Un commentaire est associé à cet article. Vous pouvez le consulter et réagir à votre tour.
650Nous revenons sur un petit texte expéditif, daté du 5 août, dans le magazine ‘Forbes’, dans une chronique du type “le bonnet d’âne de la semaine”, — pour faire vieille France, justement. Cette semaine-là, le lauréat est Paul Krugman, du New York Times, le commentateur qui passe son temps à dire du mal du président GW Bush et l’économiste qui se refuse à voir aucune des vertus évidentes de l’économie américaine.
Forbes prend pour cible une chronique de Krugman où celui-ci dit « compares the French lifestyle and health care system to America's, and decides for the French. But to come to this conclusion, he has to caricaturize America. » Honte sur lui. La description par Krugman, rapportée par Forbes, tient de la caricature de la caricature, si bien que cela doit correspondre à une certaine réalité… « In Krugman's America, people work like demons chasing the middle class dream. As a result, Americans achieve a higher standard of living, but at the cost of leisure and health. In France, people take vacations, eat well and live long. Krugman applauds the French for their smarter societal choices. »
C’est la fin qui vaut son pesant de hamburger et son supplément de Bourgogne. L’avisé commentateur de Forbes, nous indique en effet où se trouve la tromperie de Krugman: la France, ne nous dit pas Krugman, est une sorte de goulag où vous êtes obligés par l’État de bien vivre et de bien manger :
« Here is what Krugman doesn't tell you:
» — An individual Frenchman has little choice in his lifestyle. Society has made the choices for him. In America, one has a far greater menu of choice. Americans can choose to live a “French” lifestyle—say, as a musician, professor or artist—with low stress and low rewards. Or, Americans can choose to live an “American” lifestyle—as salesmen or stockbrokers—with high stress and high rewards.
» — Supersized Cokes or a mellow Burgundy? America leaves this choice to the individual. »
Il y a plusieurs choses admirables dans ces appréciations, qui placent l’auteur à un niveau d’inculture et d’absence de sens commun si complexement abyssale qu’elles nous laissent un peu cois. Imaginer que la vie d’artiste et de musicien n’implique aucune tension nerveuse, c’est-à-dire moins que l’homme d’affaire ou le spéculateur, est d’une bêtise si complète que nous sommes proches du chef d’œuvre. Croire qu’en France on ne peut manger salement, bêtement, stupidement, à l’américaine, est malheureusement une remarque bête à pleurer. Refuser aux Français, le peuple le plus indiscipliné et le plus individualiste de la terre l’absence de choix qu’impliquent un style de vie et une nourriture qui sont, par réputation, par évidence, par expérience, par tout ce que vous voudrez, les plus variés du monde, — comment voulez-vous que cela ne laisse pas sans voix?
Le propos du type de Forbes se résume à ceci uniquement : en Amérique nous avons la possibilité bien plus qu’ailleurs d’être plus cons qu’ailleurs. Il a oublié qu’on peut également, en lisant plutôt Krugman, être également, en Amérique, plus intelligents que dans l'Amérique qui lit Forbes.
Mis en ligne le 13 août 2005 à 14H49
Forum — Charger les commentaires