du type hollywoodien en délire catastrophique... Et tout cela risquant de nous conduire ; sinon nous conduisant à coup sûr à un hyper-super-chaos qui, lui et pour le coup, sera véritablement transhumaniste et caricature de transhumains en transformant nos sublimes élites-globalistes homo-Deus et Bon Dieu de fer-blanc, en sans-abri des pentes neigeuses de Davos et en marchands de tapis-volants proclamant, comme un ‘Vol au-dessus d’un nid de coucous’ : “Je suis Dieu, nom de Dieu, mais partout l’on me répond : ‘Dieu est mort’ !”
... Seul Céline, brave cœur, leur donnera un tout petit peu d’espoir avec son « Dieu est en réparation » écrit en exergue du ‘Voyage...’. Mais cela ne durera pas, cet espoir-là, – Louis-Ferdinand, mauvais mécanicien, en ricanait à l’avance, – et, au bout de cette attente, nous serons parvenus au terme du cycle identifié par Guénon. Alors, le transhumanisme sera jeté dans la même fosse commune, sorte de caveau familial prévu pour le ‘Kali Yuga’.
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