Kamal Amari

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Kamal Amari

Il pensait à son lendemain.

Un vent chaud chargé s’engouffrait dans sa chemise et asséchait sa gorge.

Son pas était léger.

Il allait à la rencontre du changement, de la variation qui le dévierait des murs invisibles poussés devant lui.

L’été s’avance.

Aucune intégrale ne lui résistait plus, nul calcul différentiel ne le rebutait, il avait travaillé dur pour obtenir une licence en sciences physiques.

Mais dans le référentiel de son présent, point de solution à l’équation de son avenir.

Il exposait son impossible avec des amis d’infortune, décollant leurs espadrilles d’un bitume qui fume à l’heure de la sieste et s’égosillant en refus de se résigner.

Le mouvement.

Il était porté par le mouvement de la vague inespérée qui a chassé la peur des esprits et ouvert une voie à l’espoir.

Il marchait donc le 29 mai et pas seul dans la ville de Safi. Il venait juste de trouver un travail de gardiennage au port.

Cueilli et rossé copieusement par les forces de l’ordre, il a été retrouvé agonisant jeté à plus de 20 kilomètres du lieu de son enlèvement.

Kamal Amari, jeune marocain de trente ans, ancien diplômé chômeur a succombé à ses traumatismes le jeudi 2 juin.

Kamal ne connaîtra pas cette saison commencée à sa maturité.

Il ne verra pas la moisson de la révolte qui a germé dans le cœur de chaque jeune Marocain, de chaque Arabe, de chaque Espagnol et Grec qui campent, tempêtent et disent non au vol de leurs vies, dérobées froidement par le déroulement d’un algorithme automate qui gère la génération d’un profit usurpé. Des calculateurs nichés au sein de banques londoniennes et new-yorkaises leur soustraient toute possibilité de revenu.

Kamal faisait usage de sa volition. Que ne soient pas toujours les mêmes en représentation qui disent de quoi notre langueur est faite et pour quel objet nous inclinons.

Badia Benjelloun