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96615 mars 2010 — Il est vrai que le stupéfiant contraste entre ce géant américaniste, gonflé de son importance, de son hubris, de sa prétention quasi-suprahistorique, de ces centaines de $milliards déversés sur le Pentagone chaque année dans une sorte de diarrhée cosmique ou de colique gargantuesque, – et cette espèce d’énorme chose flasque souffletée avec mépris par l’insupportable et paranoïaque Netanyahou, usurpateur à la tête d’un gouvernement en situation de viol constant des lois internationales, – eh bien, il est vrai que cela laisse à penser. Pensons donc, Folleville… (Avec l’aide d’un extrait du dernier numéro de dde.crisis du 10 mars 2010.)
La lassitude de madame la secrétaire d’Etat (Hillary) parlant de ce pays (Israël) si ami, si proche, si intime, qui soudain annonçait cette mesure des implantations illégales comme l’on mesure délibérément et soigneusement un crachat qu’on va vous lancer au visage, voilà qui suggérait moins un tournant d’une politique extérieure qui semble aujourd’hui suivre une évolution en lacet mais fort rapide sur la descente d’un abîme pentu, que son épuisement et sa complète stérilisation. Il s’agit là d’une démonstration in vivo de l’imposture qu’est devenue la politique extérieure US, cette apparence de force derrière des évidences sans nombre de l’imposture, cette fois l’évidence étant clairement en avant de l’apparence de force, comme une “insulte” publique peut l’être. Grâce en soit rendu au paranoïaque Netanyahou qui nous a fourni une démonstration imparable de cette situation.
Cela nous conduit à un enchaînement sur la légitimité de l’actuelle politique extérieure US par rapport aux exigences des rapports contractuels régissant les USA, – dito, les rapports entre le “centre” et les composants souverains que sont les Etats de l’Union. Il apparaît de plus en plus évident que la politique des USA vis-à-vis d’Israël est une imposture, une “trahison” des intérêts US, et, d’une façon plus générale dans le cadre contractuel qu’on évoque, une forfaiture. Ce n’est qu’un cas exemplaire, sans doute le plus exemplaire, de toute la politique extérieure des USA, c’est-à-dire du système de l’américanisme. La “faiblesse” de la politique extérieure qui fait que les USA acceptent l’“insulte” de Netanyahou sans faire autrement que la mentionner en tant que telle répond à deux facteurs dont l’interconnexion nous paraît évidente.
@PAYANT • D’une part, cette faiblesse correspond sans aucun doute à l’affaiblissement accéléré des USA eux-mêmes, à la perception de l’effondrement de leur puissance depuis la guerre en Irak et ce qui a suivi, et la crise du 15 septembre 2008 et ce qui a suivi. Mais cette faiblesse reflète, dans ce cas, l’illégitimité des politiques, par rapport aux intérêts des USA, des politiques qui ont mené à ces deux catastrophes.
• De cette façon, on peut observer désormais de visu que la politique de sécurité nationale US elle-même, jusqu’alors protégée de toute incursion du public par le statut d’une soi-disant “union nationale” (bipartisan issues), constitue une imposture permanente par rapport aux intérêts réels des USA, donc la forfaiture dont nous parlons. Cela implique une illégitimité fondamentale, que ne rattrape guère la légitimité apparente que lui donne la force, et qui apparaît complètement à nue lorsque cette force tend à se réduire massivement, et cette légitimité apparente avec elle. C’est alors que les “amis” peuvent vous ‘“insulter” en toute impunité.
Or, c’est bien dans ce cadre qu’il faudrait placer, d’une façon appropriée, la question de la politique extérieure US par rapport aux intérêts du peuple américain, et ceux des Etats constitutifs de l’Union. C’est ce que suggérait le discours de Ron Paul à la convention du CPAC, notamment dans la façon dont il a été accueilli par les “antiguerres” comme Justin Raimondo. Ce discours constituait une attaque per se contre la politique extérieure de Washington mais il impliquait, en seconde analyse, d’une façon indirecte mais puissante, en tenant compte du sens habituel de la pensée de Ron Paul, une mise en cause de la légalité de cette politique, – c’est-à-dire la question de la forfaiture.
Cette situation, dans le cadre actuel de déclin et d’effondrement de la puissance US, peut conduire essentiellement à des tensions internes, même à l’occasion de tensions externes liées à cette politique. Au-delà, elle pose d’une façon dramatique et pressante la question de la légitimité de cette politique extérieure et la façon dont son illégitimité (en réalité) peut s’insérer dans la crise intérieure actuelle des USA. Il s’agit de la démarche problématique essentielle, pour les USA, de la reconnexion de la politique intérieure et de la politique extérieure dite de sécurité nationale, pour arriver à la confrontation entre les deux selon les relations contractuelles entre les composants de l’Union (les Etats) et le “centre” fédéral, devenu le centre du système expansionniste et belliciste de l’américanisme.
C’est ce point de vue, notamment, que nous abordons dans notre dernier numéro de dde.crisis du 10 mars 2010, notamment à partir du discours de Ron Paul de la convention du CPAC, du 20 février dernier. Ci-dessous, nous proposons cet extrait de la rubrique dedefensa de ce numéro, qui aborde cet aspect du problème : «A ce point de la crise, l’enjeu est dans la connexion entre la situations intérieure et la politique extérieure… La politique extérieure va devenir la pièce centrale du procès du système que constitue la crise en cours.»
«Le discours de Ron Paul nous sert de prétexte, ou plutôt de clef, pour aborder le facteur essentiel de la crise des USA, qui est la déconnexion existante entre situation intérieure et politique extérieure. On a vu le lien évident, presque comptable, au niveau du déficit, entre ces deux situations avec les conséquences sur l’activation de la crise. Dans le cadre du rapport contractuel qu’on a décrit comme étant le fondement de la situation politique américaine, ce lien doit être décrit, pour être bien compris, par des mots tels que “trahison”, “forfaiture”, etc. Ce qui est fait, du point de vue budgétaire, comptable, puis dans ses jugements étendus, du point de vue politique et stratégique, en politique extérieure, “au nom” du peuple américain (“We, the people”, qui sont les premiers mots de la Constitution), constitue une forfaiture qui mine le système d’une façon irrémédiable.
»D’autre part, ce système ayant atteint et dépassé son point de compétence pour entrer dans une situation où tous ses efforts habituels d’affirmation de puissance produisent des effets négatifs, – aussi bien du point de vue opérationnel comme dans ses guerres extérieures que du point de vue de la gestion bureaucratique dont le cas du JSF est un exemple constant dans les esprits, – cette forfaiture devient un état permanent. A la notion politique de “coup d’Etat permanent” que nous avions employée pour décrire la politique de la bureaucratie du Complexe vis-à-vis du pouvoir (voir notre rubrique de defensa du 25 janvier 2010), correspond la notion de “forfaiture permanente” pour décrire la situation des rapports contractuels dans ce cas des rapports entre la situation intérieure et la politique extérieure du système. C’est cet aspect fondamental de la crise générale des USA que le discours de Ron Paul à la convention du CPAC a mis en lumière.
»Ce constat nous dit par conséquent qu’il est devenu impossible de considérer la crise générale des USA sans tenir compte impérativement de cette situation de “forfaiture permanente”. Les rapports contractuels qui caractérisent l’expérience américaine sont non seulement viciés d’un point de vue comptable (déficit et dette), ils sont également compromis d’une façon irrémédiable par l’illégalité absolue de la “forfaiture permanente” de la politique extérieure dans ce cadre contractuel. Il n’est pas assuré que Ron Paul ait pensé son discours dans des termes aussi définitifs mais, sans aucun doute, cette idée l’habite dans la mesure où sa critique de la politique extérieure porte sur la substance de cette politique, certes, mais également sur le principe qui est ainsi constamment violé par rapport au contrat originel, avec une politique extérieure qui ne peut plus être aujourd’hui qu’une forfaiture par rapport à la Constitution. […]
»En d’autres termes, il nous paraît évident que la crise intérieure des USA qui ne cesse de se développer et qui est passée à un échelon supérieur depuis l’élection de janvier dans le Massachusetts, – le procès de la politique intérieure du système elle-même, – est appelée à s’étendre à la politique extérieure... Non pas une crise intérieure à laquelle s’ajouterait une crise de la politique extérieure, mais la crise de la politique extérieure engendrée par et englobée dans la crise intérieure. Il s’agit du rétablissement du lien fondamental que le système s’est employé à rompre en permanence depuis que fut établi (en 1947) le soi-disant “Etat de sécurité nationale” et que la “politique de sécurité nationale” (la politique extérieure) fut placée off limit de tout débat public et populaire sous l’argument qu’elle représentait une nécessité intangible pour la défense de la sécurité de tous.
»C’est dans ce cas que peut surgir l’affrontement décisif dont les protagonistes sont “We, the people” d’une part, “le système de l’américanisme” d’autre part. On notera évidemment l’analogie avec l’URSS, qui succomba, elle aussi, à partir des charges insupportables que la politique extérieure de type prétendument impérial fit peser sur le pays. Mais le cas soviétique était beaucoup moins évident, beaucoup moins brutal potentiellement, à cause de l’arbitraire et de l’illégalité du régime communiste, c’est-à-dire de son absence de caractère contractuel. Dans le cas US, on comprend bien entendu que cet affrontement ne porte pas seulement sur la nature, les objectifs, les ambitions de la politique extérieure mais bien sur l’effet totalement destructeur que cette politique devenue forfaiture permanente a sur l’arrangement contractuel qui est le pivot de l’existence, de la substance des USA. Au contraire de l’URSS, les USA sont une construction légale bâtie sur la Loi comme référence suprême, – quoiqu’on pense de cette référence, et l’on peut en penser beaucoup. Cette attaque permanente de la Loi suprême, cette forfaiture permanente contre elle, est encore plus grave que la nature et les actes de la politique extérieure. Elle constitue, à la lumière de la crise qui met en évidence cette situation intenable, le pivot central, le nœud gordien de la crise.
»L’apport libertarien de Ron Paul dans cette occurrence est décisif, et il l’est principalement, bien sûr, à cause de la stature nationale qu’a acquise Ron Paul. Mais l’on comprend bien que ce n’est pas une affaire de programme, ni même, au fond, de modification dans le sens de la modération de la politique extérieure. Lorsque Ron Paul critique les guerres extérieures, l’interventionnisme, voire les manipulations du dollar, il ne dénonce pas seulement une politique pour éventuellement en proposer une autre, il met en évidence la rupture totale entre “We, the people” et le système avec la politique de l’“idéal de puissance” que son fonctionnement mécanique induit. Il met en évidence, volens nolens, l’état de forfaiture permanente qui caractérise l’exercice du pouvoir aujourd’hui aux USA. Il éclaire d’un jour tragique l’état insupportable de violation et de destruction du contrat originel sur lequel furent bâtis les Etats-Unis d’Amérique, selon la volonté expresse de ceux-là même qui détenaient déjà le pouvoir.»
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