Eurofighter, retour en Hollande

Le consortium Eurofighter (EADS) a annoncé (le 2 mai 2009, selon Euro-Digest) qu’il faisait une proposition à la Hollande pour le remplacement des chasseurs F-16 de ce pays. Il s’agit d’une proposition industrielle de €7 milliards, pour des investissements à court terme et à long terme, en plus de la proposition elle-même portant sur les avions de combat.

Cette proposition est évidemment une conséquence directe des dernières péripéties, notamment hollandaises, qu'a connues le programme JSF.

«Rainer Hertrich CEO EADS, and Steve Mogford, COO BAE SYSTEMS today unveiled details of a euro7 billion (Gld15 approx.) industrial partnership program that could benefit Netherlands industry. The package was presented on behalf of the Eurofighter Partner Companies (Alenia Aerospazio, BAE SYSTEMS, EADS-Deutschland, EADS-CASA) in support of the Eurofighter bid as candidate in the program for a replacement of the Royal Netherlands Air Force (RNLAF) F-16 fleet. The industrial package is geared to both short term participation in production programmes, and long term, high-value defence and aerospace partnerships across the defence and aerospace activities of the Eurofighter partner companies.»

Eurofighter (avec le chasseur Typhoon) était présent dans la première compétition de sélection, ou plutôt de pré-sélection du successeur du F-16 hollandais, à l’hiver 2001-2002. Le Typhoon avait été distancé par le JSF et le Rafale respectivement. (Le Typhoon avait reçu, sur l'ensemble de ses performances, une cotation de 5,83 points de la RNethAF, contre 6,97 et 6,95 respectivement pour le JSF et le Rafale.) Il y eut ensuite diverses péripéties que nos lecteurs connaissent et peuvent retrouver sur notre site, et notamment, depuis plus d’un an en Hollande. On sait que, finalement, le secrétaire d’Etat à la défense de Vries, décida un nouveau processus de sélection pour satisfaire aux pressions des parlementaires. La chose ne trompa personne, et surtout pas EADS (Eurofighter Typhoon) et Dassault (Rafale), qui refusèrent la participation à cette compétition considérée comme un faux-nez pour justifier le choix du JSF. Seul le SAAB Vigen suédois (absent en 2001-2002) décida de jouer le jeu même faussé. Depuis, les choses ont évolué, comme on sait.

EADS/Eurofighter revient, confirmant ainsi que ce qui se passe en Hollande est très sérieux, que le JSF, qui semblait être le choix hollandais bouclé pour tout le monde depuis 2002, est réellement menacé. La décision a sans aucun doute une signification fondamentale, quand on a à l’esprit la suspicion totale où ce compétiteur (les compétiteurs, Dassault bien sûr, même également SAAB) tenait la position du gouvernement hollandais à l’été 2008. EADS constate d’une part qu’il y a désormais un délai important avant qu’une décision soit prise, en 2012, très certainement après une nouvelle compétition. D’autre part, EADS estime que la situation du JSF a changé, aux USA certes mais aussi en Hollande. Tous ces événements sont pris sérieusement, simplement parce qu’ils sont sérieux.

L’événement constitue un tournant symbolique dans la mesure où il marque un tournant de la dynamique, jusqu’ici marquée par un retrait, une abstention ou une absence européenne face au JSF. (La participation du Vigen à la compétition avec le JSF, il y a un an, ne constituait qu’une tentative atypique, le constructeur suédois ayant été hors de cette compétition auparavant.) Dans ce cas, Eurofighter lance une dynamique de retour ou de contre-attaque. Ainsi se trouve confirmée l’évolution actuelle du phénomène JSF, une évolution à laquelle bien peu de gens, et aucun “spécialiste” digne (indigne?) de ce nom, ne croyait évidemment il y a encore 2 ou 3 ans.

Il s’agit d’un événement “européen”, sans aucun doute, et l’on espère que les Français, – qui se montrent, si souvent, beaucoup trop impressionnés par leurs concurrents américanistes, – vont le compléter par un retour de leur côté, avec le Rafale. Il est aujourd’hui évident que l’on se trouve dans une dynamique nouvelle, ou en train de devenir nouvelle, où la mécanique de bulldozer du système de l'américanisme se trouve confrontée à un méchant grain de sable qui s’avère être un énorme rocher, qui s'est installé en travers de sa route.

Mis en ligne le 5 mai 2009 à 05H58