La Baltique hypersonique

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La Baltique hypersonique

• D’abord des réflexions d’un amiral russe qui commanda le Flotte de la Baltique sur les ambitions OTAN-Europe sur cette mer, sans y inclure les USA. • Effectivement, partout éclatent les changements extraordinaires en cours à Washington, avec une hostilité grandissante pour Zelenski et les amis-UE de Zelenski. • Jusqu’à laisser penser que certains dans l’administration Trump jugeraient Poutine bien plus fréquentable que Mister Z. et van der Leyen. • Le contact de Washington avec la réalité, avec Trump et sa bande, fera des vagues considérables.

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On commencera par rapporter les propos de l’amiral Vladimir Valuez, ancien commandant de la flotte russe de la Baltique. Nous ignorons si Valuez est encore en service actif mais le seul fait qu’il parle de la situation stratégique d’une zone qu’il a commandée (et ne commande plus) semble indiquer qu’il s’agit d’un message direct de la Russie, par l’intermédiaire de ses militaires, à l’intention de l’Occident. La question qu’il est intéressant de se poser est de savoir à qui, en Occident, ce message est adressé.

La façon dont ce texte repris du site général ‘tsargrad.tv’ est composé est remarquable. Si le titre (« Russia's hypersonic missiles against US aircraft carriers: Shall we play? ») semble introduire un texte tout entier centré sur la vulnérabilité des porte-avions US du fait des missiles hypersoniques, il s’avère que ce n’est pas le cas.

La partie concernant les porte-avions US, qui est d’ailleurs dirigée contre les porte-avions en général, vient en fin de texte. Justement, le fait que Valuez attribue 15 porte-avions à l’US Navy introduit une certaine confusion, l’US Navy n’ayant actuellement que 11 porte-avions d’attaque (ceux de 90 000 à 100 000 tonnes embarquant près d’une centaine d’aéronefs de tous types). Décompte-t-il les navires d’appui aéronaval, de dimensions inférieures des deux-tiers aux “grands” porte-avions d’attaque, ou inclue-t-il les autres porte-avions des pays de l’OTAN ? Voici le passage, rapporté en conclusion dans le texte  à partir d’une autre intervention :

« Avant d'être affecté en Baltique, j'étais responsable d'une unité anti-aérienne de porte-avions. Et nous nous entraînions à contrer les groupes d'attaque de porte-avions. Même à l'époque, la théorie était que ce type de groupe n'était pas omnipotent. Si nous prenons la situation actuelle, nous avons des missiles d'une vitesse de Mach 10 ou plus, – aucune défense n'est capable de l'abattre ! Auparavant, il fallait 30 à 40 missiles pour détruire un porte-avions, maintenant 4 à 5 suffiront. Les Américains ont toujours eu 15 porte-avions. S'ils déploient un tel navire contre la Russie, malheur à celui qui atteindra la ligne de frappe. »

Le reste du texte concerne directement la Mer Baltique où la marine russe revendique une maîtrise absolue. Il s’adresse d’une part à l’OTAN, – sans aucune référence aux USA, – et d’autre part aux pays européen qui bordent cette mer. L’on comprend finalement que les déclarations de l’amiral Valuez s’adresse essentiellement à eux :

« Les pays occidentaux ne peuvent toujours pas abandonner le rêve d’évincer la Russie de la région de la Baltique. La Finlande, les pays scandinaves, la Lettonie et l’Estonie sont très préoccupés par la région de Kaliningrad, par laquelle la Russie contrôle l’accès à la mer Baltique. N’ayant aucune possibilité réelle de changer la situation, les pays de l’OTAN diffusent de fausses informations sur des dizaines de sous-marins dans la Baltique, ce qui, selon eux, peut nier la présence russe dans la région. Cependant, comme le note Valuev, de telles déclarations sont loin de la réalité et ne sont rien d’autre que des fantasmes.

» “Nos services de renseignement sont capables de tout calculer à un, jusqu’à chaque sous-marin, et pas seulement dans la mer Baltique, mais aussi dans toute la zone maritime. 40 sous-marins, c’est une sorte de blague. Je peux vous dire en toute objectivité qu'il n'y a pas 40 sous-marins. Il y a des sous-marins polonais, pour le dire gentiment, sans importance, il y en a des allemands - ils en construisent de bons, mais ils sont principalement situés dans l'Atlantique. Il n'y a pas 40 sous-marins de l'OTAN dans la mer Baltique. Je ne les ai pas comptés, mais [je dirais qu’il y en a] cinq ou six”, a déclaré l'amiral.

» Le potentiel de défense de la Russie exclut complètement toute tentative hypothétique de "chasser" le pays des eaux adjacentes, estime Valuev. Il y a quelques décennies, les forces armées russes étaient capables de contrer efficacement les porte-avions américains, qui étaient la principale force de frappe de l'OTAN en mer. Aujourd'hui, les capacités de la Russie ont été considérablement renforcées par l'introduction de systèmes de missiles hypersoniques. L'amiral est convaincu que tout porte-avions qui représenterait une menace pour la Fédération de Russie connaîtrait un sort peu enviable. »

Qui est l’ennemi ?

Il s’agit certainement d’un exemple anecdotique de l’évolution de la dialectique militaire russe, mais justement son peu d’importance médiatique nous permet de constater combien les changements affectant cette dialectique ont pénétré très profondément et très rapidement au niveau des échelons opérationnels ;

Résultat ? L’ennemi n’est plus tant les USA que l’OTAN dans son regroupement des pays européens les plus hostiles, essentiellement le Royaume-Unis et les pays nordiques, autour de la direction hyper-belliciste de l’UE. (On met à part la France, insaisissable à cause de l’inexistence de son gouvernement et les aléas de la folie de Macron, – mais actuellement en période hyper-belliciste car cela permet à l’étrange personnage de faire l’important.)

La coupure entre les États-Unis et l’Europe effectuée par le courant qui a porté Trump au pouvoir, – plus que par Trump lui-même, – est un fait qui pénètre les esprits et les analyses à une vitesse prodigieuse. Il pourrait sembler que cette dynamique est prête à influencer les forces militaires russes elles-mêmes, elles qui constituent le facteur militaire le plus puissant et le plus déterminé dans la partie en cours. “En face” (?), les militaires US se trouvent en pleine restructuration idéologique, conduite par un secrétaire à la défense extrêmement actif et qui est évidemment assez proche d’une évolution semblable vis-à-vis du désordre européen et de la Russie.

... Jusqu’à la découverte des BRICS par les USA

On voit également la diffusion extrêmement rapide, notamment parmi les membres de l’équipe Trump, de cette vision que nous pourrions, – simplement en référence à ce à quoi ils s’opposent, – désigner comme néo-traditionnalistes (néo-tradi’, sans référence religieuse spécifique). Contrairement à l’analyse antitrumpiste généralement répandue dans la presseSystème acquise au globalisme, dans le bloc-BAO en général, aux USA et en Europe, l’administration Trump est aux antipodes de cette situation de “chaos à Washington” à laquelle on aime tant s’attarder. Le gouvernement Trump est un puissant îlot d’unité conceptuelle, comme on le voit dans des déclarations et des décisions faites par ses membres, quasiment de façon autonome, autour de la dynamique qui les pousse en les rassemblant.

• Une intervention du Secrétaire au Commerce Howard Lutnick sur FoxNews marque combien ce domaine d’habitude très spécialisé au niveau de son ministère est immédiatement passé au niveau politique concernant les situations crisiques les plus pressantes.

« Dans une interview accordée à Fox News Sunday, Lutnick a souligné que le président américain avait clairement indiqué qu’il “voulait juste faire la paix”. Cependant, il a déclaré que Zelenski n’était pas venu pour cela et avait fait des demandes “ridicules” à Trump et Vance.

» “Zelenski avait besoin de l’entendre directement de la bouche des bailleurs de fonds des États-Unis d’Amérique : nous ne vous donnerons pas d’argent à moins que vous ne soyez ici pour la paix”, a souligné Lutnick.

» Il a ajouté que Trump avait essayé de raisonner Zelenski, soulignant que le dirigeant ukrainien ne pouvait pas dire que “Poutine est un terroriste et ensuite appeler le gars et essayer de faire la paix avec lui”. »

• On notera un passage significatif d’un programme d’Alexander Mercouris, hier 2 mars (voir 12’-12’ dans la vidéo). Mercouris nous expliquait qu’il n’y avait actuellement aucune négociation structurée entre Russes et Américains, mais simplement des contacts informationnels à des niveaux de responsabilité politique intermédiaire. Il parlait sur la foi d’une source émanant du Parlement russe, qui avait eu connaissance de ces contacts entre officiels des deux pays.

Après avoir expliqué que la principale préoccupation du gouvernement US n’était pas l’Ukraine mais la situation présente et à venir du dollar, Mercouris donnait cette précision qui permet d’avoir une idée de l’ampleur des révisions de politique internationale générale que les USA sont en train d’envisager... Selon la source de Mercouris, éventuellement jusqu’à des futurs contacts de participation dans les BRICS.

« ... Les USA ont de plus en plus préoccupés et intéressés par le développement des BRICS, par les arrangements financiers que les BRICS pourraient être en train d ‘étudier, l’éventuelle mise en place d’une monnaie alternative au dollar... Les USA voudraient savoir de la bouche des Russes quels pourraient être ces mécanismes... et apparemment les Américains seraient intéressés de savoir dans quelle mesure les États-Unis pourraient avoir, sur certains points, à certains moments, des voies de participation à ces mécanismes... »

• Il y a enfin pour notre propos, cette longue et significative intervention de Tulsi Gabbard, en tant que directrice du renseignement (DNI), et qui semble disposer d’une complète liberté d’expression dans ses médias favoris (notamment et précisément, FoxNews bien entendu). Dans une interview sur ce réseau, diffusée et reprise hier, elle commente la situation de l’Ukraine, de l’Europe et des relations entre les USA et l’Europe après l’incident Trump-Zelenski de vendredi dernier.

« “Beaucoup de ces pays européens, et Zelenski lui-même, qui prétendent défendre et se battre pour la cause de la liberté et de la démocratie”, agissent en réalité à l’encontre de ces valeurs, a déclaré Gabbard.

» “Lorsque nous regardons ce qui se passe en réalité dans ces pays, ainsi qu’avec le gouvernement de Zelenski en Ukraine, c’est exactement le contraire”, a-t-elle ajouté. Gabbard a souligné l’absence d’élections en Ukraine, la criminalisation des partis d’opposition par Kiev, la fermeture des églises orthodoxes et le contrôle total du gouvernement sur les médias.

» “Cela soulève la question. Il est clair qu’ils se dressent contre Poutine. Mais pour quoi se battent-ils réellement et sont-ils en phase avec les valeurs qu’ils prétendent défendre en accord avec [les États-Unis], qui sont les valeurs de liberté, de paix et de véritable sécurité”, interroge Gabbard.

» La DNI a également critiqué les partenaires européens de Washington, rappelant le discours de Vance à la Conférence de Munich sur la sécurité, où il a accusé les pays européens de mettre en œuvre des politiques qui “sapent la démocratie” et montrent qu’ils “ne croient pas réellement à la voix du peuple”. »

» “Nous le voyons au Royaume-Uni, nous le voyons en Allemagne, nous l’avons vu avec l’annulation des élections en Roumanie”, a déclaré Gabbard, suggérant que cela montre une “énorme divergence” entre les valeurs américaines et celles des nations européennes qui ont soutenu Zelenski. »

Des néo-tradi’ hypersoniques

Le point le plus remarquable, le plus significatif, et le plus gros d’effets impressionnants et immédiats, est bien la rapidité de diffusion et d’assimilation de cette nouvelle position conceptuelle des USA. Elle ne peut être en aucun cas réduite au seul Trump, qui est d’ailleurs loin d’être celui qui comprend le mieux le phénomène en cours, si seulement il le réalise. Parmi les autres, JD Vance le comprend mieux, bien entendu, mais aussi Tulsi Gabbard, – ce pour quoi nous nous attardons à elle, qui parle d’un point de vue  purement et intensément politique sinon métapolitique alors que son rôle devrait être d’abord purement technique. Gabbard s’est aussitôt saisie de sa position de directrice du renseignement pour se lancer dans des déclarations publiques qui vont dans un sens politique inhabituel pour une telle fonction. Manifestement, elle a quartier libre et carte blanche.

Un bon exemple, lorsqu’elle dit :

« Cela soulève la question. Il est clair qu’ils se dressent contre Poutine. Mais pour quoi se battent-ils réellement et sont-ils en phase avec les valeurs qu’ils prétendent défendre en accord avec [les États-Unis], qui sont les valeurs de liberté, de paix et de véritable sécurité... »

On comprend aussitôt que cette logique critique conduit rapidement à proposer, en inversant logiquement le propos, l’idée que Poutine, qui ne cesse de parler de valeurs traditionnelles, est beaucoup plus proche de l’actuel pouvoir aux USA, que ne le sera jamais Zelenski ; et que Zelenski, avec ses amis progressistes et corrompus de l’UE et du parti démocrate US, est complètement un élément globaliste acquis au prix fort, en $milliards, qui ne peut être qu’un adversaire.

On ne doit d’ailleurs pas s’étonner de la chose qui progresse souterrainement depuis longtemps (voir le « Is Putin One of US ? » de Buchanan), mais plutôt s’étonner, – ou peut-être s’enchanter, – de l’extrême rapidité avec laquelle la conception a envahi toute cette direction pour être immédiatement transposée aux affaires en cours et par conséquent imposée au débat public malgré l’hyper-censure globaliste.


Mis en ligne le 3 mars 2025 à 20H15