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216326 février 2016 – Impression d’une humeur “tourbillonnaire”, voilà ce qui m’envahit présentement, en présence de deux “crises” en pleine activité avec Syrie-II (ce n’est pas neuf) et les primaires des USA (c’est brutalement nouveau), au même moment, sans qu’aucune ne supplante l’autre, sans qu’aucune ne conduise l’autre à s’apaiser... (Je parle pour ceux qui se sont aperçus qu’il se passe quelque chose aux USA, à part l’American Dream.) . Cela devrait affoler l’esprit, confondre le jugement et introduire un sentiment de désarroi intellectuel profond sinon angoissant et me bousculer affreusement (problème du choix, de l’évaluation comparée en constant changement, de plusieurs paroxysmes en même temps, du poids de ces paroxysmes, etc.). Ce n’est paradoxalement pas le cas, sinon pour une certaine irritabilité au niveau je dirais “opérationnel” de l’état de l’esprit ; c’est-à-dire la souplesse nécessaire pour juger et passer d’un événement à l’autre, constamment, au moment adéquat et selon des jugements qui doivent l’être également. C’est une irritation passagère, comme l’est tout ce qui est “opérationnel” ; bref, une irritation qui, sur l'instant, a le don de m’irriter.
Non, le sentiment est autre, qui domine et me gouverne pour cette séquence, ces quelques jours depuis que la crise US semble vraiment trouver sa maturité en affirmant à la fois son importance et sa durabilité. (Cela, tandis que Syrie-II se poursuit à son rythme très puissant.) Le sentiment dont je parle est presque d’un acquiescement de la logique et de la raison devant une évolution qui me semble parfaitement en accord avec elle-même, comme si la Grande Crise montrait, cette fois à un niveau très élevé et d’une manière qui nous signifie son irrésistible ontologie, une très grande loyauté : elle tient ses promesses. L’humeur du moment est alors, chez moi, d’être presque rassuré et apaisé, comme si le désordre extraordinaire du monde devenait rassurant et apaisant, comme s’il me disait : “Ne t’en fais donc pas trop, fils, les événements du monde, sans l’aide de la poussière des sapiens, sont bien au rendez-vous”. Si vous voulez, ce serait comme une version, incomparablement différente dans la tonalité bien sûr mais portant le même sentiment du tragique, – mais certes, un tragique presque joyeux, qui est le vrai tragique pour nous libérer de la prison maléfique qui nous oppresse, — ce serait comme une version tragique et jubilante du sublime et tragique poème d’Alan Seeger (« Mais j'ai rendez-vous avec la Mort [...] / Et, fidèle à la parole donnée / Je ne manquerai pas ce rendez-vous »). Le poète serait “la Grande Crise” elle-même, objet se faisant sujet, s’adressant à moi, à vous tous, à nous tous, et le rendez-vous devenant pour nous-mêmes, “nous avons rendez-vous avec la Grande Crise et, fidèle à la parole donnée, nous ne manquerons pas ce rendez-vous”.
Ainsi ce paradoxe : “humeur tourbillonnaire” certes, mais d’un tourbillon qui ne vous tourne pas la tête, qui ne vous affole en rien, qui vous apaiserait par moment, peut-être parce qu’au cœur du tourbillon, comme dans un cyclone, se découvre le calme paradoxal de la tempête. Je sais bien, ce n’est qu’un moment, par définition une “humeur de crise”, changeante comme l’est une humeur. Il faut saisir ce moment et le contempler, puisque l’esprit n’est pas confus pour ce temps : le contempler et mesurer sa puissance.
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