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740Il semble que le surnom de “Gorba le Grec” pour Alexis Tsipras fasse son chemin. Nous-mêmes l’avons inauguré dans le Forum du 12 mai 2012, et effectivement utilisé dans un texte, pour la première fois, le 14 mai 2012. Cette trouvaille ingénue, qui est pour partie inspirée par le film de Jules Dassin, en partie par notre attachement au souvenir de Gorbatchev, était peut-être déjà utilisée par ailleurs, – nous l’ignorons. (Tout juste avons-nous repéré, via Google, une étrange danse-parodie représentée sur vidéo, datant du 13 août 2009, et sans rapport sinon très accidentellement prémonitoire et absolument sans conséquence avec la Grèce d’aujourd’hui et Alexis Tsipras. La danse représenterait plutôt, côté prémonition, les incantations grotesque du Système face à son destin inéluctable que les entreprises de Tsipras.)
…Pourtant, voilà que Richard Cottrell, déjà cité le 17 mai 2012, adopte l’expression dans un texte du 18 mai 2012, sur EndLie.com : «Gorba the Greek: Glasnost in Athens – or the funeral pyre of democracy?» Nous en citons quelques extraits…
«There is currently a great deal of very typical Athenian drama surrounding the sudden emergence of a smiling young political rock star Alexis Tsipras, strolling about in the warm sunshine, tieless and relaxed in plain dark suit and smart white shirt, already elevated to the exalted status of the ‘Gorbachev of Greece.’
»And while it is true that there are some intriguing parallels with Mikhail Gorbachev’s parading of house-cleaning perestroika and glasnost and the situation in Greece right now, the analogy is not exactly water-tight. Gorbachev was at heart – and indeed has always remained – a system politician. Alexis Tsipras, the telegenic leader of the leftish Syriza coalition, on the other hand, is anything but a machine man; he rather more resembles David taking aim with his sling at Goliath. […]
»…So the parallels with glasnost and perestroika are in some respects quite apt, even if performed on the far smaller stage of Greece. Tsipras is certainly regarded by many Greeks as a giant killer, boldly challenging the global colossus. But there the parallel with David in similar circumstances expires.
»It is really the Greek people themselves who are standing up to a force they regard as tyrannical. Syriza is the vehicle for what is quite close to – and may become, if permitted – a popular electoral rebellion. But here we need to make one very important qualification. The Greek David is not aiming at the edifice of the European Union as such. Gorbachev, we remember, wanted to humanize the Soviet Union, not to tear it down… […]
»As a government, Syriza claims it would not seek to take Greece out of the EU and nor would it exit the euro and return to the former drachma. On both counts, Syriza stands for the status quo. If you dip into those twin Pravdas of globalism, The Economist and Time, you would gain a quite contrary impression. If you listen to the great Brezhnevs of the EU – the Kaiserene Angela Merkel, the pompous and seriously under-informed José Manuel Barroso, Portuguese head of the EU civil service, and particularly Jean-Claude Junker of the pocket handkerchief state of Luxembourg – then Syriza are hell bent on getting out of Europe altogether.
»Of course distorting an opponent’s platform is a trusty trick of the hustings. Thus, Tsipras and his people are accused of beliefs they do not hold. That is why Barosso recently scrapped the election, so to speak, and turned it instead into a referendum on Greece staying in the EU. I regard this as an initial soft assassination of the Boy Hero Tsipras. It may scare a few voters, it is true. But Greeks are not committing suicide in previously unknown numbers because they are afraid that Greece will quit the EU.
»These tragic events occur because people are losing their jobs, their businesses, their self respect and the ability to support themselves and their families. Which brings me to the real driving force behind Syriza: the austerity issue really being the symptom of a much deeper cancer which is eating away at the body politic of Greece.
»More than anything else, Syriza is a popular phenomena aimed at the villainous self-serving crew plundering the nation over so many years. Imitating the Mafia, three royal families exploited the state as a political closed shop and private fiefdom for their own interests. The Venizelos, Karamanlis and Papandreou clans operate vehicles which are in the specific sense purely nominal in their respective positions in the political spectrum.
»Greek elections have traditionally functioned as no more than a means of legitimizing the transfer of power from one sticky-handed faction to another, allowing for the interlude of the NATO/US backed military junta between 1967 and 1974. Syriza’s greatest achievement is to break into this enchanted circle of corruption and bribery. This is why Greeks are applauding in vast numbers. It is also why the Titans are shaking in their shoes…»
Nous ajouterons quelques remarques sur cette curieuse démarche sémantique spontanée, et quasiment simultanée, de faire de Tsipras un “Gorbatchev grec”. Cette interprétation serait effectivement à souhaiter, par rapport à ce qu’elle suggère ; et ce qu’elle suggère pour nous est qu’un “Gorba le Grec” ne serait pas un homme-programme, venu d’un parti, nanti d’une étiquette, d’orientations idéologiques, etc., mais plutôt un dynamiteur dans une situation d’une tension extrême, déclenchant sans l’avoir cherché précisément des conditions de bouleversement qui brisent le cadre du Système… C’est exactement la vision que nous avons de Gorbatchev, réformateur-radical devenu une sorte de kamikaze pulvérisant le cadre-Système d’un communisme transformé en une énorme usine à gaz-bureaucratique complètement paralysée. (L’analogie pourrait aller jusqu’aux menaces pesant sur un réformiste radical type “Gorba le Grec”, comme elle pesa constamment sur un Gorbatchev, qui ne cessa jamais, durant sa grande période, de faire comprendre à ses interlocuteurs occidentaux qu’il était sous la menace constante d’un coup d’État.) Si un “Gorba le Grec” pouvait effectivement contribuer dans le même sens à une action type-Gorbatchev par rapport à la Grèce et par rapport à l’UE, cela serait une fort belle contribution antiSystème. A cet égard, peu nous importe son programme, qui en général, dans cette sorte de circonstances, constitue une prospective de peu d’importance, en général pulvérisée par les évènements. Ainsi en fut-il pour Gorbatchev.
Pour autant, il est nécessaire d’ajouter que les conditions actuelles, en Grèce, par rapport à Tsipras notamment, sont assez incertaines, suffisamment pour tenir l’hypothèse “Gorba le Grec” comme une possibilité qui demande à être confirmée, même s’il est évident qu’elle pourrait prendre son envol brusquement selon les circonstances. C’est-à-dire qu’il n’est nullement assuré que Tsipras mérite actuellement, d’une façon légitime, son surnom de “Gorba le Grec”, du point de vue d'une position politique ouverte sur une possibilité de réforme radicale. Un de nos amis grecs (“D.V.”, l’auteur du remarquable texte du 28 février 2012) nous dit que la faiblesse de Tsipras tient dans son parti, qui est plutôt un rassemblement, voire dans son entourage, et auxquels il ne parvient pas à imposer une discipline durant cette période électorale. Beaucoup de gens de Syriza se complaisent dans des déclarations irresponsables, inutilement dramatiques et menaçantes, qui ont pour conséquence de déclencher des réflexes de crainte et de peur, et d’hypothéquer d’autant un possible résultat victorieux lors des élections du 17 juin.
Mis en ligne le 19 mai 2012 à 11H09
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