« Gingrich est un idiot, et vous pouvez me citer »

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« Gingrich est un idiot, et vous pouvez me citer »


28 avril 2003 — Après la “sortie” de Newt Gingrich contre le département d’État, dans sa conférence prononcée le 22 avril 2003 devant le think tank néo-conservateur American Enterprise Institute, il y a eu des réactions notables et qu’on doit apprécier comme extrêmement significatives. Nous en citons deux.

• Ce week-end, le secrétaire d’État Powell a fait des déclarations qui tendent à relativiser l’importance d’une “punition” éventuelle contre tel ou/et tel pays s’étant opposé aux USA dans la poussée vers la guerre. A la télévision canadienne (chaîne CBC), Powell a déclaré qu’il n’y avait aucune action préparée contre le Canada, le Chili et le Mexique, pour leur opposition à la guerre : « We are not plotting in the basement of the State Department or the Pentagon or the White House or anywhere else how to get even with these three friends ». Powell a également déclaré qu’il ne s’attendait pas à une détérioration durable des relations avec la France, archi-ennemi des Américains dans cette affaire. (La déclaration a été accueillie avec chaleur par les Français, notamment la ministre de la défense.) Tout cela est important pour la bataille washingtonienne : la notion de “punition” est essentielle aux yeux des super-faucons du Pentagone, Wolfowitz en tête. C’est un démenti sévère que leur apporte Powell.

• A Lisbonne, le 25 avril, une haut-fonctionnaire du département d’État a fait une déclaration fracassante, et une déclaration voulue, délibérée, clairement faite pour être publiée. Cette déclaration concerne Newt Gingrich et son attaque violente contre le département d’État, laquelle a contribué à créer une atmosphère si étrange à Washington. Elizabeth Jones, sous-secrétaire d’État pour les affaires européennes traite Gingrich d’« idiot » et elle tient à ce que cela soit publié.


«  US Assistant Secretary of State for European Affairs Elizabeth Jones was asked to comment on Gingrich's recent harsh criticism of her department's Middle East diplomacy.

» “Newt Gingrich does not speak in the name of the Pentagon and what he said is garbage,” US Assistant Secretary of State for European Affairs Elizabeth Jones told the [Lisbon] Publico daily. “What Gingrich says does not interest me. He is an idiot and you can publish that,” she added. »


La riposte est virulente. Elle est délibérée, calculée, elle est faite pour signifier aux super-faucons du Pentagone et aux néo-conservateurs en général que le département d’État est prêt à se battre. Elle est faite pour signifier également que GW Bush n’est pas un soutien acquis aux plus extrémistes, — car, évidemment, la Maison-Blanche a autorisé le principe de cette réaction, principalement en “laissant faire” après avoir indiqué préalablement qu’elle n’approuvait pas l’intervention de Gingrich (réactions des porte-parole).

Ces développements indiquent que la bataille interne à Washington est en train de prendre le pas sur toutes les autres préoccupations. Les péripéties elles-mêmes montrent également que la présidence se garde de prendre position, — si elle semble souvent soutenir les radicaux et Rumsfeld, elle ne s’oppose pas de façon catégorique à Powell. GW Bush semble être ce président sans guère de substance qu’on a deviné en général, refusant d’orienter sa présidence dans une voie bien définie, laissant à ses subordonnés le soin d’exposer les options et de s’exposer par conséquent. GW suit à la lettre les recommandations de son conseiller Karl Rove et il semble déjà se préparer pour la campagne des présidentielles de 2004 : désormais, il est probable qu’il ne voudra être associé a priori à aucune politique et qu’il se contentera de rallier tel ou tel camp selon les avantages qu’il peut en obtenir.