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520Quelques-uns, qui ne craignent pas d’exprimer leur sentiment dans l’atmosphère de pensée et de parole cadenassée par les consignes de fer du Système, se sont exclamés devant le nouveau coup d’éclat de Trump, qui relève d’un coup de génie tactique en matière de communication. Il a tenu une conférence de presse à un moment stratégique, où les nouvelles de la convention démocrate où un ordre fragile avait été plus ou moins rétabli après le chaos des 36 premières heures, auraient dû être seules à occuper les préoccupations, les oreilles et les stylos de la presse-Système. Et il a réussi : par un mot ou l’autre, et surtout par une déclaration en apparence explosive et qui relève complètement de la technique du contrefeu et transforme une défensive statique en contre-offensive agressive (« Russie, si tu m’écoutes, j’espère que tu seras capable de trouver les 30.000 e-mails [de Clinton] qui sont portés manquants »), il a attiré sur lui toute l’attention ; non d'ailleurs, il faut dire qu’il a forcé tous les médias de la presse-Système à tourner leur attention vers lui.
La phrase d’apparence si explosive, qui ne peut passer inaperçu pour aucun média y compris de la presse-Système parce que Trump est candidat républicain et que les nécessités de la communication (sensationnalisme) l’exigent, avait été précédée d’une vigoureuse dénonciation de tout ce qui avait été développé à son encontre selon la narrative-“Trump manipulé par Poutine”, tout cela dans des éclats de voix et de rire tout à fait dans son style. L’intervention était agrémenté de dénonciation de la convention démocrate et du babillage des orateurs qu’on y entend quand les huées des pro-Sanders permettent de les entendre : “Personne à la convention démocrate ne parle d’ISIS (Daesh), le vrai danger pour les USA, personne ne s’y intéresse !”
Trump avait programmé sa conférence de presse, en laissant toute liberté aux journalistes d’aborder les sujets qu’ils voulaient, au troisième matin de la convention démocrate, alors que tout le monde était censé parler des affaires démocrates, l’émouvant discours de Bill sur sa rencontre avec Hillary (une narrative de plus, prompte à faire fondre Margot), la polémique autour des intentions d’Hillary vis-à-vis du TPP, tout cela auréolé de la majestueuse nouvelle qu’Hillary était officiellement la candidate démocrate, – rendez-vous compte, la premier woman ever (aux USA, parce que pour nombre d’autres, c’est déjà fait) a être candidate finale à la fonction de POTUS !
En plus du texte (ci-dessous) d’explication, complètement admiratif, de Byron York, sur ce grand coup de génie tactique de communication, on peut lire les réactions absolument stupéfaites et également admiratives du fameux commentateur Rush Limbaugh : « I don’t think I’ve ever seen what I just saw… Donald Trump just hijacked the Democrat convention after the biggest night of that convention so far. [Trump’s press conference was] a freewheeling, no-holds-barred, no-controls-on-the-media, ‘Whatever you want to ask me, ask me’ press conference. [...] [He] just totally hijacked it, and he was brilliant. He was on his game. This was the Trump from last fall. He was confident, he was hilarious, he was taking no BS from any in the media. He was challenging Hillary to do the same thing and calling her out, saying she hasn’t done a press conference in over a year.
» [Hillary Clinton] can’t do what Trump did today. Hillary Clinton intellectually, personality-wise, is not capable. She’s not capable of doing what Donald Trump did today. I have never seen a Republican presidential nominee even get involved in the Democrat convention. My experience is that the playbook in the professional, insider world of politics is that when one party is having its convention, the other party goes silent. [...] What Trump did today, I have never seen in my lifetime: A Republican presidential nominee go out and do a 10-minute, 30-minute, much less one-hour press conference and just refuting everything he’s heard at the Democrat convention to date. He just blew it up. And, in addition to that, he answered questions about this email business and the hack and the Russians and so forth. It just has the media outraged. »
D’autre part, l’intervention de Trump, avec la fameuse phrase déjà citée (« Russia, if you're listening, I hope you're able to find the 30,000 [Clinton] emails that are missing ») constitue, à l’intérieur du coup de génie de sa conférence de presse, une manœuvre également remarquable, du type-contrefeu. L’attaque contre Trump comme “Putin’s pupet” a pris ces jours derniers, comme une trainée de poudre enflammant le conformisme-Système de la presse-Système, des proportions épiques dans le genre-surréaliste, dans la presse-Système US, comme le montre excellemment un texte de Adam Johnson, sur Alternet.org (Johnson est très loin d’être un partisan de Trump, de même que le site de gauche progressiste Alternet.org ; son texte date du 20 juillet, et la tendance qu’il décrit avec de minutieuses références n’a fait que s’amplifier). C’est ce que nous décrivions hier de la sorte : « La “riposte” de l’équipe Clinton, qui a subi de plein fouet le contrecoup de cette affaire est d’en faire un complot russe au profit et avec la complicité de Trump. Grosse, très grosse narrative, outre le fait que flinguer le prétendu-messager n’a jamais rien enlevé à la teneur du message, si catastrophique pour le parti démocrate... »
Ce déchaînement poursuit, multiplié par dix et plus encore, le traitement totalement et ironiquement abracadabrantesque de l’affaire ukrainienne, puis d’autres qui suivirent, du point de vue de la narrative antirusse et surtout anti-Poutine. Ce qui est remarquable, effectivement, ce sont l’état de l’esprit, la capacité de l’esprit critique, la lucidité, tout cela précipité dans le fondement négatif des abysses où les plonge leur allégeance au Système. On observe un spectacle fait de spasmes, d’automatismes du discours, du discours vides qu’on remplit à la hâte d’anathèmes et de fureurs tellement usées à force d’avoir été utilisées, tellement informes à force d’avoir énoncé des choses si complètement étrangères à tout ce qui semblerait avoir un semblant de raison, sans parler de “réalité” dont on sait qu’elle est tellement pulvérisée qu’on n’en trouve même plus les restes. Dans The Duran.com du 27 juillet, Adam Garrie tente de rassembler les diverses manifestations de cet étrange spectacle, en nous annonçant que ce n’est plus “les fous ont pris la direction de l’asile”, mis plutôt “les bébés ont pris la direction de la nurserie”...
« The blaming of Putin and Russia for the leak of the DNC emails demonstrates the childishness of politics in today's West. Countries that once were capable of producing political figures who were moderately to highly intelligent cannot seem to do so any more. A clear example of this is a statement Philip Hammond, the former British Foreign Secretary and current Chancellor of the Exchequer, made a few hours after it was confirmed that the country had voted to leave the European Union. When asked who will be happy with the result he said ‘Vladimir Putin’. [...]
» If Brexit is the biggest story of the political summer, the US election is sure to be the big story of the political autumn. And surprisingly developments surrounding both events are being blamed on Vladimir Putin. On the one hand there is a comical element to this scenario. If the politicians and pundits in Europe and America were to be believed, Vladimir Putin would be too busy running other peoples’ countries to run his own. [...]
» However today, the establishment of the Democratic party are blaming not Wikileaks who published the emails, not themselves for being incompetent, not themselves for being something worse than incompetent but rather dishonest and devious. They are blaming Vladimir Putin for organising a hacking job which was published by Wikileaks! But it gets better. The high profile Democrats making these accusations admit they don’t have evidence to implicate Putin or anyone else in Russia. However they insist that they should simply be trusted in spite of the fact that the emails have established the fact that they have lied to their own party members and by extrapolation the American voters.
» What is the conclusion? If the Bush/Blair years seemed to constitute the lunatics taking over the asylum, present events seem to imply that the children have taken over the nursery. There is something beyond disgraceful about the ‘Putin did it’ culture that has developed. It is so childish, so petty. It reduces the complexities of international relations and the necessity of international cooperation to the tactics of a child who cannot take responsibility for his foolishness. Whether one agrees with their policies or not, one misses the age of political giants. If Gulliver was an aging voter, he’d have by now entered the land of the Lilliputians. »
Trump, qui vient d’ailleurs de l’habituel paysage politique caractérisant nos contrées, n’a alors aucun mal à émerger comme un génie dans cet invraisemblable chaos, – outre qu’il semble assez bien doté pour cela. Il s’agit du génie tactique d’un Patton, – toujours cette référence pour Trump, – appliqué au champ de la communication conçu comme un champ de bataille où l’on n’attend pas une seconde (« Un mauvais plan aujourd’hui vaut mieux qu’un plan parfait dans une semaine ») pour lancer ses anathèmes et ses insultes structurantes, comme autant de divisions blindées, dans les multiples trous du gruyère de la corruption en quoi s’est transformée la politique intérieure des pays du bloc-BAO, USA en tête comme toujours.
Son intervention autour de cette phrase fameuse sur Poutine qui devrait se saisir de 30.000 e-mails d’Hillary, si ce n’est déjà fait, et les balancer dans les trous du gruyère de la corruption américaniste, est parfaitement une technique (involontaire ou pas) dite du contrefeu. En disant cela, Trump brûle en avance tous les arguments auxquels pourraient s’alimenter encore la polémique en cours, aussi bien qu’auraient pu naître d’autres à venir si effectivement d’autres livraisons nous arrivent. (Assange nous en a promis à cet égard, un peu de patience.) D’une certaine façon, Trump “désacralise” dans un grotesque éclat de rire ou une insulte vindicative et postillonnante l’acte soi-disant venu de la Russie, en montrant à coups de marteau, comme une quasi-révélation, cette évidence que l’important c’est vraiment ce que le bon sens ne cesse de nous dire, savoir que ce qui importe est bien entendu ce que ces e-mails supplémentaires vont nous dire de supplémentaire et de considérable sur le fait des basses turpitudes d’Hillary Clinton, la candidate démocrate, et de son parti, le vertueux parti démocrate. Du coup, et malgré qu’il ne s’agisse que d’évidences, – mais tout est dans la manière de les balancer, – la perception est transformée : il ne s’agit plus d’une supposée intervention de Poutine qui n’a strictement aucune importance dans le débat, il s’agit d’un supplément d’information sur la Clinton, sur les démocrates, sur le Système, etc., qui va encore plus animer et ébranler le débat.
(Le “contrefeu”, c’est cette image telle qu’elle est définie dans une chronique du Journal-dde.crisis du 21 novembre 2015 : « C’est cette image que j’affectionne parce qu’elle est une version résolument réaliste du “faire aïkido”, du feu et du contre-feu : cette occurrence où, placés dans des circonstances géographiques et climatiques particulières face à un immense incendie de forêt progressant vers eux, les pompiers décident de brûler en le contrôlant un espace de forêt devant l’incendie principal, d’éteindre cet “incendie contrôlé” après qu’un espace suffisant ait été consumé, et d’y attendre l’incendie principal qui, rencontrant une bande de terre brûlée, diminuera radicalement d’intensité et pourra être à son tour maîtrisé. »)
Dans le texte de Byron York, du Washington Examiner, il nous a paru intéressant de voir développé l’idée (Limbaugh en parle aussi dans ce sens) qu’en agissant ainsi, ce que fait Trump c’est de foutre cul-par-dessus-tête la “tradition” du Système. En effet, Trump ne respecte en rien la “tradition” des présidentielles US, où les adversaires restent tout de même comme culs et chemises, et où la convention désignant le candidat de l’une des ailes du Parti unique doit avoir le champ libre de la communication, l’autre candidat de l’autre aile respectant effectivement cette attitude de “tradition” en s’abstenant d’interférer. Mais de tout cela, évidemment, The Donald se fiche comme de son premier gratte-ciel, ou disons pour être plus humain de sa première épouse...
(L’on parle bien là d’une caricature extraordinaire jusqu’à être complètement son double maléfique et négatif du concept de Tradition, lorsqu’on parle de cette “tradition” des présidentielles. Il s’agit de la “tradition” d’une entité maléfique par définition, et qui a installé ses us et coutumes, son apparat, ses façons d’agir, exactement comme l’on se structure, – et c’est bien là une des faiblesses de ce Système déstructurant que pour agir dans le sens de la déstructuration du monde il soit obligé de se structurer lui-même, donc vulnérable à sa propre action qu’on peut retourner contre lui [“faire aïkido”]. Dans son action antiSystème, Trump est complètement sacrilège, et rien n’est plus admirable et efficace.)
Lisons donc le texte de Byron York, pour le Washington Examiner du 27 juillet 2015, alors que la courbe des sondages ne cessent de marquer une faveur grandissante pour Donald Trump contre la reine-Clinton.
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There was plenty of news to discuss on the third morning of the Democratic convention at the Wells Fargo Arena here in Philadelphia. There was Bill Clinton's speech on behalf of his wife. A controversy over Hillary and TPP. The Democrats' continued downplaying of terrorism as a threat facing America.
It was all in the daily mix — until about 11:00 a.m., when Donald Trump walked to a microphone for a news conference at Doral, his resort in Miami.
Trump made news right and left. Questioned about fallout from the DNC email hack, he denied any ties to Russia. He said he would be "firm" with Vladimir Putin, but he wanted Russia's cooperation in the fight against ISIS and other international matters. He attacked Hillary Clinton over her own email scandal, suggesting the Russians might well have broken in to her system.
And then Trump said: “Russia, if you're listening, I hope you're able to find the 30,000 [Clinton] emails that are missing.”
It was an extraordinary moment. Whatever one's reaction to what he said, the fact is that in one brief appearance, Trump dominated the news cycle at a time when coverage is supposed to belong to the party holding its convention.
There used to be an informal agreement among presidential campaigns that a candidate would mostly "go dark" during his opponents' convention. It wasn't a matter of courtesy as much as recognition that it would be very hard for an opponent to break through the wall of news coverage devoted to the convention.
Donald Trump has demolished that conventional convention strategy.
"Trump has blown up that precedent and inserted himself on an hourly basis into the news cycle during Hillary Clinton's convention," said Ryan Williams, an aide to Mitt Romney in 2012, in a phone conversation. "I think that's a good idea for [Trump]. Why cede any ground at this point in the race? The Trump campaign has successfully utilized free media for the last year and a half to drive his campaign message. Why stop now?"
In addition to coverage of the Democratic convention, Clinton is also running tens of millions of dollars in ads in key states. Trump is not. Grabbing attention — wresting control of the debate — is key for Trump to stay in front of voters' eyes.
And by answering reporters' questions about Russia and bringing up the Clinton email scandal on his own, Trump once again directed attention to one of Clinton's greatest liabilities at precisely the moment she didn't want it discussed.
Another reason Trump intervened is because he can. In 2012 and 2008, Mitt Romney and John McCain gave mostly conventional stump speeches most of the time. They could talk boilerplate all they wanted during their opponents' conventions and not attract much coverage. Trump, on the other hand, says something controversial or outrageous or entertaining nearly every time he appears before a microphone. That's what he did Wednesday.
Even though in the past candidates stayed fairly quiet, the campaigns did try to shape coverage during conventions. This week, for example, Republicans have a big operation in Philadelphia. They've been featuring surrogate speakers and pushing rapid response, like noting that Democrats have said virtually nothing about ISIS in the convention so far. But the RNC can't grab the spotlight by the throat the way Trump can.
Is that good or bad? Many Democratic strategists believe Trump gives them new talking points every time he opens his mouth. Whether that benefits them or not, they realize Trump is playing a new sort of game.
"Modern communications technology has shortened the news cycle and created an avalanche of new information," said former Democratic Rep. Dennis Kucinich, who ran for president himself in 2004 and 2008. "This necessarily affects political parties, changes communications strategy, and invites the kind of counter-messaging that's coming from the Trump campaign."
So Trump's is perhaps the first truly 21st-century campaign?
"Au courant," Kucinich answered. "He gets it."
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