Heurs et bonheurs du “modèle américain”

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La Cour Suprême des USA se prononce aujourd’hui sur un cas intéressant, opposant douze Etats de l’Union au centre (Washington) sur la question de la lutte contre les émissions de gaz à effets de serre. Le Guardian commente la nouvelle ce jour:

«The supreme court in Washington will bring its ultimate authority to bear for the first time today on the issue of global warming - hearing legal arguments in a case that environmentalists believe could have far-reaching consequences.

»Twelve US states, led by California and Massachusetts and backed by several cities and environmental groups, have brought the case to try to force the Bush administration to regulate carbon dioxide emissions from cars and factories.

»They are challenging an appeal court ruling that the Environmental Protection Agency (EPA) — an arm of the administration — was not obliged to regulate CO2.»

Dans ce cas intéressant, le “modèle américain” — d’habitude proclamé comme exemplaire par les institutions européennes — est à l’inverse de ce qu’il nous est dit d’une façon générale et pédagogique, notamment par les institutions européennes, président de la Commission en tête. Il s’agit d’une poussée décentralisatrice (celle des Etats de l’Union), opposée à l’autorité fédérale qui prétend imposer une politique générale que nombre d’autorités locales jugent dommageable. Le point ici est moins le contenu de la politique que l’affrontement des pouvoirs et, au-delà, la question révolutionnaire suivante : à quel niveau trouve-t-on la véritable souveraineté lorsque des entités démocratiques composant un ensemble fédéral s’opposent, le plus souvent à partir d’une incitation populaire dans ce sens, à une politique centralisée jugée dommageable par ces entités?

Autre paradoxe charmant : les USA sont en train de nous asséner la preuve que la lutte contre le réchauffement climatique peut effectivement se faire à partir des pouvoirs parcellaires, des pouvoirs souverains ranimés pour l’occasion et constituant de facto un ensemble confédéral plutôt qu’à partir d’un pouvoir fédéral centralisateur. La seule chose que demandent les Etats de l’Union dans le cas envisagé, c’est que le pouvoir central ne leur interdise pas les politiques qu’ils entendent mettre en œuvre. («If the states lose the action, tough new measures brought in by California to force car manufacturers to produce cleaner vehicles would instantly be imperilled, as the state's legal right to set its own emissions targets would be undermined.»)

Le paradoxe édifiant pour l’Europe si friande du “modèle américain”, c’est que, sur cette question du global warming, les Etats de l’Union sont en train de se battre pour tenter de regagner une partie de leur souveraineté perdue (notamment à l’occasion de la Guerre de Sécession). Il s’agit d’un affrontement de pouvoirs sur la question de la souveraineté. Il s’agit de la même lutte en cours aujourd’hui en Europe, entre un cadre confédéral laissant leur souveraineté aux nations et un cadre fédéral tentant d’imposer l’autorité du centre.


Mis en ligne le 29 novembre 2006 à 05H53