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541824 août 2019 – Nul ne parvient à se débarrasser vraiment de l’“affaire Epstein”, avec son “suicide apparent” qui ne parvient pas à prendre sa place dans la glorieuse rubrique-Système des “affaires classées”. Très curieusement sinon de façon révélatrice (on va le voir), ceci se signale à notre vigilance, ceci qui doit encore renforcer notre attention et nourrir nos interrogations : la façon dont, pour la deuxième fois depuis le 10 août, le Washington Post relance les doutes et les soupçons avec des articles très structurés et très détaillés.
A ce point sur lequel je veux débuter cette petite chronique sur un ton anecdotique qui nous conduira tout de même là où je voudrais nous emmener, je vous dirais mon étonnement du comportement de mes “amis” trotskistes de WSWS.org que je suis avec beaucoup d’intérêt et de respect, et aussi un certain attendrissement devant la façon étrange dont ils tournent leur approche du sujet. On l’avait déjà vue dans un texte d’avant (du 14 août), cette tendance assez touchante pour que la doctrine reste bien droite et que le Grand-Léon ne les gronde pas d’Ici-Haut où on l’a accueilli :
« On s’en aperçoit à la lecture régulière de nos insolites amis de WSWS.org qui, à décrire la schizophrénie de Washington D.C./“D.C.-la-folle”, parviennent difficilement à dissimuler leur propre schizophrénie. Il ne fait en effet aucun doute pour WSWS.org que le Système, – c’est-à-dire la ploutocratie réactionnaire-capitaliste de D.C., – veut effectivement “enterrer” l’affaire du “suicide apparent” d’Epstein après avoir commis, ou laissé commettre le forfait. On en revient donc au constat présenté plus haut et aussitôt affiché par WSWS.org “que cette affaire devrait être conclue presto-pronto selon la narrative officielle, suivie de l’habituel ‘Circulez, il n’y a rien à voir’”, suivi effectivement du second constat : “Le problème est qu’il n’y a pas vraiment de narrative officielle”. »
Cette fois, c’est vraiment encore mieux, parce que l’essentiel de l’article de ce 23 août (pas plus tard qu’hier) est consacré au plus récent article du 21 août du Washington Post, et surmonté du titre : « Why is the New York Times still trying to sweep the Epstein case under the rug? » (“Pourquoi le NYT est-il toujours en train d’essayer de passer l’affaire Epstein sous silence ?”) Moi qui sais bien, comme WSWS.org d’ailleurs, pourquoi le NYT est effectivement “toujours en train d’essayer” ce qu’on sait bien, je me demande pourquoi mes gentils amis de WSWS.org n’ont pas titré leur texte plutôt comme ceci : « Why is the Washington Post still trying to put the light on the Epstein case’ inconsistencies and contradictions ? » (“Pourquoi le WaPo est-il toujours en train d’essayer de mettre en lumière les inconséquences et les contradictions de l’affaire Epstein ?”)
L’article de WSWS.org ne nous cache rien, allant jusqu’à juger “extraordinaire” (allez, je souligne en gras) un des premiers paragraphes de l’article du WaPo, – ce qui aurait bien mérité un titre, non ?
« Un article important publié jeudi 22 août dans le quotidien Washington Post dénonce la violation systématique des règles pénitentiaires régissant la détention du trafiquant sexuel multimillionnaire Jeffrey Epstein au cours de la période précédant immédiatement sa mort, le 10 août.
» Le journaliste Devlin Barrett écrit : “Au moins huit membres du personnel de direction du Bureau des prisons savaient que des instructions strictes avaient été données de ne pas laisser Jeffrey Epstein, un délinquant sexuel multimillionnaire, seul dans sa cellule, alors que l'ordre a été apparemment ignoré dans les 24 heures précédant sa mort, selon des personnes familières avec cette affaire”.
» Son rapport se poursuit : “Le fait que tant d’officiers pénitentiaires étaient au courant de la directive, – non seulement des officiers de correction de bas niveau, mais aussi des superviseurs et des gestionnaires, – a alarmé les enquêteurs qui évaluent ce qui semble jusqu'à présent être un étonnant manquement à suivre les instructions, ont dit ces personnes”.
» Ce langage est tout à fait extraordinaire, suggérant que les journalistes du Post ont des raisons de croire que la faille de sécurité n'a pas d'explication légitime et pourrait être le résultat d'une action concertée pour laisser Epstein exposé et vulnérable... »
Sur la fin, tout de même, le brave WSWS.org se rappelle brusquement qu’il a titré sur le NYT, et qu’il faut donc bien dire un mot sur le NYT justifiant ce titre... Voici l’avant-avant-dernier paragraphe où éclate cette révélation, avec la curieuse explication de la proximité du siège du NYT du lieu de la mort d’Epstein (donc il devrait en savoir plus !) par rapport à la distance entre le Washington du WaPo et Manhattan, à New York City :
« Dans ces conditions, la vraie question est de savoir pourquoi la majorité des médias américains, sous la houlette du New York Times, a choisi de gober l’affirmation du “suicide” et dénoncé toute remise en cause du verdict officiel comme une “théorie du complot”. Epstein a été tué dans le centre de Manhattan, à quelques kilomètres de Times Square. Mais la plupart des rapports exposant de nouveaux éléments de preuve dans cette affaire ont été publiés dans les pages du Washington Post, tandis que le Times a publié de longs rapports, – comme un compte rendu en première page dans son édition du dimanche 19 août, – qui pourrait se résumer par l’habituel “Circulez, y a rien à voir”... »
Ainsi pouvons-nous en déduire, en raisonnant de schizophrénie (celle du NYT) en schizophrénie (celle de WSWS.org), que le comportement du WaPo, déjà signalé à propos d’un premier article provoquant avec un zeste d’analyse sur la pointe de la plume, confirme une singulière tendance de cet organe qui nous avait habitués, dans l’“étrange époque” que nous traversons, à des alignements impeccables sur les consignes du Système... Mais justement, quelles sont les consignes du Système ? On l’avait déjà écrit sur cet auguste site : « Le problème est qu’il n’y a pas vraiment de narrative officielle », – et « il n’y a pas vraiment de narrative officielle » parce qu’il semble bien qu’il y ait “anguille sous roche” au sein du DeepState.
Passant ainsi de l’inconséquence sans conséquence de WSWS.org à l’article du WaPo, je poursuis mon raisonnement, en véritable petit Sherlock, ma loupe en bouche, d’une façon si innocente qu’on finirait par croire que je suis, moi aussi, de la veine des complotistes... Mais cette fois, ce serait une sorte de “complot à OK DeepState”, supposant qu’il y a quelque bisbille, “du rififi Inside The Matrix”, quelque chose dans le genre Discorde chez l’ennemi.
Car enfin, vous savez ce qu’est notre-WaPo ? On le rappelait il y a peu, dans un article à propos d’un article du dit-WaPo, sur lequel je vais aussitôt enchaîner : « Il est assez coutumier de résumer la chose en disant que le ‘Washington Post’ (‘WaPo’) est “a CIA asset”, dans la mesure certaine où son actuel propriétaire, Jeff Bezos, l’hyper-milliardaire de Amazon, a acquis le quotidien grâce à un contrat de $600 millions avec la CIA, payé cash par l’agence. Plusieurs journalistes du ‘WaPo’ sont considérés comme de véritables relais de la CIA. » Et que dit cet article du WaPo qui y était commenté ? Que les relations entre le parti démocrate et Israël sont devenues très mauvaises, ce qui a été mis en évidence à l’occasion de l’équipée des filles de The Squad ; et l’on sait bien que le parti démocrate a toujours été, traditionnellement veux-je dire, le principal soutien d’Israël à Washington et il est le parti favori des juifs américains, en grande majorité progressistes et donc plus proches des démocrates, – et votant démocrate, ce pourquoi The-Donald est furieux. (Vous savez d’ailleurs bien, si vous lisez notre amie Badia Benjelloun, que les juifs américains commencent à se lasser des entreprises de Netanyahou et de l’inconditionnalité du soutien d’Israël qu’on exige d’eux.)
De tout ce qui précède, vous pouvez explorer les deux hypothèses suivantes et (voir plus loin) complémentaires, à savoir :
1) que la CIA pourrait bien ne pas détester que l’on sache qu’Epstein a été liquidé, et que cela permettrait de faire sortir en pleine lumière certaines implications, complicités, perversités aventureuses d’un tel ou tel que la dite-CIA voudrait voir mise au grand jour, – et, le moment venu, le WaPo pourrait avoir les bonnes infos...
2) et que la CIA aimerait bien qu’Israël modifie ceci ou cela dans sa politique, en prenne un peu moins à son aise, s’abstienne de certaines actions, de certaines pressions, que sais-je, et qu’il est par conséquent intéressant de faire savoir à la direction de ce pays que son influence aux USA est en train d’être mise en cause, peut-être de façon radicale, ce qui constitue un événement extraordinaire...
Peut-on lier les deux hypothèses ? Peut-être bien, et même à pleines mains si l’on se réfère à une affirmation largement répandue, selon laquelle Epstein en croquait de tous les côtés (agent double-triple-quadruple ?), et notamment comme agent du Mossad au côté du père de sa bonne amie Ghislaine Maxwell. (Philip Giraldi, un ancien de la CIA, développe largement cette thèse Epstein-Mossad.) A partir de là, on peut spéculer sur la possibilité d’affrontements externes entre la CIA et le Mossad (courant entre amis) et d’affrontements internes aux USA/DeepState qui leur sont liés, et affrontements symbolisés en parfait exercice de journalisme objectif par les lignes opposées suivies par le New York Times et le Washington Post sur l’affaire Epstein.
Voilà... Spéculations, tout cela. Il reste que je n’ai pas souvenir d’avoir vu une telle divergence sur une affaire aussi sensible que le cas-Epstein, entre les deux principaux journaux nationaux de la presseSystème US, tous deux références-Système en or massif. Cela donne un crédit très grand à l’hypothèse générale dite du “rififi Inside the Matrix”. Il n’y a rien de plus intéressant et de plus prometteur, et également rien de plus probable dans ces temps d’immense désordre à “D.C.-la-folle”, que cette situation de Discorde chez l’ennemi.
Pour cette raison, et sans faire ni dans le complotisme ni dans la divination, mais en s’en tenant au sens commun de l’esprit et du jugement dans cette “étrange époque” où le désordre, la radicalisation, l’absence de sens commun pour ses propres intérêts sont la marque du Système au rythme de sa surpuissance mutant en autodestruction, on peut avancer que l’affaire Epstein est loin d’être close et qu’elle nous réserve quelques retours de flammes qui ne manqueront pas d’intérêt ni de chaleur. Avançons donc...