Joe et son “complexe Hubris-Némésis”

Journal dde.crisis de Philippe Grasset

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Joe et son “complexe Hubris-Némésis”

16 avril 2021 – Il faut dire que le démarrage en trombe de l’administration Biden dans le domaine de la politique (?) extérieure, dans le genre déstructurant, belliciste et provocateur, producteur d’un nombre incroyable de bobards aussitôt sanctifiés par le groupe moutonniers et fasciné de trouille des dirigeants des pays de l’UE, – eh bien ce démarrage est tonitruant ! C’est du super-Hillary aux stéroïdes, reprenant en complète surpuissance qui le dépasse, le “progrès” déjà apporté par BHO-Obama.

Certes, on pouvait prévoir en théorie ce retour de la politiqueSystème en mode turbo, mais par Dieu que les choses ont été vite ! (Même si les noms ont changé par rapport à novembre 2020 lorsque les grandes lignes de la choses furent dévoilées, qu’importe puisque c’est le Système [sous son faux-nez de ‘DeepState’] et sa politiqueSystème qui règne désormais sans concessions : « Ce n’est pas tant l’Amérique qui “est de retour”... mais plutôt le Deep State américain qui est de retour au sommet. »)

Bien entendu, ce n’est pas Joe Biden qui est aux commandes, mais bien un système, le Système, sous divers visages. J’avoue être surpris par cette floraison de fureurs provocatrices, ce qui montre qu’il faut toujours attendre le pire, – ou peut-être l’espérer, car l’on sait bien ma conviction que le Système en folie de surpuissance, comme c’est le cas ici, alimente à mesure son autodestruction.

Note personnelle : il y aura des victimes dites-collatérales, moi-même je ne me fais aucune illusion, sans certitude de rien, mais c’est notre destin. Nous devons nous échapper de cette impasse née de la politique du “zéro-risque” et du “principe de précaution” qui marque le crépuscule de notre civilisation dans une panique trouillarde et glaçante, vers la résolution de l’héroïsme et du sacrifice.

Quoi qu’il en soit, la forte impression que j’avais de voir le destin des USA dépendre directement de sa fracture intérieure qui ne cesse de béer doit se nuancer, ou se renforcer c’est selon, de la possibilité de l’intervention de cette catastrophique “politique” extérieure pour accomplir la transformation de cette fracture en désintégration. C’est la même idée qui est dans le texte de Larry Johnson, sur le site du colonel Lang (nouvellement nommé ‘Turcopolier.com’) : « La présidence Biden sera détruite par sa politique extérieure ».

Johnson s’attache évidemment à l’Ukraine, dont il voit le destin sous de sombres couleurs, selon l’argument que l’agrément du sénile Biden à une telle politique peut également correspondre aux possibilités très réelles de pression que le même Biden et sa progéniture peuvent craindre de l’Ukraine (si les USA ne soutiennent pas cet État dans sa fuite en avant), à cause de l’extraordinaire corruption de la famille dans ces terres incertaines.

Voici l’intro et la conclusion du texte de Johnson, avec entre les deux le détail des divers éléments ukrainiens et américanistes qui sont intervenus pour faire monter la tension.
 

“Joe-la-démence” et sa coterie de complices-voyous se sont lancés dans une politique étrangère qui risque de déboucher sur une nouvelle guerre mettant sans aucun doute l’Amérique en grand danger et renforçant l’impression croissante que les États-Unis sont faibles et divisés. Il existe trois points chauds inquiétants (l'Ukraine, la Chine et l’Iran) qui pourraient exploser à tout moment et catapulter notre nation dans une confrontation militaire coûteuse et mortelle. L’Ukraine est en tête de liste.
» Les tractations de corruption de Joe Biden et de son fils Hunter en Ukraine au cours des quatre dernières années les laissent complètement compromis et sujets à la coercition, voire au chantage. Dans ce contexte, les efforts déployés depuis dix ans par les États-Unis pour affaiblir l'influence de la Russie dans l’est de l'Ukraine ont été relancés avec l’arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche.
[...]
» Joe Biden ne prend pas les décisions. Bon sang, je doute qu'il ait la capacité mentale de choisir de mettre ou non des sous-vêtements le matin. Son équipe de sécurité nationale, qui est complètement acquise aux grandes entreprises de la défense, ne s’intéresse qu’aux billets verts déversés dans leurs coffres. Cela n'a absolument rien à voir avec la sécurité nationale des États-Unis.
» Nous allons surveiller cela de près. Cela pourrait vite dégénérer. Je prie pour que cela n'arrive pas. La Russie est toujours une superpuissance nucléaire, en dépit de la campagne de propagande soutenue menée par l'Occident pour dépeindre la Russie comme un cosaque ivrogne et gâteux. La Russie est une nation sérieuse. Nous devons agir en conséquence. »
 

Je ne résiste certainement pas au plaisir et à l’intérêt de citer un commentaire d’un lecteur du texte de Johnson, nommé Ishmael Zechariah, qui cite un extrait d’un document de la RAND Corporation datant de 1994, intitulé de façon très imagée « Attention au “complexe Hubris-Némésis ». Cette étude, rédigée par l’analyste David Ronfeldt, est destiné à la CIA, ce qui explique qu’un des mots, identifiant une personne ou une nation, ou on ne sait quoi, soit censuré. (Représentation dans ce texte par un trait sur un blanc, n’ayant pas de trait de gros marqueur noir sur mon clavier. Malgré l’emploi du singulier, cela pourrait très bien être “les USA” dont l’usage, selon une grammaire particulière et très “idéologisés” depuis 1865 et la fin de la Guerre de Sécession, est bien le singulier [non plus “The USA are...”, mais “The USA is...”].)
 

« Dans les années à venir, –––––––––– se retrouvera certainement dans de nouvelles crises internationales impliquant des nations ou des groupes qui ont des dirigeants puissants. Dans certains cas, ces dirigeants peuvent avoir un état d’esprit particulier et dangereux, résultant d'un “complexe Hubris-Némésis”. Ce complexe implique une combinaison d’Hubris (une prétention à une forme arrogante d’orgueil) et de Némésis (un désir vengeur d’affronter, de vaincre, d’humilier et de punir un adversaire, en particulier celui qui peut être accusé d’hubris). Cette combinaison suscite une dynamique étrange qui peut conduire à un comportement destructeur et à haut risque. Les tentatives de dissuasion, de contrainte ou de négociation avec un dirigeant qui a un complexe Hubris-Némésis peuvent être inefficaces, voire désastreusement contre-productives, si ces tentatives sont basées sur des concepts mieux adaptés à des dirigeants plus normaux. »
 

On dirait pour un peu que ce Ronfeldt avait tout deviné, mais peut-être pas dans le sens qu’il croyait. Plus encore que tel ou tel dirigeant, ma conviction est que ce “complexe Hubris-Némésis” affecte évidemment le Système lui-même, je veux dire en tant que tel, en tant qu’être si vous voulez. Par conséquente indirecte ses exécutants en sont affectés, qui ne s’aperçoivent de rien dans les vilenies et les actes monstrueux, l’illégalité provocatrice, l’incivilité et la néantisation, qu’ils ordonnent et qu’ils dirigent en son nom. Leur psychologie les y invitent, et leur “inculpabilité” et leur “indéfectibilité” si américanistes en font des moutons-prédateurs absolument obéissants, sans la moindre conscience de la dignité de soi-même et de l’indignité de leurs propres actes.

Dans ses rares instants de lucidité, “Joe-la-démence” se précipite évidemment sur ce “complexe Hubris-Némésis” comme sur sa dernière raison de vivre, sa bouée de sauvetage. Le problème est de savoir s’il enchaîne parfaitement les présupposés de cette affection psychologique. D’une façon je crois assez révélatrice, nombre d’articles décrivant la dernière intervention de Biden sur les relations russo-américanistes ont illustré leur texte de cette photo du président quittant le micro, marchant d’un pas qu’on croirait deviner assez las, un peu vouté comme l’on est accablé par soi-même, de porter à la fois Hubris et Némésis.

Il venait d’annoncer de sévères nouvelles sanctions contre la Russie pour des actes que personne n’a jamais démontrés, sinon CNN dans ses montages, et que même ses services de renseignement mettent en doute. En même temps que cette annonce, Biden a plaidé pour une “désescaladation” des relations avec la Russie, pour la recherche d’une voie d’entente stabilisatrice. Je me demande si, parfois, il ne confond pas, s’il ne prend pas toute sanctions nouvelles et saisonnières contre la Russie que décident ses services comme une main fraternellement tendue, – ajoutant d’ailleurs, pour confirmer son irrésistible volonté d’entente : « J’ai été clair avec le Président Poutine sur le fait que nous aurions pu aller plus loin, mais j’ai choisi de ne pas le faire... »

Je pense que Biden, avec tous ses défauts, ses faiblesses, ses moments d’absence, nous dit une certaine vérité lorsque je le décris comme “marchant d’un pas qu’on croirait deviner assez las, un peu vouté comme l’on est accablé par soi-même, de porter à la fois Hubris et Némésis”. L’homme est bien celui qui s’est trouvé dans l’obligation à la fois d’asséner une gifle en disant “je voudrais vraiment que nous nous entendions”, ajoutant comme à bout d’argument : “Après tout, cela aurait pu être un coup de poing, alors je vous en prie voyez le bon côté”.

« Le raisonnement qui sous-tend les sanctions est d'une superficialité choquante » observe Daniel McAdams, directeur de l’Institut Ron Paul pour la Paix et la Prospérité. « La Crimée, c’était il y a sept ans. Les services de renseignement américains eux-mêmes affirment qu'ils ne peuvent pas trouver de preuves des allégations selon lesquelles la Russie aurait mis à prix la tête des soldats américains en Afghanistan. Aucune preuve n'a été fournie pour étayer les affirmations concernant la violation de SolarWinds ou les affirmations selon lesquelles la Russie interviendrait dans l’élection de 2020. Tout cela n’est qu’une farce et, chose inquiétante, il semble qu’ils le savent et qu’ils s’en moquent. »

Cette obligation constante de la contradiction flagrante flottant dans un tourbillon de mensonges et de simulacres (« ils le savent et ils s’en moquent »), outre qu’il y a le fait péremptoire et bien pratique qu’il est d’une psychologie américaniste (une pathologie, rien de moins), est la marque de l’homme contraint par le Système à assumer le poids de certaines décisions à caractère agressif tout en affirmant vouloir le contraire ; et cet air “assez las, un peu vouté...” témoigne de la mesure du poids et de la grossièreté de cette contradiction.

Je crois finalement, dans mon aimable bienveillance, que Biden est “contraint par le Système”, contraint à la bêtise et à l’aveugle surpuissance, contraint à ce « niveau d’incompétence tel qu’aucune explication ne peut en rendre compte » (McAdams), contraint au risque constant de l’absurde ou du ridicule, ou de l’entraînement vers des événements terribles, contraint à des annonces menaçantes qu’il n’a pas vraiment voulues, ponctuées d’un recul précipité qui est un objet de moquerie sinon de mépris.

Il est difficile de porter un jugement mesuré et assuré sur un tel désordre des hommes et des circonstances, cette désintégration des équilibres, cette cacophonie des harmonies trompeuses et insinuantes, et qui vous envoutent comme autant de drogues. Il y a longtemps que les Russes ont identifié Hubris et Némésis, et conclu qu’il est bien difficile de tenir une ligne de patience sans paraître céder à la complaisance, sinon à la couardise. Nous sommes aujourd’hui en une situation extrême où certains commentateurs, y compris au sein de l’UE selon ce qui m’est venu à l’oreille, par des voies indiscrètes mais dignes de confiance, se demandent avec angoisse si les Russes, après avoir si souvent affirmé qu’ils allaient finir par se fâcher, n’allaient pas finalement finir par se fâcher. Eux aussi sont épuisés de devoir assumer une partie de la charge d’Hubris et de Némésis en ne réagissant pas comme leur commande une saine politique, pour ne pas courir le risque suprême du conflit d’où personne ne sortirait autrement que comme des souvenirs calcinés et informes.

Je suis de plus en plus convaincu qu’il existe des facteurs extérieurs, ces “forces mystérieuses d’en-dehors de nous” dont il m’arrive de parler, qui sont en action. Il faut cela, pour charger toute une catégorie d’êtres à la fois d’Hubris et de Némésis, et il suffit bien assez de cela pour les manipuler comme des marionnettes. Il est vrai que j’en arrive à penser que cette étrange secte américaniste qui trône à “D.C.-la-folle”, qui s’est donnée comme Grand Sachem un vieillard fourbu de démences diverses, est peuplée de montreurs de marionnettes endiablés et frénétiques, qui sont eux-mêmes les marionnettes des diables nommés Hubris et Némésis.

Ainsi Biden me démontre-t-il mon audace réductrice, en ayant cru par moment que la désintégration interne suffirait à avoir raison, à son rythme, de la Grande République irrémédiablement dévorée par son virus nommé Hybris-Némésis. Il leur faut tout, la catastrophe complète, en-dedans soi, et soi-même en-dehors de soi, dans des contrées nommées Ukraine pour l’instant, où un acteur fou-du-roi (Zelenski) tient le roi-fou par la barbichette de la corruption.

Décidément, il est impossible d’y échapper : Grande Crise peut-être, ou GCES comme on l’a nommée dans ces dignes colonnes, mais GCES-bouffe jusqu’au bout. Jamais, au très-grand jamais la tragédie n’a suivi avec autant de perfection la “feuille de route” que les divinités lui ont assignée : l’homo-sapiens doit accomplir sa chute en montrant exactement pourquoi cette chute est justifiée, et mieux encore, assez vivement pour que lui-même finisse enfin par reconnaître que cette chute est vraiment justifiée, sinon absolument nécessaire.

Il faut savoir finir, disent aux hommes les dieux.