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44910 juin 2007 — Avant et après le G8, GW Bush s’est rendu en Tchéquie et en Pologne, les deux pays choisis pour avoir l’honneur d’abriter les éléments européens du système anti-missiles global des USA. Il faut noter que l’accueil a été contrasté : enthousiaste en Tchéquie, réservé en Pologne. Il semble que les Polonais, à l’image de l’ancien ministre de la défense Sikorski, commencent à s’interroger avec force sur les avantages de leur “alliance” privilégiée avec les USA. Les Polonais attendent des gestes de réciprocité de la part des USA, notamment que les difficultés sans nombre sur les visas des Polonais se rendant aux USA soient levées. Jusqu’ici, pas beaucoup de résultats.
Sur cette partie polonaise de la tournée de GW, voici quelques commentaires d’un texte de IPS.News du 9 mai :
«During Bush's short stop-over to meet with Polish President Lech Kaczynski Friday, both officials insisted on their commitment to the project that would place a radar in the Czech Republic and an anti-missile base in Poland to protect the “free world” from missile attacks by “rogue states.”
»But Polish backing for the project comes amidst growing concern by pundits and the media alike that Warsaw's faithful support and military contributions to U.S. interventions abroad have not been reciprocated by Washington — which does not allow Poles to enter the United States without a visa.
»Radowlaw Sikorski, former minister of national defence, was clear in reminding Poles that “Iraq and Afghanistan were our gestures of friendship towards the United States. The shield will be another gesture. The time has come for a tangible gesture of reciprocity.”
»The discussions were, however, given a jolt by a surprise offer from Russia — which had until now staunchly opposed the missile defence project, doubting the rationale given — to Washington to build the infrastructure at its radar station in Qabala, Azerbaijan.
»Bush promised to study the “interesting” proposal.
»“The surprise proposal really changed a lot. The Eastern European visit might not be important after this,” Jan Drahokoupil, analyst at the Czech Economy and Society Trust, told IPS. “We have to wait to see what [President Vladimir] Putin's proposal actually means.”»
En Tchéquie, au contraire, l’accueil des dirigeants, avant le sommet du G8, avait été enthousiaste. C’est pour ce pays que le commentaire ci-après de Zoltán Dujisin, d’IPS, vaut surtout.
«U.S. President George W. Bush this week discussed a U.S. missile base in Eastern Europe with Polish and Czech officials, but the results were merely words, and the two European countries showed some naivety as international players.
»There were great expectations from two of Washington's most faithful allies, but the young democracies revealed, each in their own way, that they are still learning how to deal with the world's superpower.»
L’opposition à la base de radar du réseau anti-missiles est très forte en Tchéquie et un référendum est loin d’être impossible, avec un résultat certainement très délicat pour l’engagement de ce pays. Les dirigeants tchèques, allant au plus grossier, ont choisi comme argument politique décisif d’exalter le rôle de “libérateur” historique de la Tchécoslovaquie et de “défenseurs des libertés” non moins historique des USA. Pour eux, l’engagement avec les USA vaut une garantie de sécurité de la puissance US et leur argumentation est qu’en effet cette garantie a existé dans le passé, ne serait-ce que dans l’attitude de soutien et d’intérêt des USA pour la Tchécoslovaquie. Les trois dates qui viennent à l’esprit pour justifier cette plaidoirie sont celles de mai 1945 (libération de la Tchécoslovaquie), de février 1948 (coup de Prague, prise de pouvoir par les communistes) et d’août 1968 (invasion soviétique après“ le printemps de Prague”). Les rappels historiques permettent d'apprécier les précédents de l’attitude US vis-à-vis des pays d’Europe de l’Est (de la Tchécoslovaquie).
Pour mai 1945, il devrait être connu que les Américains ont été les premiers à sacrifier l’Est de l’Europe à la domination soviétique, à la conférence de Yalta. A cette lumière, l’anecdote suivante, sur l’étonnante servilité des actuels dirigeants tchèques, pourrait paraître succulente aux gourmets de cette sorte de circonstance :
«Concerned that “the Americans could get the feeling that nobody here would remember who liberated the country and then has never occupied it,” Czech Defence Minister Vlasta Parkanova tried to charm the U.S. president by offering him a CD with a pro-U.S. song performed by the minister herself.
»This was “an illustration of the Czech government's approach to Bush,” Drahokoupil told IPS.
»The song, which borrows the melody of a famous Czech hit celebrating Yuriy Gagarin's arrival to space in 1961, was televised with images of U.S. and Czech flags, a radar installation and a Czech government building in the background.
»“Tell the guys who live on the stars; tell the guys who live in outer space. Tell them that we want to live in peace, but we prefer clothes from Uncle Sam,” the minister's lyrics go, before ending with a “we know who has freed us back then in May 1945.”»
Zoltán Dujisin termine cette héroïque péroraison par la précision suivante : «About 144,000 Soviet soldiers died during Czechoslovakia's liberation. The number of U.S. casualties is estimated to be between 180 and 290 soldiers.»
Pour février 1948 et contrairement à la légende, le “coup de Prague” n’amena chez les Américains aucune agitation particulière. Dans son excellent livre Harry Truman & the War Scare of 1948 (St Martin’s Press, 1993), Frank Kofsky observe que la situation tchécoslovaque n’avait jamais vraiment inquiété les Américains jusqu’en 1948. En novembre 1947, Keenan avait donné au secrétaire d’Etat George Marshall une analyse où il reconnaissait et admettait l’influence prépondérante de Moscou, PC ou pas au pouvoir. Yalta régnait absolument et il n’était pas question d’y interférer, et la seule préoccupation de Marshall concernait les pays d’Europe de l’Ouest, zone d’influence US selon Yalta…
«What is of enormous significance, moreover, is that Marshall continued to adhere to the same position even as the Communists were taking power in Prague. He was, a he telegraphed the US ambassador in Paris in February 24, 1948, “concerned at the probable repercussions in Western European countries of a successful coup in Czechoslovakia [CZ]
»“In so far as international affairs are concerned, a seizure of power by the Communist Party of CZ would not materialy alter in this respect the situation which has existed in the last three years. CZ has faithfully followed the Soviet policy in the United Nations and elsewhere and the establishment of a Communist regime would merely crystallize and confirm for the future previous Czech policy.”»
Août 1968, troisième et dernier point évoqué. On a une bonne image de l’attitude et de la réaction US au moment de l’invasion de la Tchécoslovaquie du 21 août 1968, par ces extraits du livre La mésentente apprivoisée, de Gaulle et les Allemands, 1963-1969, de Benedikt Schoenbrun, (PUF 2007, d’après une thèse universitaire de l’auteur).
«[En juillet-août 1968, l]e président Johnson accorde à d’autres sujets [que la Tchécoslovaquie] la priorité politique dans ses relations avec Moscou, notamment à des conversations sur les réductions [des armements]. L’éventualité d’une invasion soviétique en Tchécoslovaquie apparaît même sous l’angle d’une gêne dans les discussions que Johnson envisage avec Kossyguine puisque les deux événements ne devraient pas avoir lieu durant la même période. Le ministre de la défense, Clark Clifford, rassure son président à ce sujet. Dans une, deux ou trois semaines, dit-il, l’affaire tchécoslovaque sera résolue. Sans aucune gêne, Clifford poursuit : la situation tchécoslovaque est tellement enflammée que les soviétiques “inciseront cet abcès d’une manière ou d’une autre et je pense qu’il ne barrera plus la route”.»
Le soir du 20 août, «exactement à l’heure où l’invasion commence», Johnson reçoit l’ambassadeur Dobrynine qui lui lit le communiqué officiel soviétique. Johnson dit qu’il doit d’abord consulter ses conseillers avant que les USA prennent une attitude officielle. Puis on discute…
«Ce soir du 20 août, le président américain ne fait pas preuve d’une grande force de caractère. Il continue de s’entretenir avec l’ambassadeur Dobrynine, de façon très détendue et personnelle, notamment de ses petits enfants et de vieilles chansons. Johnson veut aussi fixer, le soir même, un sommet soviéto-américain en URSS pour discuter du désarmement. Jusque là, le Kremlin a refusé d’accéder au souhait d’un président qui devra quitter la Maison-Blanche dans quelques mois. C’est seulement le 19 août que Dobrynine a finalement apporté une réponse positive. Donc, le soir du 20 août, l’ambassadeur soviétique rentre chez lui surpris du calme de la réaction américaine à l’annonce de l’invasion de la Tchécoslovaquie.»
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