Euromissiles-II : vers une radicalisation antagoniste entre Européens et US

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Il y a eu ces derniers jours des tentatives, notamment des Tchèques qui se sentent mal à l’aise dans cette affaire du déploiement des anti-missiles US (Euromissiles-II) devant les réactions dures des Russes et l’absence de soutien des pays européens, pour obtenir l’appui des deux organisations occidentales, OTAN et UE. (Les Tchèques ont été voir les Allemands pour obtenir ce soutien, — sans succès, semble-t-il.)

Une dépêche Reuters, relayée par “Defense News”, signale l’échec de cette tentative en général.

• D’abord, les Américains — c’est-à-dire le Pentagone, l’USAF en particulier, — en rajoutent une couche. Ils signalent leur intention d’éventuellement chercher à installer une troisième base. «The head of the Pentagon’s Missile Defense Agency [Lt. Gen. Henry Obering] said Washington may want to put radar even closer to Russia — which opposes the plan — in the Caucasus, in addition to planned sites in ex-Warsaw Pact members Poland and the Czech Republic.» (A noter : aucune mention de la demande des Britanniques, pardon de Tony Blair, d’une base au Royaume-Uni dans le dispositif.)

• Puis, la position de l’OTAN : doit-elle approuver les choix des deux pays, c’est-à-dire prendre à son compte le soutien du réseau US? La réponse est qu’il n’y a aucune obligation même si un soutien serait bienvenu. «When asked whether the plan needed approval from NATO’s 26 members, Air Force Lt. Gen. Henry Obering said: “It’s important that we get the understanding and what I would consider to be as much partnering as we can do with our NATO allies. We are not looking for approval per se.”»

• Sur la position de l’UE, cette déclaration de Solana indiquant que l’UE en tant que telle se lave les mains de cette affaire et même qu’elle met en question son utilité. De ce côté aussi, les deux pays sollicités, la Pologne et la Tchéquie, sont seuls. «EU foreign policy chief Javier Solana said it was “questionable” whether a missile threat existed to Europe and it was up to European countries to decide whether to take part. “Every country in the EU is free to accept whatever they want to accept ... We are not as Europeans considering to establish such a mechanism of that type,” he said from the sidelines of an EU defense ministers’ meeting.»

Ces prises de position montrent une radicalisation antagoniste de facto en train de s'opérer à l’intérieur du camp transatlantique. Le système anti-missiles est spécifiquement US, basé sur l’analyse d’une menace pressante de l’Iran («We do believe there’s an urgency to the threat», dit Obering) que repoussent les Européens de l’UE. L’idée actuelle apparaît être que OTAN ne devrait pas être formellement impliquée, et l’UE ne le serait pas du tout, sous une forme ou l'autre, comme l’a dit Solana.

Il n’y a pas, pour l’instant, de la part des USA, de recherche d’une solidarité européenne de l’initiative US. Une cause est que Washington devine que cette solidarité n’existe pas et qu’une telle pression pourrait déboucher sur une crise à l’intérieur de l’Alliance (ce serait Euromissiles-I en pire) ; une autre cause est que le Pentagone ne se préoccupe pas d’une telle solidarité, habité de son esprit unilatéraliste courant. L’alternative à cette absence de solidarité est aussi une crise (“Euromissiles-II en pire”, sous une autre forme), parce que les pressions et les réactions de la Russie face à ce projet vont aller en s’amplifiant (surtout si une troisième base est installée dans le Caucase). La Pologne et la Tchéquie risquent d’être de plus en plus isolées, sans “protection” particulière de l’OTAN et dans une UE de plus en plus hostile, à l’image de l’Allemagne pour ce cas.


Mis en ligne le 2 mars 2007 à 06H04