Israël et le JSF: toujours de plus en plus prudent

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Cette fois-ci, la source ne peut être mise en doute. Il s’agit d’une interview du chef d’état-major de la Force Aérienne israélienne, le général Ido Nehoushtan, par le Jerusalem Post du 4 octobre 2009, en version française pour la satisfaction de nombre de nos lecteurs. On sait, bien entendu, que la Force Aérienne israélienne est la plus chaud partisane du JSF, alias F-35, qu’elle considère que c’est l’avion de l’avenir, qu’elle veut en faire l’essentiel de sa force de frappe modernisée et ainsi de suite. (Et l’on sait aussi que cet engagement de la Force Aérienne israélienne en faveur du JSF n’est pas partagé par tous, notamment pas par les forces terrestres.) Nous avons donc là la voix israélienne la plus favorable au JSF.

L’interview est très long, il passe en revue toutes les grandes questions que rencontre la force aérienne israélienne. Quelque part, on y parle du JSF, dont on sait que c’est un sujet bien important pour Israël et pour les USA. Deux questions et deux réponses. Nous les reproduisons.

Jerusalem Post: «Où en sont les discussions avec les Etats-Unis concernant les avions de combat F-35?»

Ido Nehoustan: «Nous sommes en pleine négociation. Je ne peux pas en dire davantage. Je ne vois aucun changement dans les dates prévues. Cela dépend du succès des discussions et il est clair que nous n'allons pas payer pour cet avion. Il va devenir la colonne vertébrale de l'armée américaine. C'est un pas en avant.

Jerusalem Post: «Pourquoi est-il si important de se procurer cet avion?

Ido Nehoustan: «J'analyse le F-35 à plusieurs niveaux. En premier lieu, sur le plan stratégique. En 1974, Israël a acheté plusieurs F-15 et nous sommes devenus le premier pays après les Etats-Unis à voler avec cet avion. A cette époque, le F-15 appartenait à une nouvelle génération d'appareils, par rapport aux vieux avions russes qui se trouvaient au Moyen-Orient.

»Aucun doute n'était permis : le F-15 était forcément gagnant. Il a extrêmement renforcé les capacités israéliennes de dissuasion. C'est pourquoi, il est primordial que nous soyions les premiers au Moyen-Orient à utiliser les F-35.

Les remarques de Nehoustan concernant les négociations sont courtes et significatives par leur ambiguïté, voire par les contradictions implicites qui les marquent. Affirmer «Je ne vois aucun changement dans les dates prévues…» (affirmation assez optimiste impliquant un accord pour le printemps de 2010) pour aussitôt enchaîner par «Cela dépend du succès des discussions…», après avoir affirmé plus haut «Nous sommes en pleine négociation…», tout cela illustre parfaitement cette ambiguïté. Dit autrement, en fonction de ce que l’on sait par ailleurs: “Officiellement, rien n’est changé dans le calendrier, mais les négociations sont en plein développement et rien n’est acquis sur leur issue, ce qui implique que le calendrier pourrait changer…”. Ajouter «Il est clair que nous n'allons pas payer pour cet avion…» montre presque explicitement que les Israéliens ne sont pas du tout satisfaits du prix qu’on leur demande, qui prendrait en charge une part importante des frais de développement (prix demandé aux Israéliens qui est, selon diverses sources, très largement supérieur à $100 millions par avion); cela, d’autant que l’avion «va devenir la colonne vertébrale de l'armée américaine», ce qui implique que ce serait aussi aux Américains de prendre en charge ces coûts supplémentaires. Le «C'est un pas en avant» est laissé à l’appréciation de chacun…

Les arguments opérationnels font partie de la langue de bois des aviateurs israéliens, appuyés sur la croyance officielle dans les capacités opérationnelles supérieurs du JSF. Vaste domaine, de plus en plus parcouru par de vigoureuses contestations.

Compte tenu de la version optimiste qu’est tenue de présenter la Force Aérienne israélienne en faveur du JSF, ces déclarations confirment indirectement que les négociations sont très difficiles, entre Israël et les USA. Le Jerusalem Post a récemment annoncé qu’Israël ne négociait plus pour 100 ou 75 JSF, ni même 25, mais seulement pour une commande de 20 avions. Cela permettrait de satisfaire temporairement les Américains en réduisant l’engagement budgétaire et en attendant des temps meilleurs, s’ils viennent un jour.


Mis en ligne le 6 octobre 2009 à 16H09