Et pourquoi le Japon ne taperait-il pas AUSSI sur Séoul ?

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C’est un très grand événement depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale : le Japon annonce qu’il envisage la possibilité d’une attaque préventive contre la Corée du Nord. Le gouvernement a été convoqué pour apprécier s’il peut effectivement poser un tel acte (“envisager la possibilité de…”) dans le cadre de sa Constitution. (Très grand événement? C'est la première fois depuis 1945 que le Japon évoque la possibilité d'un acte militaire offensif, et préventif en plus, de sa propre initiative.)

Une dépêche AP nous détaille la chose de cette façon :

« Japan said Monday it was considering whether a pre-emptive strike on North Korea’s missile bases would violate its constitution, signaling a hardening stance ahead of a possible Security Council vote.

» Japanese Prime Minister Junichiro Koizumi told reporters his government wants a vote on the measure “as soon as possible.” “I think we must send a message that’s as clear as possible” to North Korea, he said.

» Japan was badly rattled by North Korea’s missile tests and several government officials openly discussed whether the country ought to take steps to better defend itself, including setting up the legal framework to allow Tokyo to launch a pre-emptive strike against Northern missile sites. “If we accept that there is no other option to prevent an attack ... there is the view that attacking the launch base of the guided missiles is within the constitutional right of self-defense. We need to deepen discussion,” Chief Cabinet Secretary Shinzo Abe said.

» Japan’s constitution bars the use of military force in settling international disputes and prohibits Japan from maintaining a military for warfare. Tokyo has interpreted that to mean it can have armed troops to protect itself.

» A Defense Agency spokeswoman, however, said Japan has no offensive weapons such as ballistic missiles that could reach North Korea. Japanese fighter jets and pilots are not capable of carrying out such an attack, a military analyst said. “Japan’s air force is top class in defending the nation’s airspace, but attacking another country is almost impossible,” said analyst Kazuhisa Ogawa. “Japan has no capacity to wage war.” »

Bien entendu, la question envisagée ici n’est pas la réalité d’une frappe. Cela n’importe guère puisque toute cette crise est pétrie de virtualisme, à commencer par les missiles nord-coréens. Ce qui est intéressant à observer, c’est le développement de la paranoïa militariste japonaise, directement inspirée par les Américains et qui, comme d’habitude dans cette sorte d’occurrence, dépasse les Américains.

Très rapidement, les Américains vont s’apercevoir qu’ils ne contrôlent plus les Japonais et qu’ils sont enfermés dans la nécessité de leur soutien, au nom de la rhétorique belliciste dont ils sont prisonniers. Comme vont les choses, Tokyo en viendra bien à menacer autant Séoul que Pyong Yang, et les Américains devront s’y mettre à leur tour. Il est difficile de trouver des mots pour décrire l’ampleur du vide de la politique américaine, et son absence complète d’orientation et de sens. Elle est réduite à une rhétorique maximaliste de type pavlovien, aussitôt suivie du constat de l’inapplicabilité d’une telle rhétorique, désormais suivie de l’apparition d’un substitut (dans ce cas le Japon) qui emprisonne Washington dans son inconséquence.


Mis en ligne le 12 juillet 2006 à 08H12