Extrêmement plus dure sera la chute

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La notion que les USA font ce qu’ils veulent, où ils veulent, comme ils veulent, est largement renvoyée dans le rayon des accessoires, du côté des “dodo bird” (« seems largely to have gone the way of the dodo bird»), – nous dit Jim Lobe, dans une chronique du jour, sur Antiwar.com et sur IPS.

Jim Lobe nous donne cette chronique sur le déclin de la puissance US, mettant en évidence qu'aujourd'hui le principal problème est de savoir comment Washington va “gérer” ce déclin, – faire en sorte qu’il ne soit pas trop brutal, trop dévastateur, etc. Lisez ce passage de cette chronique, où Lobe rappelle les jappements d’hubris des divers historiens et chroniqueurs appointés, il y a seulement 5 ans, et ce qu’il en reste aujourd’hui, – avec des noms comme Paul Kennedy, Krauthammer, Kagan, – tous ces intellectuels qui restent hautement respectés en Europe comme experts imbattables. (On dirait que l’erreur de la prospective semblant être désormais la marque de la sagesse et du bon jugement… Tous ces experts et historiens, après s'être si complètement trompés en toutes choses, gardent pignon sur rue et sont aujourd’hui comme hier consultés avec un respect sans fin. Méditez cette étrange réalité.)

«At the time [2002], Kennedy himself suggested that Washington may have somehow escaped the laws of history, noting that the sheer size of the U.S. economy, and its technological prowess and military dominance, were unprecedented. “I've gone back in history and never seen anything like it,” he exclaimed at one seminar.

»People are now coming out of the closet on the word ‘empire,’” exulted Krauthammer. “The fact is no country has been as dominant culturally, economically, technologically, and militarily in the history of the world since the Roman Empire.”

»What a difference five years and an invasion and bungled occupation of Iraq make! References to the Roman Empire at this point are more likely to refer to its decline than to its power – an observation confirmed even by Donald Kagan, a dean of neoconservatism and Kennedy's colleague at Yale, whose sons, Robert and Frederick, have been champions of the Bush Doctrine and the Iraq War.

»“I've argued that not since the Roman Empire has anyone had such extraordinary power as the United States after the Cold War,” Kagan told Kitfield. “But all of the elements of our strength are now being challenged, and it's perfectly possible that we are seeing a relative decline in U.S. power that will prove lasting.”»

Devant cet extraordinaire effondrement de la puissance américaniste, – voilà qui, en vérité, est sans précédent dans l’Histoire, n’est-ce pas Paul Kennedy, «I've gone back in history and never seen anything like it»? – devant ce phénomène, il y a aussi le cas européen. Nombre de commentateurs européens, parfois relayés par des lecteurs, ont rapporté leur appréciation effrayée, leur alarme considérable devant le cas de Robert Gates, lors de la réunion des ministres de la défense des pays de l’OTAN à Vilnius au début du mois, “manipulant” les Européens en exigeant d’eux 7.000 hommes supplémentaires en Afghanistan. Vue d’Europe, cette exigence est un complot, comme si l’Europe ne pouvait se vivre sans être éternellement la victime expiatoire d’un permanent et irrésistible complot américaniste. Lisez donc comment la chose est perçue, du côté américaniste, – à moins que Lobe lui-même ne fasse partie du complot et ne nous conduise encore une fois dans les rets de notre propre servilité?

«“We are in a multipolar world,” Defense Secretary Robert Gates told a Washington Post columnist recently in what has to be considered the ultimate heresy to pro-war hawks led by the likes of Vice President Dick Cheney and Gates' predecessor, Donald Rumsfeld.

»Indeed, last month's image of President George W. Bush imploring King Abdullah of Saudi Arabia to increase oil production to boost the battered U.S. economy helped bring home the notion that the commander in chief's word no longer serves as an imperial command.

»“It's affected our families. Paying more for gasoline hurts some of the American families,” Bush told reporters just before his meeting with the king. After the meeting Saudi Arabia's oil minister made clear that Riyadh would increase production only “when the market justifies it” and not before.

»Almost as pathetic in their own way were the recent exhortations by Gates – the steward of a military establishment that spends more money each year than the combined defense budgets of all of the world's other nations – for Washington's NATO allies to contribute 7,000 more troops to help U.S. forces pacify Afghanistan six years after Rumsfeld and his neoconservative advisers contemptuously spurned their offers of help.

»That the response Gates received was not much more favorable than that delivered by Saudi Arabia's oil minister to Bush's entreaties spoke volumes not only about the way that his administration has both misunderstood and mishandled its “global war on terror,” but, more ominously, about the weakness and fragility of the alliance which Washington led to victory against the Soviet Union in the Cold War.»

(Notre avis est bien que l’asservissement européen aux USA se trouve d’abord dans la perception des Européens, aussi bien les pro- que les anti-américanistes, de la puissance US. Nous sommes les prisonniers de nos propres fantasmes à propos de la puissance américaniste, qui pour s’y blottir délicieusement en la jurant infinie, qui pour la détester d’autant plus rageusement que c’est par avance sans espoir de la voir s’abaisser puisqu’elle ne cesse de comploter avec succès. L’Amérique serait-elle l’excuse suprême des Européens pour écarter le poids du constat que les conceptions modernistes que l'Europe a imposées au monde constituent l'échec le plus accablant qu'ait connu l'Histoire? Il y a de cela dans nos accusations contre l'Amérique, — à cause des dégâts causés par sa puissance immorale, – et notre fascination de l'Amérique, – notre incapacité d'accepter son déclin d'une façon ou l'autre; tout se passe comme si l'Amérique portait, dans notre perception, à la fois la responsabilité d'avoir galvaudé nos valeurs modernistes, et l'ultime preuve que ces valeurs sont tout de même supérieures au reste.)


Mis en ligne le 18 février 2008 à 12H49