La France confirme sa méfiance hostile au BMDE

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Après l’intervention tonitruante de Sarkozy contre le réseau anti-missile US en Europe (BMDE), le 14 novembre à Nice, la politique française dans ce domaine est confirmée par une intervention du ministre français de la défense devant le Parlement Européen, le 1er décembre. (Même s'il parle au nom de la présidence française de l'UE, il est évident qu'il s'agit de la politique française en l'espèce, – mais dont on pourrait dire que la France en fait bénéficier l'Europe, par générosité sans doute.)

Il y avait eu un certain flottement, le lendemain de ce sommet UE-Russie de Nice, lorsque Sarkozy, alors à Washington pour le sommet du G20, avait tempéré ses propos de la veille, – selon une dépêche AP du 16 novembre. (La même dépêche faisait état d’une réaction du Premier ministre polonais, implicitement très critique de la position frnçaise.)

«[A] l'issue du G-20, le président français a modéré ses propos [du 14 novembre], estimant que le dispositif [BMDE] pourrait constituer un “complément contre la menace de missiles venant d'ailleurs, d'Iran par exemple”. Le premier ministre polonais a estimé pour sa part que la question du déploiement en Pologne ne concernait que son pays et les Etats-Unis. “Sur la question du bouclier, je n'attends pas de commentaires ni d'actes de tiers parties” a estimé le premier polonais, Donald Tusk.»

Il semble que ces déclarations polonaises n’aient nullement découragé les Français, si l’on en juge d’après la déclaration de Morin. Defense News rapporte, le 2 décembre, l’essentiel de cette intervention.

«Speaking to members of the European Parliament here Dec. 1, Hervé Morin asked what funds Europe would have left for other things if it committed to the “huge cost” of such defenses.

»Morin raised other questions as well. “Who would hold the key” to their use? What threat would they tackle? “There are risks, yes, but to say that there is a threat today would need to be checked,” he said. He also said the decision on such defenses would need to be made in the context of relations with Russia.»

Morin apporte la touche technique du ministre de la défense contre le BMDE, après la prise de position politique de Sarko, le 14 novembre à Nice. Il ne rejette pas le projet, – ce n’est ni le propos ni son domaine de compétence, – mais lui trouve implicitement un nombre considérable de défauts qui, tous, pèsent d’un grand poids sur la situation stratégique de l’Europe et la sécurité paneuropéenne. L’intérêt des Français pour le BMDE est effectivement justifié par l'implication directe et massive de ce système dans l'équilibre de la sécurité pan-européenne, et le caractère bilatéral (Pologne-USA) de l'accord qui l'installe n’a guère de valeur face à cette réalité, – d'autant moins lorsqu'on sait les conditions de cet accord.

Ainsi se complète et se renforce la nouvelle orientation par Sarkozy lors du sommet de Nice, et son initiative, avec Medvedev, déclarée à cette occasion. (Cette initiative implique la mise en question du BMDE dans le cadre de la recherche d’une nouvelle architecture européenne de sécurité, avec une ou plusieurs proposition de conférence, éventuellement dans le cadre de l’OSCE, sur ce sujet.). Il faut remarquer qu’il y a une acceptation de facto grandissante, dans les milieux européens, de l’existence et de la validité de cette initiative. Un signe bureaucratique à cet égard est que le travail politique intérieur de la Commission européenne actuellement en cours, portant notamment sur les relations avec la Russie, intègre cette initiative et la désigne formellement comme “the Evian proposal”, référence à la proposition commune Sarkozy-Medvedev qui sortit du séminaire d'Evian le 8 octobre dernier.


Mis en ligne le 3 décembre 2008 à 13H44