Hagel et Lugar, – les habiletés d’Obama

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Le candidat démocrate Barack Obama prépare la course finale, dont il ne doute pas qu’il sera l’un des protagonistes, l’autre devant être John McCain. Pour cela, une idée: préparer un cabinet bipartisan, où l’on trouverait des républicains. Obama a quelques noms à l’esprit. Il s’en est confié au Sunday Times du 2 mars

«Barack Obama enters the final stages of the fight for the Democratic presidential nomination, he is preparing to detach the core voters of John McCain, the likely Republican nominee, with the same ruthless determination with which he has peeled off Hillary Clinton’s supporters.

»The scene is set for a tussle between the two candidates for the support of some of the sharpest and most independent minds in politics. Obama is hoping to appoint cross-party figures to his cabinet such as Chuck Hagel, the Republican senator for Nebraska and an opponent of the Iraq war, and Richard Lugar, leader of the Republicans on the Senate foreign relations committee.

»Senior advisers confirmed that Hagel, a highly decorated Vietnam war veteran and one of McCain’s closest friends in the Senate, was considered an ideal candidate for defence secretary. Some regard the outspoken Republican as a possible vice-presidential nominee although that might be regarded as a “stretch”.

»Asked about his choice of cabinet last week, Obama told The Sunday Times: “Chuck Hagel is a great friend of mine and I respect him very much,” although he was wary of appearing as though he was already choosing the White House curtains. But after winning 11 primary contests in a row after Super Tuesday, he is ready to elbow Clinton off the stage.

(…)

»Obama believes he will be able to neutralise McCain by drawing on the expertise of independent Republicans such as Hagel and Lugar, who is regarded by Obama as a potential secretary of state.

»Larry Korb, a defence official under President Ronald Reagan who is backing Obama, said: “By putting a Republican in the Pentagon and the State Department you send a signal to Congress and the American people that issues of national security are above politics.”

»Korb recalled that President John F Kennedy appointed Robert McNamara, a Republican, as defence secretary in 1961. “Hagel is not only a Republican but a military veteran who would reassure the troops that there was somebody in the Pentagon who understood their hopes, concerns and fears,” he said.»

Obama nous préparerait donc un cabinet d'“union nationale” à sa sauce, selon une formule à l’américaine pour des temps d’urgence mais selon des lignes bipartisanes classiques. Mais si nous sommes bien dans un temps d’urgence (crises diverses, de l’Irak à la récession), nous ne sommes nullement dans un temps classique. (Il y a une forte nuance par rapport à l'analogie évoquée JFK-McNamara. JFK nomma McNamara après sa victoire, ce qui exclua McNamara, par ailleurs très apolitique bien que républicain, de la campagne. Au contraire, la présence de Hagel et de Lugar, hommes politiques, est annoncée, si le projet se concrétise, comme un facteur important de la campagne. Différence décisive.)

Le projet d’Obama, s’il est mené à terme, va paradoxalement marquer sa présidence plus à gauche bien qu’il fasse appel à la droite (parti républicain) en l’occurrence. Les noms républicains qui sont avancés, surtout celui de Hagel, sont ceux de deux “modérés” qui ont largement pris leurs distances d’avec l’administration GW Bush et de la clique qui la soutient (néo-conservateurs et le reste). Dans ce temps de “montée aux extrêmes”, des modérés qui montrent une réserve claire (Lugar), voire une hostilité affichée (Hagel) pour les extrémistes type-neocons et la politique qu'ils ont inspirée, deviennent eux-mêmes des radicaux, par la simple relativité des positions (les neocons ayant tenu le haut du pavé). Ils seront dénoncés dans ce sens.

Au reste, il ne fait guère de doute qu’un homme comme Hagel est apparu ces deux dernières années comme l’homme le plus audacieux dans son opposition à la politique extrémiste des bushistes, ou le plus audacieusement critique de cette politique. Pour donner une équivalence, on situera Hagel bien plus “à gauche” que Hillary Clinton, parce que bien plus critique qu’elle durant ces dernières années de cette politique générale belliciste de l’administration Bush.

Dans ce cas, d’une façon assez significative, la candidature d’Obama prend effectivement l’allure d’un rassemblement “anti-guerre”, avec toutes les nuances qu’on imagines, – mais en restant évidemment dans les limites du système, renvoyant aux aléas de la vie politique US où le conformisme exigé par le système n’est pas une matière avec laquelle on plaisante. Cela n'empêche pas le projet d'être, même dans ces limites, assez déstabilisateur par rapport aux habitudes du système.


Mis en ligne le 3 mars 2008 à 06H42