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30 octobre 2002 — Le 28 octobre, le Transatlantic Center du German Marshall Fund (GMF) a rendu publics les résultats d'une vaste enquête d'opinion publique en Europe. Six pays européens ont été sélectionnés, mille personnes interrogées dans chacun d'eux. Les six pays constituent un choix significatif, notamment sur l'orientation politique qu'on peut en déduire (c'est-à-dire, en fonction de la politique officielle de ces pays) : l'échantillonnage représente en principe une très forte majorité acquise à l'alliance avec les USA. Les six pays sont l'Allemagne, la France, l'Italie, les Pays-Bas, la Pologne et le Royaume-Uni. A part la France dans le rôle de l'usual suspect, des pays traditionnellement ou nouvellement (Pologne) orthodoxes dans l'engagement pro-US.
Pour rappel, et selon les propres termes (en anglais, bien sûr) du GMF : « The German Marshall Fund of the United States (GMF) is an American institution that stimulates the exchange of ideas and promotes cooperation between the United States and Europe in the spirit of the postwar Marshall Plan. GMF was created in 1972 by a gift from Germany as a permanent memorial to Marshall Plan aid. »
Ce sondage en Europe à été fait en coordination avec un sondage aux USA, sur les mêmes thèmes, avec les mêmes questions, réalisé par le Council of Freign Relations de Chicago. Les résultats “coordonnés” sont les suivants :
• 64% des européens pensent que le terrorisme est actuellement la menace la plus grave contre leur sécurité ; 91% des Américains disent la même chose.
• La menace la plus grave après le terrorisme : 56% des Européens disent que ce sont les armes de destruction massive de Saddam (étant admis, selon le sens de la question, que Saddam a effectivement de telles armes), 86% des Américains disent la même chose.
• Européens et Américains sont d'accord pour juger que le rapprochement de la Russie de l'OTAN est une excellente chose, que la Russie n'est plus la menace qu'elle fut (60%des européens, 68% des Américains).
• Parmi les résultats du sondage tels que les rapporte Defense News, qui publie un article sur le sondage, certes le plus complètement remarquable parce qu'il montre une opposition radicale entre Européens et Américains, concerne le rôle futur de l'Europe. Voici un extrait de Defense News qui détaille ce résultat et un commentaire d'une personne qui le présente
« One of the sharpest trans-Atlantic splits in perception revealed by the polls concerns the future balance of power between Europe and the United States. Whereas 52 percent of U.S. respondents think their country should be the only world power, only 14 percent of Europeans polled agree with that. Indeed, 65 percent of European respondents want their region to attain superpower status to work with the United States as an equal partner.
» “There is a sharp divergence between Europeans and Americans here,” Pierangelo Everts, political science professor at the University of Siena, Italy, and one of the new report’s authors, said Oct. 28. “Washington doesn’t like the idea of an eventual European superpower.” »
Bien entendu, dans ce sondage c'est ce dernier point qui nous intéresse, et nous reviendrons sur lui. Les autres thèmes sont des thèmes de conjoncture, sujets à une formidable pression de propagande et de virtualisme. Le thème de l'Europe-superpuissance est un thème controversé, occulté, contesté, etc, mais une question constante et une question de substance ; que 65% des Européens consultés veuillent que l'Europe atteignent un statut de superpuissance, et encore des Européens de pays où, en majorité de pays, cette idée n'est pas officiellement soutenue (Pays-Bas, Italie, Pologne, allemagne), ou de manière très ambiguë (Royaume-Uni), — voilà bien un résultat stupéfiant. Il montre la puissance extraordinaire de cette idée et la façon dont elle répond à la nature des choses. Cette seule réponse, et le contraste du côté des États-Unis, rend ce sondage extrêmement intéressant.