“Homme blanc aux yeux bleus”, regarde ...

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“Homme blanc aux yeux bleus”, regarde ...

D’abord, grandes seront la surprise et l’indignation des salons et talk-shows, parisiens et germanopratins, devant la suggestion à peine déguisée qu’il existe bien des “races”. On en a lynché pour moins que ça. Puis, comme on s’aperçoit que c’est le président brésilien Luiz Inacio Lula Da Silva, dit “Lula” pour les amis, qui parle, en présence de Gordon Brown qui ne l’a pas fait arrêter par la police de sa pensée, on devient plus circonspect et l’on se demande sur quel pied danser.

Donc, Brown, qui se promène, au nom du G20 à venir, par-delà les terres influentes du monde civilisé, fit arrêt au Brésil, pour y rencontrer Lula. On sait que Lula fait partie d’une sorte de “bande des quatre”, – Brésil, Chine, Inde et Russie, – qui ont l’air d’accord pour expédier le dollar ad patres. Bien, l’on (Lula-Brown) parle du G20, l’on se dit des choses aimables et des promesses diverses, puis l’on tient une conférence de presse, – et voici la chose, selon The Independent, du 27 mars 2009

« Au Brésil, Gordon Brown a poursuivi sa tournée pré-sommet, mais il a été embarrassé lorsque son hôte, le président Luiz Inacio Lula Da Silva, a déclaré que la crise financière était causée par des "Blancs aux yeux bleus". Il a déclaré lors d'une conférence de presse conjointe avec M. Brown qu'il n'avait jamais rencontré de banquier noir.

» "C'est une crise qui a été causée par des gens, des blancs aux yeux bleus. Et avant la crise, ils avaient l'air de tout savoir sur l'économie", a-t-il dit. "Une fois de plus, la grande partie des pauvres dans le monde qui n'avaient pas encore [obtenu] leur part du développement causé par la globalisation, ont été les premiers à en souffrir". "Comme je ne connais pas de banquiers noirs, je ne pourrais donc que dire que cette partie de l'humanité, qui est la principale victime de la crise mondiale, devrait payer pour la crise ? Je ne peux pas accepter cela. Si le G20 devient une réunion juste pour organiser une autre réunion, nous serons discrédités et la crise pourra s'aggraver." »

Là-dessus vient sans doute le plus beau, le plus vertueux, qui est l’interprétation, – non, plutôt disons la “suggestion”, my dear, vous reprendrez bien une tasse de thé, – des services de communication et de juste appréciation du monde du Premier ministre:

«Downing Street sources suggested the controversial remarks were meant for “domestic consumption”.»

Autrement dit Lula parle, à côté de Brown, devant la presse du monde entier comme on l’imagine, mais en fait il parle pour le métèque moyen de la zone, des favelas de Rio de Janeiro, pour lui dire que le banquier prédateur du reste du monde est “un homme blanc aux yeux bleus” et qu’il n’a jamais vu un “banquier noir”. (Tout cela, indiscutablement une description de couleurs, donc de “races”, donc surenchérissement de la fureur germanopratine.)

Au contraire de Downing Street, – vous reprendrez bien une tasse de thé, my dear, – nous pensons que de telles remarques, dans de telles circonstances, sont dites délibérément, avec l’intention de choquer pour attirer l’attention, et dites explicitement dans ces termes crus pour choquer les salons et les talk shows, et par conséquent les dirigeants politiques occidentaux, et anglo-saxons précisément, qui en dépendent pour leur conception du monde. Elles en disent bien plus long qu’une très longue déclaration commune et que les entretiens avec Gordon Brown. Elles disent à Gordon Brown ce que beaucoup de gens pensent, et il est manifeste que “l’homme blanc aux yeux bleus”, c’est d’abord l’homme de la City et l’homme de Wall Street. Elles marquent une certaine mauvaise humeur sinon une mauvaise humeur certaine devant ces manigances diverses, entre Londres-la City qui voudrait vous concocter un G20 à sa manière pour tout recommencer et Washington-Wall Street qui voudrait donner ses consignes au monde entier pour que Wall Street recommence à faire du blé.

Le G20 est une sacrée trouvaille, un grain de sable de taille qui s’est glissé dans la mécanique bien huilée du circuit diplomatique globalisé jusqu’alors bien tenu dans les bornes de la bienséance. Avec le G8 qui faisait précédemment la loi, les choses étaient bien plus sûres. Au G20, au contraire, on peut s’attendre à du sport entre le bloc fortement anémié des Anglo-Saxons, un bloc européen particulièrement remonté ces derniers temps, type-“road to hell”, et le bloc de la “bande des quatre” qui ne rêve que d’avoir le scalp du dollar.

Reste le problème de savoir quels échanges vont pouvoir avoir, au G20, Lula le haut parleur et BHO, le chef des “hommes blancs aux yeux bleus” qui n’en est pas précisément la représentation.

 

Mis en ligne le 27 mars 2009 à 11H23