Il y a 2 commentaires associés à cet article. Vous pouvez les consulter et réagir à votre tour.
743De plus en plus régulièrement dans ces temps de troubles et de structure crisique, la vie intérieure US est parcourue par des allusions, des remarques, voire des déclarations plus précises concernant la sécession possible de l’un ou l’autre Etat. Cette fois, il s’agit du gouverneur du Minnesota, à propos de son hostilité à la loi sur les soins de santé en train d’être débattue, dont il a dit qu’elle pourrait être refusée par son Etat selon le Dixième Amendement de la Constitution.
[Le Dixième Amendement est le dernier de la série des amendements constituant “The Bill of Rights” annexée à la Constitution (rédigée par Madison en 1789, soutenue par Jefferson, adoptée en 1791). L’amendement dit: «The powers not delegated to the United States by the Constitution, nor prohibited by it to the States, are reserved to the States respectively, or to the people.»]
Il s’agit du gouverneur (républicain) Tim Pawlenty, qui a évoqué la possibilité de refuser, au nom de l’Etat du Minnesota, la loi sur les soins de santé en train d’être débattue au niveau national, pour être adoptée par l’administration fédérale. Selon un compte rendu de la Minnesota Public Radio (MPR), du 11 septembre 2009, Pawlenty discutait la question au cours d’une réunion d’une association qu’il dirige.
«During a conference call hosted by the Republican Governor's Association Thursday night, a caller asked whether states could invoke the 10th Amendment to the Constitution to stop President Obama's health care reform plan.
»Pawlenty, who is considered a potential challenger to Obama in 2012, said it's a possibility. “Depending on what the federal government comes out with here, asserting the 10th Amendment may be a viable option, but we don't know the details,” said Pawlenty. “We can't get the president to outline what he does or doesn't support in any detail. So we'll have to see. I would have to say that it's a possibility.”
»Pawlenty also said he hopes Republican governors will be more assertive about state's rights, and even bring up lawsuits to challenge the federal government.»
Ensuite, Pawlenty est un peu revenu sur sa déclaration, et l’intéressant de cette retraite est qu’elle est assortie de l’affirmation que le Minnesota n’a pas l’intention – pour l’instant? – de faire sécession de l’Union…
«But on Friday, Pawlenty backtracked from those statements. He said he isn't exploring a lawsuit, and he doesn't want Minnesota to secede from the Union. Instead, he said the idea of state's rights should be discussed.
»“I'm not saying that we're going to do anything unusual or abnormal. I'm just saying we're going to remind the federal government that there's a proper role for them and for the states,” said Pawlenty. “We're trying to keep that in focus.”»
La sensibilité du sujet est évidente, comme d’ailleurs la sensibilité autour du Dixième Amendement qui fixe, d’une façon bien imprécise, les droits des Etats par rapport aux droits du centre fédéral. L’intervention de Pawlenty montre une fois de plus:
• L’état de crise actuel des USA, concernant divers problèmes qui divisent l’establishment, conduit d’une façon assez systématique, à la question des droits des Etats par rapport au centre fédéral.
• Lorsque cette question a été évoquée, est évoquée par suite logique, comme inévitablement et inéluctablement, la question de la sécession, qui est le péché originel et fondamental pour la vision des USA de l’establisment. Cette évocation n’est pas nécessairement l’apanage des apprentis-pêcheurs, loin de là, mais aussi de nombre de ceux qui sont si prompts à les critiquer ; c’est certainement pour rendre leur critique plus expéditive mais le résultat à terme est douteux. Dans le cas de Pawlenty, qui n’avait pas initialement évoqué la sécession, c’est à cause de l’argument de ses critiques que son intervention ferait songer à la sécession qu’il a reculé (et annoncé qu'il n'était pas question de sécession...).
• Effectivement, ceux qui ont péché, soit en évoquant la sécession, soit en évoquant le droit des Etats, sont conduits à se rétracter pour se mettre en conformité avec l’establishment auquel ils appartiennent, sous l’argument qu’ils ne songent pas une seconde à la sécession. Ce type de déclarations, faite pour apaiser l’affaire, aboutit souterrainement à la mettre en évidence dans sa dimension la plus dramatique, en faisant effectivement circuler l’idée de la sécession. Les adversaires de l’establishment savent bien, ainsi, que l’establishment a une peur panique de l’idée de sécession, ce qui accrédite l’idée de la sécession dans l’opposition “dissidente”, ou hors des formes politiciennes – la seule laissée au public pour s’exprimer – pour exprimer cette opposition à l’establishment. Ainsi construit-on souterrainement la popularité d’une idée, autant pour ses effets contre ceux qu’on combat que pour ses vertus propres.
L’affaire n’est pas prête d’être apaisée, puisque, comme l’a dit Pawlenty, la question des droits des Etats face au centre fédéral est aujourd’hui complètement d’actualité et inévitable. Ces diverses conditions, avec ce qui précède, font que l’idée de la sécession, absolument proscrite, mise à l’index et maudite par les canaux officiels, pourrait un jour, dans des circonstances dramatiques, surgir avec une force également dramatique; la tactique de l’étouffoir et de la négation pratiquée à son encontre interdirait de soupçonner son surgissement et empêcherait de l’appréhender d’une façon efficace. Ce type de situation potentielle est classique dans un système si complètement coupé des réalités au nom des constructions virtualistes qui gouvernent son action.
Mis en ligne le 12 septembre 2009 à 10H09
Forum — Charger les commentaires