Gaza et l’implosion des élites US

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Gaza et l’implosion des élites US

• Des évènements intérieurs symboliques mais d’une extrême puissance sont en train de bouleverser la situation intérieure des États-Unis. • Il y a ainsi la réapparition du républicain Varek Rawaswamy plein d’idées violemment isolationnistes et une prise de position de la communauté des “artistes” de Hollywood. • Dans les deux cas qui sont deux camps absolument opposés mais très influents, on arrive à la  même orientation : condamnation absolue de l’action d’Israël contre Gaza et, à l’horizon, mise en cause de facto de la politiqueSystème.

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Brutalement, comme un incendie devenue incontrôlable, le domaine des élites aux USA s’enflamme pour “la guerre de Gaza”, essentiellement contre la stratégie militaire israélienne  de plus en plus vigoureusement dénoncée comme “génocidaire”. Dans ce tourbillon crisique Made in USA et au cœur même des élites US, on n’a pas le moindre souvenir (depuis le Vietnam) d’une telle tempête de communication conduisant à des reclassements inimaginables politiquement et socialement. C’est sans aucun doute un phénomène temporaire, – celui des reclassements, – mais en attendant il a lieu avec une telle force qu’il peut conduire à des prolongements qu’on ne peut prévoir.

Il y a énormément de domaines touchés mais on s’arrêtera à deux d’entre eux, extrêmement influents, extrêmement prestigieux et disposant de moyens de communication sans équivalent. Il s’agit du domaines de l’entertainment, essentiellement Hollywood, et du domaine politique où l’intervention d’un homme (d’un jeune homme de 38 ans) secoue le parti républicain mais aussi indirectement le parti démocrate qui révèle à cette occasion son extrême fragilité face à la problématique arabo-israélienne imposant une tension extraordinaire à l’idéologie progressiste-sociétale que tous ces gens chérissent comme autant de missiles hypersoniques anti-Trump. Tout cela a lieu alors que ce qui est le prétendu pouvoir exécutif, la présidence et l’administration en place, navigue en aveugle ivre-mort, complètement en mode “Bateau ivre” sur le rythme du “Hollandais Volant”, entre l’impuissance gâteuse de Joe Biden, les imperturbables mensonges du secrétaire à la défense Austin au Sénat et les incroyables humiliations subies par le secrétaire d’État Blinken lors de ses diverses visites en Israël et dans les pays arabes.

Voici un commentaire typique sur les zigzags sans espoir de Blinken qui doivent arracher un petit rire sarcastique au vénérable centenaire Kissinger, en souvenir de ses navettes victorieuses des années 1970, – celles des escales Tel Aviv-Le Caire-Damas-Ryad... Qu’importe que Larry Johnson écrive cela le 4 novembre, c’est tous les jours la même chose sauf que c’est pire que la veille.

« Pendant ce temps, le secrétaire d'État américain Blinken s'est rendu à Amman pour rencontrer certains des principaux dirigeants arabes et s'assurer de leur soutien au plan américain de création d'un État palestinien mythique. Pourquoi dis-je "mythique" ? Je ne crois pas que l'administration Biden soit sérieuse dans sa proposition. Personne ne fait confiance à Biden ou à son équipe de sécurité nationale inepte. Netanyahou a dit à Tony d'aller se faire voir. Cette rebuffade a été suivie par le bon vieux bras raide arabe que Blinken a reçu en Jordanie. Contrairement à Netanyahou, qui a refusé d'apparaître avec Blinken après leur rencontre, les Arabes ont pris plaisir à passer Blinken à la moulinette devant la presse mondiale. Il n'y a pas assez de Viagra dans le monde pour que Blinken ait l'air puissant ou redoutable. [...]

» Blinken est en train de devenir le Rodney Dangerfield [comique décédé, spécialiste des monologues « Personne ne me respecte »] de l'administration Biden (sauf qu'il n'y a rien de drôle chez lui ou dans ses prescriptions politiques), – nulle part la moindre marque de respect. Il est malmené comme un volant de badminton dans un ouragan. »

Encore ne parle-t-on pas des remous intérieurs au département d’État et à la Maison-Blanche où de sérieuses indications de révoltes intérieures commencent non seulement à circuler mais à être publiées avec des déclarations à l’appui. C’est l’intérieur même de l’édifice de la sécurité nationale, – ce fameux DeepState, vous savez ? –  qui tremble désormais, affaiblissant du coup et la position, et la politique si et quand il y en a une, des États-Unis dans la crise de Gaza.

RapSit-USA2023 : L’offensive-éclair de Vivek

Restons dans la politiquer et passons de ses structures à sa dynamique électorale qui suggère les changements qui se préparent... Hier soir, à Miami, le candidat républicain d’origine indienne Vivek Ramaswamy a fait l’essentiel du spectacle offensif avec des interventions tonitruantes contre le vieux GOP (‘Great Old Party’), complètement acquis à l’establishment, aux  neocon, à Wall Street, à la pensée-Système et aux réflexes qui vont avec. Il a reçu un accueil triomphal de la salle, tant son intervention était absolument calculée, – dans le sens du destin arrangeant les dynamiques pour les rendre très efficaces, – pour s’insérer dans le tourbillon crisique actuel des USA.

Ce qu’on retient surtout, c’est une plaidoirie vibrante pour le non-interventionnisme, l’abandon des guerres hégémoniques inutiles et coûteuses, dans ce cas le soutien à Israël dans les conditions qu’on sait bien entendu, – tout cela va avec. A un aperçu de la soirée, on ajoutera cette intervention personnelle du 8 novembre 2023, ainsi présentée sur ‘Yutube’, donc selon ses propres conceptions :

« Vivek Ramaswamy, candidat républicain d'origine indienne à l'élection présidentielle, devrait défendre une politique étrangère non interventionniste lors du troisième débat des primaires du parti républicain à Miami, mercredi soir. S'adressant à l'agence de presse Reuters, Vivek Ramaswamy a déclaré qu'il cherchait à se positionner comme le candidat le moins susceptible de s'engager dans une guerre étrangère. Mardi, M. Ramaswamy a publié un engagement intitulé “Non aux neocon”, que chaque personne nommée dans son administration devrait signer. Cet engagement repose sur trois principes : “Éviter la troisième guerre mondiale est un objectif national vital ; la guerre n'est jamais une préférence, seulement une nécessité ; et le seul devoir des décideurs politiques américains est envers les citoyens américains”... »

... Vous avez donc une petite idée du candidat et de sa ‘feuille de route’. Le problème n’est pas de trouver la réponse aux faits de savoir si Ramaswamy est franc, s’il a une chance d’être désigné, d’appliquer sa politique, s’il est un génie stratégique et un miracle de la métaHistoire, s’il est vendu, acheté, soldé, s’il a bu et s’il se drogue,– et ainsi, ainsi de suite, – toutes ces questions pratiques qui enchantent le lecteur friand de savoir ce que demain va encore nous asséner. La réponse au problème est que ce candidat qui sait manier le spectacle tombe à pic évidemment, au moment où la question de Gaza explose littéralement, terrifiant et paralysant 99% des politiciens US, – mais pas lui, parce qu’il a 38 ans, une fortune personnelle, un abattage de bête et une excellente perception du public, – et peut-être, qui sait, une sorte d’intuition de vivre au cœur de la GrandeCrise.

Grâce à lui, le problème, non seulement de Gaza ou /et de l’Ukraine, mais des engagements extérieurs US vient sur la table avec fracas. Ce problème pèse lourd, très lourd, des tonnes de quincaillerie, de $milliards et de centaines de milliers de vies humaines liquidées. Grâce à lui, il s’agit bien d’une implosion au cœur du monde politique US et de la campagne USA-2024 dont on ne pourra plus désormais se dépêtrer ; et cela, bien entendu, quel que soit l’élu, et cela que Vivek soit ou non retenu, ou qu’il sombre dans les oubliettes de ses bénéfices somptueux de milliardaires... On verra ! Pour l’instant, il ne nous importe que de voir sur l’instant.

RapSit-USA2023 : Hollywood s’en va-t’en-paix

Alors, on se tourne vers Hollywood ; symbole du fric, de “l’industrie du cinéma”, des ‘blockbusters’, des acteurs/actrices à $40 millions le rôle, du féminisme ‘MeToo’, du transgenre changeant de sexe comme de chemises, et surtout d’un progressisme-sociétal à toute épreuve avec une influence colossale du lobby israélo-sioniste depuis des décennies...

Eh bien, pour un jour au moins, tout cela s’en va en fumée, bien dans la manière hollywoodienne, au profit des habitants de Gaza en train d’être écrasés  par les bombes israéliennes, – pardon, plutôt, par les bombes américanistes ‘vendues’ aux Israéliens. ‘WSWS.org’, qui n’est pas particulièrement wokeniste ni progressiste-sociétal à la mode hollywoodienne, déglutit néanmoins d’une discrète satisfaction en mesurant l’impact public et de communication de l’initiative qui touche un nombre non négligeable de personnalités du bazar dit ‘show business’ :

« Un groupe d’acteurs, d’écrivains et de musiciens de premier plan a signé une lettre ouverte exhortant le président Joe Biden et le Congrès américain à “appeler à une désescalade immédiate et à un cessez-le-feu à Gaza et en Israël avant qu’une autre vie ne soit perdue”. Le groupe “Artists Call for Ceasefire Now,” souligne le fait que “5 000 personnes ont été tuées au cours de la dernière semaine et demie – un chiffre que toute personne de conscience sait être catastrophique. Nous pensons que toute vie est sacrée, quelle que soit la foi ou l’origine ethnique et nous condamnons le meurtre de civils palestiniens et israéliens.”

» Les signataires comprennent les acteurs Andrew Garfield, Ben Affleck, Mahershala Ali, Mark Rylance, Bradley Cooper, Brian Cox, Cate Blanchett, Ewan McGregor, Florence Pugh, Jeremy Strong, Jessica Chastain, Richard Gere, Sandra Oh et Tom Hardy. Des musiciens et interprètes tels que Jennifer Lopez, Selena Gomez, Ani DiFranco, Boots Riley, Brian Eno, Cat Power, Drake et Michael Stipe ont également ajouté leurs noms. [...]

» La liste des signataires comprend également les cinéastes Adam McKay, Ryan Coogler, James Schamus, Mira Nair, Michael Moore, Peter Berg, Jordan Peele et Alfonso Cuarón ; les écrivains Tony Kushner et Wallace Shawn ; les musiciens-interprètes Patti Smith, Peter Gabriel, Annie Lennox, Macklemore et Mandy Patinkin ; les bandes dessinées Jon Stewart, Ramy Youssef, Rosie O'Donnell, Mo Amer, Wanda Sykes, Margaret Cho et Judah Friedlander ; et le mannequin Gigi Hadid. »

Isolationnistes et globalistes, main dans la main

Bien, nous laissons de côté le texte de la pétition, les intentions de ses auteurs, peut-être les calculs, des comploteurs et des contre-comploteurs, la durabilité de la chose, son importance réelle ou fabriqsuée... Ce qui nous importe est l’événement brut, c’est-à-dire la chose brutale qui survient sans avertissement, sans complot de préparation ni de multiples articles prémonitoires. Or, le choc est si brutal que sa force oblige, non pas à un changement de politique qui nous importe peu, – on ne change pas la politiqueSystème, le saviez-vous ? –  mais à une modification radicale de l’état d’esprit du public aux USA, du soudain intérêt forcé du citoyen américain si indifférent au reste du monde, justement à tourner la tête ver ce “reste du monde”. Et s’il le fait, quel sentiment naîtra alors, par exemple lorsque son regard parcourt les rues de San Francisco :

« Je crois que vous méritez un leader de ce pays qui place en premier les intérêts de ses propres citoyens. Qu’est-ce que nous voyons  en Irak ? Un  pays brisé, 20 ans plus tard, avec un régime hostile et un régime anti-américain en Afghanistan. $7 000 milliards dépensés dans ces deux guerres, des dizaines de milliers de morts, vingt ans plus tard les talibans sont toujours au pouvoir. Nous ne voulons pas commettre à nouveau les mêmes erreurs pour notre pays. C’était la vision de George Washington. »

C’est du néo-isolationnisme pur, de la part du milliardaire d’origine indienne mais citoyen US 100%, Vivek Rawaswamy. Exactement la même chose, à part que c’est exactement le contraire de ce que réclament les hyper-vedettes friquées de Hollywood et Malibu, toutes plus globalistes les unes que les autres. Mais que nous importent ces positions prétendument idéologiques (on a ses humeurs et ses pensées n’est-ce pas) et si totalement opposées jusqu’à la haine inexpugnable, – sentiment humain général de Hollywood sur Trump, – puisque le résultat est le même : l’horreur soulevée à Hollywood par les attaques de Gaza conduit aussi inévitablement que l’argument de Rawaswamy pour s’occuper d’abord des rues de San Francisco à une rupture de l’aide et à l’approvisionnement en armes d’Israël, avec la même possibilité pour l’Ukraine, qui suivra naturellement grâce au zèle exceptionnel de Mister Z. devenu entretemps virtuose de l’héroïsme non-récompensé.

L’essentiel qui se joue n’a aucun rapport avec les intentions et les manœuvres des uns et des autres, les ambitions des politiciens ou les vanité d’“artistes” du cinéma. Ce qui importe c’est la rupture brutale, fondamentale de la politiqueSystème, ce succédané diabolique enfanté par le “déchaînement de la Matière”., ce masque monstrueux du démon dont la modernité s’est affublée pour nous faire accroire à sa très haute spiritualité.

Une certitude : si le front intérieur craque aux USA, si le Système, avec ses Biden, ses Blinken et autres étoiles lumineuses ne parvient pas à aveugler les fuites gigantesques ouvertes dans le barrage, ce sera le déferlement.

Mon cher Watson, 2024 sera une année intéressante.

 

Mis en ligne le 9 novembre 2023 à 18H40

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