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831Il existe aujourd’hui, un peu partout en Europe, une “panique française” en train de monter. C’est un étrange phénomène, qui rythme en contrepoint la mélopée habituelle — une mélopée sans fin sur le déclin français, sur “la France, nation dépassée”, sur la France qui ne compte plus en Europe, — ponctuée brutalement d’alertes extraordinaires sur le thème : mais que va devenir l’Europe si la France fait ce qu’elle s’apprête à faire, ou ce qu’on croit qu’elle s’apprête à faire ? Que va devenir l’Europe si la France devient ce qu’elle est ?
Il y avait eu ce phénomène avec le référendum de mai 2005. Aujourd’hui, il est plus fort que jamais, avec l’élection présidentielle.
Deux exemples :
• A Bruxelles, le journal Le Soir, parfait miroir de la bourgeoisie louis-philipparde et libérale de cet étrange pays à la fois émouvant et peu exaltant (dito, la Belgique, pas la France), prend position dans l’élection française. C’est la deuxième fois que Le Soir prend position dans une élection étrangère, et cela marque effectivement et involontairement la hiérarchie des pays qui comptent (si l’on comprend bien : les USA et la France). La rédactrice en chef du journal écrit le 14 avril : «Jusque-là, nous ne l'avions pas écrit. Parce qu'il demeure exceptionnel que Le Soir prenne position dans une élection, comme il l'avait fait pour soutenir John Kerry face à George Bush aux Etats-Unis.
»Cette fois pourtant, on ne peut plus rester sans le dire. Oui, Nicolas Sarkozy est dangereux…»
• A Londres, dans le Guardian , Will Hutton s’alarme de la même situation du soi-disant “virage à droite” de la France, qu’il décrit implicitement comme étant dans un état épouvantable (la mélopée France “nation dépassée”, “qui ne compte plus”, etc.), — et dont, pourtant, le choix de son nouveau président est promis à bouleverser l’Europe. Toujours cet étrange paradoxe d’un pays sans importance à cause de son déclin et de son passéisme, et au choix politique duquel le reste du monde (de l’Europe) est suspendu pour connaître son propre destin. Venue d’un Britannique (Hutton ce matin), cette panique devant la montée du nationalisme (en France, certes) nous fait goûter un de ces succulents paradoxes d’une époque qui se trouble profondément chaque fois qu’elle croise la réalité. Si on lit le texte de Hutton comme il faut, quel étrange hommage à la puissance et à l’influence françaises…
«The drive to outsiderdom and the right will have profound implications for Europe. France is the European country that takes European values to an irrational, almost surreal, degree. Most Europeans are committed to a European-style welfare state, but it is France which elevates welfarism and solidarite to a religion. Again, most Europeans have uncertainties about American-style free markets. It is the French who have turned the uncertainty into a cult. And there is a general European doubt about the racial, ethnic other, Muslims especially, but it is the French who have created the phenomenon that is le Pen.
»Any French President has simultaneously to reform the system, but respect those surreal extremes, a task that increasingly looks like being settled by coming down on the right. If so, no corner of Europe will be unaffected. Manuel Barroso, President of the European Commission, says privately that his biggest discovery since taking over the commission is that nothing substantive can happen without France. The French may not propose or even dispose, but they can block. And for at least a decade, they have been Europe's blockers, culminating in the vote against the EU constitution two years ago. If France becomes more protectionist , more anti-foreigner, more anti-immigrant as the next President struggles to appease France's growing right-wing tendencies, the very foundations of the EU will shake.
»For that is the danger. ‘Sarko’ and ‘Sego’, for all their differences, share an intriguing amount of common ground. Both think that to solve its economic and social problems, France must turn its back on top-down, statist government by intellectuals and experts animated by plans, theories and grands projets.
»Both declare France must become fiercely practical and return to the verities of hard work, risk-taking and supporting wealth creation. Yet both say France must retain its commitment to high social protection. And both say France should not open its doors to foreign competition and ownership. The true France must be defended to the last. And both make concessions to le Pen. Sarkozy's statements are so alarmingly le Penist that the 78-year-old claims he has won the argument. Royale wants the left to be as proud of the Tricolour as the right and insists every worker should meet tough residency requirements.»
Mis en ligne le 15 avril 2007 à 06H21
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