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17 juillet 2004 — La sénatrice Hillary Clinton sera l’une des vedettes de la Convention démocrate, à la fin du mois. La décision a été prise par l’équipe Kerry, alors que cette intervention n’était pas initialement prévue et que Kerry avait pris bien soin de tenir ses distances de Hillary, classée trop “à gauche”.
« Presidential candidate John Kerry has bowed to pressure from Hillary Clinton's supporters and invited her to address the Democratic party convention in Boston at the end of the month, it was reported yesterday.
» Senator Clinton had been omitted from the list of speakers issued by the Kerry campaign, provoking uproar from loyalists and a quick U-turn by the candidate. Senator Kerry phoned her in person on Thursday to ask her to make a primetime speech introducing her husband, Bill Clinton, on July 26, the convention's opening night. A Kerry spokeswoman, Stephanie Cutter, yesterday said the campaign was “thrilled” that Mrs Clinton had accepted the invitation.
» It remained unclear why Mrs Clinton, who is extraordinarily popular among liberal activists, was excluded in the first place. Some explained it by the campaign's fear that she might overshadow Mr Kerry and his running mate, John Edwards, whom she is likely to confront in the 2008 nomination race if Mr Kerry is defeated in November. Others suggested that her initial exclusion could have been a reflection of her polarising reputation, and fears that her mere appearance would galvanise Mr Kerry's Republican opponents. »
La décision de Kerry d’en appeler à Hillary Clinton est une indication politique intéressante. Qu’elle ait accepté en est une autre. Les deux indications devraient aller dans le sens d’une interprétation selon laquelle le camp Kerry devient de plus en plus nerveux dans une situation où la dégringolade de GW Bush dans les sondages ne se concrétise pas, pour lui, en une montée significative de Kerry. On peut expliciter cette interprétation de la façon suivante :
• Le camp Kerry commence à admettre que, pour marquer des points de façon significative, il serait peut-être nécessaire que le candidat démocrate s’affirme plus nettement, c’est-à-dire plus nettement “à gauche” que GW Bush. Le constat serait que le rassemblement de soutien de Kerry par des électeurs d’abord préoccupés de battre Bush (les ABBA, ou “Anything But Bush Again”) n’est pas du tout une garantie suffisante de victoire. L’appel à Hillary Clinton, c’est une caution prise avec la gauche du parti. Le problème est que Hillary, si elle est à gauche dans les domaines intérieur, social, éthique, etc, ne l’est pas du tout en politique extérieure, notamment sur la crise irakienne, sur les relations avec Israël ; or, la question reste entièrement ouverte de savoir si ce que l’électorat reproche à Kerry n’est pas son suivisme de GW dans le cas irakien, moyennant quoi le soutien d’Hillary devient illusoire.
• L’acceptation rapide et sans problème d’Hillary Clinton est plutôt peu rassurante pour Kerry que le contraire. Hillary est une fine mouche, qui joue 2008 (candidate démocrate à la présidence en 2008). Si elle accepte de soutenir Kerry, n’est-ce pas parce qu’elle le juge battu d’avance, qu’elle renforce sa stature nationale en le soutenant, qu’elle se met en position, plus que jamais, pour une candidature au terme du deuxième mandat GW Bush ?
Spéculations politiques, tout cela. Il reste une autre hypothèse à évoquer, qui est la nôtre depuis l’origine de cette campagne : la position naturelle de Kerry, celle où il a de bonnes chances de l’emporter, c’est une position radicale d’opposition. Nous avancions en mars dernier l’hypothèse que Kerry l’avait compris ou le comprendrait vite. Il est vite apparu que cela serait difficilement le cas. Mais Kerry est tout de même obligé d’évoluer vers la gauche, vers une position d’opposition un peu plus affirmée. Quant à dire que c’est suffisant, on ne s’y risquera pas une seconde. “Trop peu, trop tard” serait plutôt la caractéristique de cette manœuvre de Kerry pour faire entrer Hillary Clinton. Moyennant quoi, ce serait plutôt Hillary qui aurait mis, en passant, John Kerry dans son jeu pour avancer ses pions vers 2008.