John Bolton et ses 750 amendements : l’ONU comme “courroie de transmission” de la politique US

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John Bolton et ses 750 amendements : l’ONU comme “courroie de transmission” de la politique US


26 août 2005 — Bolton nous fait la surprise de la rentrée, — mais sans surprise, en vérité. Seuls seront surpris ceux qui croient aux fables de l’apaisement des choses, au virage vers le “réalisme” ; seuls seront déçus ceux qui croyaient que la nomination de Bolton était une élimination en douceur, une mise à l’écart, etc. Non non, Bolton est là, et un peu là.

Il arrive à l’ONU avec un projet de réformiste, — réformiste radical, cela va sans dire. Après le Washington Post, The Independent de ce matin nous en fournit le détail.

Place aux nouvelles :


« America's controversial new ambassador to the United Nations is seeking to shred an agreement on strengthening the world body and fighting poverty intended to be the highlight of a 60th anniversary summit next month. In the extraordinary intervention, John Bolton has sought to roll back proposed UN commitments on aid to developing countries, combating global warming and nuclear disarmament.

» Mr Bolton has demanded no fewer than 750 amendments to the blueprint restating the ideals of the international body, which was originally drafted by the UN secretary general, Kofi Annan.

» The amendments are spelt out in a 32-page US version, first reported by the Washington Post and acquired yesterday by The Independent. The document is littered with deletions and exclusions. Most strikingly, the changes eliminate all specific reference to the so-called Millennium Development Goals, accepted by all countries at the last major UN summit in 2000, including the United States.

» The Americans are also seeking virtually to remove all references to the Kyoto treaty and the battle against global warming. They are striking out mention of the disputed International Criminal Court and drawing a red line through any suggestion that the nuclear powers should dismantle their arsenals. Instead, the US is seeking to add emphasis to passages on fighting terrorism and spreading democracy. »


Le rouge est mis. Bolton est à l’ONU et ça va valser. Il veut simplement, avec le soutien unanime des GW, Cheney & compagnie, refondre l’ONU en une entité dont l’intérêt pour Washington sera quelle transmettra dans le monde entier les conceptions américanistes de Washington ; l’ONU comme “courroie de transmission” de la politique étrangère des Etats-Unis, comme l’était une vulgaire CGT du temps de la toute-puissance du PCF en France.

Sobrement, The Independent nous instruit là-dessus, sur nos illusions, nos belles constructions théoriques, nos arrangements minutieux et notre touchante croyance en la raison : «  Very quickly, Mr Bolton has given the answer to anyone still wondering whether his long and difficult journey to New York — President George Bush confirmed him to the post after the US Senate was unable to — would render him coy or cautious. Far from that, he seems intent on taking the UN by the collar and plainly saying to its face what America expects — and does not expect — from it. »

Une fois de plus est mise en évidence la psychologie américaniste telle qu’elle s’est développée depuis le 11 septembre, sans surprise ni véritable difficulté. D’un autre côté, une fois de plus est mise en évidence la profonde naïveté des théoriciens des relations internationales, persuadés que la “force des choses” finit par transformer les conceptions d’une équipe arrivée au pouvoir pour transformer le monde. La “force des choses” existe bel et bien, mais elle n’est plus accessible à des esprits ouverts, simplement parce que les esprits se sont fermés.

L’administration GW va continuer à surenchérir, par l’intermédiaire des divers Boltons disponibles. A côté de cela, elle essuie défaite sur défaite, en Irak et ailleurs, — le plus intéressant de ces “ailleurs” étant évidemment la scène intérieure (USA) où les choses évoluent vite, à la vitesse des sondages d’impopularité du président américain et de sa politique. C’est de cette façon que la “force des choses” s’impose, part la contrainte des événements qu’elle suscite.

L’administration GW ne s’assagira pas, elle ne deviendra pas “réaliste”, elle n’abandonnera aucun de ses projets de déstabilisation du monde. Par contre, elle ne cesse de s’affaiblir et ne cessera plus de s’affaiblir, ouvrant la voie à des événements qu’il est aujourd’hui impossible de prévoir. Tout cela ne se passera pas à l’ONU où le maximalisme grotesque de Bolton va provoquer des affrontements divers et une paralysie de l’institution.