Israël et le JSF: un pas en arrière

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Evidemment, jamais dans l’histoire des relations stratégiques entre les USA et Israël une question de fourniture d’armement (US) aura autant traîné et évolué entre hauts et bas que l’éventuel contrat du JSF pour Israël. Nous revenons sur la nouvelle, du 11 septembre 2009, sur Spacewar.com, qui reprend une information du Jerusalem Post annonçant que l’accord Israël-USA est à nouveau compromis. Il s’agit toujours des mêmes problèmes, le refus US de permettre aux Israéliens d’adapter leurs propres technologies sur les avions et le prix que les USA exigent pour le JSF.

«The contract for the F-35 had been expected to be signed in early 2010, but that is no longer considered feasible because of the unresolved issue of which systems the Israeli air force planes will have. Delivery of the initial 25 F-35s was originally scheduled to begin in 2014, but that it is now expected to be put back. […]

»Israel's Defense Ministry made an official request to the Pentagon for the aircraft in July despite the absence of final agreement on such issues as the cost and whether the Israeli air force would be allowed to install its own electronic warfare and communications systems.

»On pricing, the Pentagon had originally proposed $200 million per aircraft for the first batch, more than twice that the Israelis had anticipated. The Defense Ministry has been looking at a figure of $70 million to $80 million per aircraft. The Jerusalem Post quoted an unidentified senior Israeli officer as saying that if the cost per aircraft reached $100 million the Defense Ministry would have to reconsider the number of aircraft it would be able to buy. The cost had increased because the Israelis had requested the installation of many state-of-the-art systems in the export version of the aircraft.»

Malgré l’exceptionnel de la chose, mentionné plus haut, pas de surprise en vérité; comme si, selon l’expression couramment employée par les Soviétiques durant les années Brejnev – “tout se déroule selon le plan prévu”. Il est vrai qu’il s’agit du JSF, avec lequel l’exceptionnel est le courant. Mais dans le cas israélien, l’exceptionnel est particulièrement remarquable.

@PAYANT Le marché israélien est essentiel pour le JSF. Dans la situation présente, où aucun engagement extérieur sérieux n’a été pris en faveur de l’avion de combat US, Lockheed Martin et le Pentagone ont été conduit à axer leur stratégie (?) de marketing sur Israël, pour assurer un premier engagement de commande qui structure par une commande ferme la narrative du programme dans sa dimension internationale (le JSF comme avions de combat équipant le réseau général de la plupart des forces aériennes étrangères sous influence ou contrôle US). Contrairement aux affirmations courantes, la direction militaire israélienne n’est pas très favorable au JSF. Il fut même annoncé puis confirmé (à l’été 2007) qu’Israël ne commanderait pas 100 mais 25 F-35, et cela dans un futur indéterminé, ce qui était une promesse pour satisfaire les USA et nullement un engagement ferme. La direction militaire israélienne avait conclu de la “deuxième guerre du Liban” de l’été 2006 à l’utilité contestable de l’avion, alors qu’elle possède un arsenal aérien suffisant pour les missions qu’elle doit conduire (y compris une hypothétique attaque contre l’Iran). C’est alors que les pressions US ont acquis une puissance sans précédent pour forcer Israël à un engagement (voir notre nouvelle du 10 novembre 2008). En même temps, les conditions imposées par le Pentagone s’avéraient draconiennes, comme l’on sait, et comme il est répété dans le texte cité ci-dessus.

Le malaise actuel, qui conduit de plus en plus précisément à l’hypothèse d’un report de la commande qui était annoncée pour acquise (signature début 2010), doit être aujourd’hui envisagé comme véritablement fondé, et non plus comme une conséquence temporaire d'une simple manœuvre tactique comme il est de cours durant des négociations. Les conditions imposées par le Pentagone (prix, accès aux technologies du système, etc.) renforcent le camp de ceux qui, dans les forces armées israéliennes, étaient initialement opposés à une commande importante de l’avion, voire à une commande tout court. Mais plus encore, il semble bien que les Israéliens commencent à douter de la viabilité fondamentale du programme JSF, et cela devient un argument supplémentaire pour faire traîner les négociations par ailleurs si difficiles à cause des conditions de vente elles-mêmes. C’est un courant nouveau qui se fait jour, envisageant effectivement un échec du programme JSF. Il existe désormais un débat sérieux à ce propos, en Israël et aux USA, qui a des effets sur les tractations en cours pour la commande israélienne.

D’autre part, on a avec cette situation un effet de plus de la façon dont les USA conduisent leurs affaires, et particulièrement celles du programme JSF. Les conditions imposées à Israël relèvent d’une certitude du Pentagone qu’Israël ne peut résister aux pressions US sur des questions d’armement (d’où l’absence de concessions US), et aussi d’une évaluation de la situation israélienne faussée par les pratiques de la diplomatie politique et militaire US telles qu’elles sont mises à jour actuellement. Le Pentagone se désinforme lui-même sur la situation israélienne vis-à-vis du JSF, et sur l’attitude israélienne vis-à-vis des questions d’armement. Il n’envisage pas une seconde qu’Israël puisse résister à ses pressions, et, fondamentalement, puisse envisager de repousser l’acquisition de systèmes d’arme US dont la supériorité est un article d’une foi qui doit être partagée. Des évolutions sont pourtant possibles, illustrées par les nouvelles relations en train de s’établir entre Israël et la Russie à l’occasion des tractations en cours à propos du système sol-air S-300, dont Israël veut empêcher à tout prix l’éventuelle livraison à l’Iran. On n’a pas été sans remarquer, à cette occasion, la suggestion faite par Medvedev au ministre israélien Lieberman qu’Israël reprenne pour lui-même le lot de S-300 que l’Iran veut acheter. C’est-à-dire qu’il existe une possibilité qu’Israël puisse envisager une diversification de ses fournitures d’armement.


Mis en ligne le 17 septembre 2009 à 07H23