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1000Toutes les élites égyptiennes, en général divisées sinon antagonistes entre civils réformistes et militaires, pourraient choisir une alliance de compromis face à la soi-disant “Révolution 2.0” en cours (les quatre derniers jours de violence qui ne semblent dégager aucun leadership et portent surtout une menace d’anarchie). C’est le sens d’une analyse de DEBKAFiles, ce 22 novembre 2011, une analyse qui est loin de faire l’affaire d’Israël, – en tout état de cause, c’est-à-dire quelle que soit l’issue des tractations en cours, quel que soit le destin de la “Révolution 2.0”.
DEBKAFiles résume les nouvelles propositions des militaires, qui sont basées sur deux constats complémentaires : les militaires ont admis qu’ils ne pouvaient contenir les troubles s’ils ne lâchaient pas du lest pour une transition rapide vers un pouvoir civil issu des élections ; les politiques nés de la première “révolution” admettent qu’ils doivent s’allier avec les militaires s’ils veulent arriver au pouvoir le plus rapidement possible et éviter les conséquences inconnues et probablement incontrôlables de la “Révolution 2.0”. (Les militaires ont effectivement déployé cette tactique de lâcher du lest en maintenant les élections législatives pour la fin du mois et en rapprochant la date de l’élection du président de la république en général attendue pour début 2013, à la mi-2012.) Les deux fractions semblent admettre que la “Révolution 2.0” porte tous les ingrédients d’une anarchie incontrôlable, dans laquelle ils ont toutes les chances de sombrer.
«In a TV broadcast Tuesday night, Field Marshal Tantawi announced decisions to set up a new civilian national salvation government, hold parliamentary polls on time next Monday, Nov. 28, and bring forward the presidential election to the end of June 2012. Before the rioters hit the streets, the presidential election date was open-ended and stretched well into 2013. The new government will be led by a “technocrat” prime minister rather than a politician, to speed up the transition to civilian rule. Until it is in place, the incumbent administration which resigned will carry on. […]
»Tuesday, as the violence escalated in Cairo's Tahrir Square, the military council invited mainstream political leaders, dominated by the Muslim Brotherhood and mainstream political parties, to decide together how to calm the unrest and save Egypt from total anarchy in time for Monday's vote. The parliamentary election cycle goes on for` four months until March 12. They agreed that the unity government taking over would be a coalition between the politicians and the generals. The former understand they cannot control the street or attain elective power without the army's support.
»It has not been missed in the West and Israel that the new civil government allows the Muslim Brotherhood for the first time in its history to hold office in national government.»
L’analyse générale de DEBKAFiles, qui demandera certainement à être raffinée, se résume finalement en une citation, que le site semble prendre à son compte, d’un ancien général israélien connu pour ses positions conciliantes et modérées, et qui sont pourtant, dans ce cas, extrêmement alarmistes pour Israël : «A former Israeli defense minister Binyamin Ben-Eliezer, known for his dovish views and tendency to nag Israeli officials to make every effort to come to terms with the post-Mubarak rulers, offered a different message Tuesday: He urged the government to start getting used to the disappearance of the 32-year old peace treaty between the two countries, warning it would soon make way for full-blown conflict.»
L’ensemble de cette analyse semble devoir se résumer en une simple équation qui est une alliance de facto entre les militaires, qui garderaient une partie du pouvoir dans l’hypothèse d’une situation rétablie et avec le processus démocratique accéléré des élections où il est admis que la fraction islamique (Frères Musulmans), que tout le monde juge dominatrice de l’opposition civile née de la chute de Moubarak, tiendra le rôle principal. L’alternative, selon l’analyse, est l’incapacité de réduire la “Révolution 2.0” en cours, c’est-à-dire pour l’instant un mouvement de révolte sans direction. Cette position modérée, ou dans tous les cas “tactiquement modérée” de la direction du parti islamiste, notamment par ses réserves à l’encontre des mouvements de rue, est largement confirmée par l’appréciation des forces d’opposition libérale, comme le montre ce rapide commentaire du 22 novembre 2011 du site Arabist.net, notant l’absence de ces dirigeants des Frères musulmans des manifestations, leur absence de soutien, alors que nombre de militants de l’organisation participent aux manifestations.
Toutes ces forces cherchant un compromis pour tenter d’arrêter les troubles civils semblent par ailleurs destinées fatalement à s’appuyer sur une stratégie désormais connue, et qui semble ainsi poursuivre sa marche inéluctable. Il s’agit de tenter de cimenter ou de refaire une union sur l’affirmation nationale et souveraine de l'Egypte, celle-ci ne pouvant se faire que contre Israël. C’est l’hypothèse émise par le général Ben-Eliezer, qui est d’annoncer que le traité de paix entre l’Egypte et Israël est de toutes les façons mort à courte ou très moyenne échéance, avec la probabilité d’un conflit entre Israël et l’Egypte. L’hypothèse vaut pour un arrangement constitutionnel entre militaires et forces politiques, c’est-à-dire essentiellement les Frères musulmans. En cas d’échec de cette combinaison et poursuite des manifestations vers l’anarchie, pouvant déboucher sur une sorte de “pouvoir révolutionnaire”, il y a toutes les chances pour que ce pouvoir s’affirme à la fois comme “démocratique” et “panarabe”, – si l’on veut, “populiste“ en termes américains (plutôt qu’européens), – et cela basé naturellement sur une forte affirmation de l’identité égyptienne passant elle aussi par une répudiation du traité de paix avec Israël unanimement considéré aujourd’hui comme une contrainte inacceptable exercée sur la souveraineté nationale égyptienne.
Mis en ligne le 22 novembre 2011 à 06H58