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42825 avril 2024 (11H15) – Pour qui s’entête à suivre les émissions, conversations, tables rondes, etc., des commentateurs dissidents, – les ‘malpensants’ en question, – il apparaît clairement qu’une sorte de colère collective monte. Il fallait écouter Jeffrey Sachs avant-hier, reçu par le duo de ‘TheDuran’, Mercouris-Christoforou, un Sachs inarrêtable, furieux, déchaîné, exaspéré. Cet homme courtois, diplomate dans l’âme, économiste pointilleux, était emporté dans un tonnerre d’imprécations adressée aux directions américanistes-occidentalistes, et Mercouris-Christoforou avait bien du mal à contenir les flots de l’ouragan... Lui-même s’excusant d’accaparer tout ce temps, mais pour mieux proclamer son indignation, jusqu’à l’aide d’anecdotes dont on aurait bien aimé en savoir un peu plus...
« Ils ne savent plus ce qu’ils disent... Prenez Macron, un jour je le rencontre, il me reçoit, il m’affirme avec force une position sur un problème important et la semaine suivante, il dit publiquement, exactement le contraire ! »
Prenez un docteur Anthony Montero, professeur des études africaines-américaines, mis à pied en mars de l’université de Temple, Philadelphie, imprécateur et grande gueule, activiste wokeniste black et anti-blanc, communiste, etc. – si vous voulez, un peu “complètement le contraire” de Sachs, du point de vue de l’idéologie, de la psychologie, du caractère ; mais même colère, même emportement, ici enregistrée par ‘SputnikNews’ dans son émission ‘The Final Hour’ :
« — La politique étrangère américaine est devenue une pratique d’incompétence et de folie... Tout cela n'est qu'une manifestation d'un empire en déclin, du ‘démantèlement du principal pourvoyeur de violence dans le monde’ comme l’avait déclaré Martin Luther King Jr. dans son célèbre discours... Les États-Unis ne savent que créer de nouvelles crises pour entretenir leur hégémonie !
— Les derniers coups de sabot d’un mulet agonisant ? (Wilmer Leon, présentateur)
— Exactement ! Nous avons affaire à une classe dirigeante qui a perdu la raison, une classe dirigeante qui est devenue si pathologique qu’elle représente non seulement un danger pour le reste de l’humanité, mais aussi un danger pour elle-même et pour cette nation.... Un groupe de personnes tellement coupées de l'humanité qu'elles ont perdu la tête. Ce sont des personnes qui doivent, à terme, être écartées de tout instrument de pouvoir social, politique et économique dans le pays. Ils représentent un danger pour l’humanité. »
De tels exemples sont renouvelables en très grands nombre tandis que ces dissidents furieux se trouvent de plus en plus invités sur les plateaux de réseaux jusqu’alors plutôt hésitants, ou en-dehors du jeu du grand commentaire géopolitique. Ces réseaux se rallient eux-mêmes, de facto, à cette grande colère causée par l’extraordinaire irresponsabilité des dirigeants américanistes-occidentalistes.
Plus encore, – ou pire si l’on veut, – les sources officielles elles-mêmes alimentent involontairement cette colère en diffusant des analyses de plus en plus nombreuses et de plus en plus sombres sur la réelle puissance des Russes. Ainsi de la surprise du Pentagone, exposée, par procuration, par l’adjoint au secrétaire d'Etat Kurt Campbell, lors d’une conférence au Center for a New American Century, un groupe de réflexion néoconservateur de Washington D.C., c’est-à-dire les forces intellectuelles coupables directement de cet incroyable gâchis, – mais qui restent très contentes d’elles-mêmes et absolument prêtes à continuer....
« Nous avons constaté au cours des deux derniers mois que la Russie s'est presque complètement reconstituée militairement, et après les premiers revers sur le champ de bataille que lui a infligés un groupe courageux et robuste en Ukraine… La Russie s'est rééquipée et constitue désormais une menace pour les Ukrainiens alors que nous tentons désespérément de leur envoyer de l’aide, – et une menace pas seulement pour l’Ukraine... ».
Campbell a fait l’habituelle mise en accusation des “alliés de la Russie qui aident la Russie”, mais s’est surtout attardé à poursuivre son auto-flagellation en dénonçant les “coupes budgétaires” (pourtant si minimes !) des années 1990, et surtout les énormes concentrations industrielles de cette même époque, qui ont cassé les reins de la base industrielle US.
« Je pense que ce que nous constatons, c’est que les exigences urgentes en matière de sécurité en Europe et dans la région Indo-Pacifique nécessitent une capacité beaucoup plus rapide à mettre en œuvre à la fois des réglementations et d’autres capacités. Nous rencontrons des défis liés à la livraison même des équipements les plus élémentaires nécessaires pour faire face à la situation en Ukraine, mais aussi simplement pour garantir que les stocks de défense américains restent intacts. »
A toutes ces sources très diverses et parfois inattendues de colère devant cette situation catastrophique, s’ajoute un facteur psychologique que nous signalent des sources qui ont déjà fait leur preuve. Il s’agit d’un fossé de méfiance qui est en train de se creuse entre les décideurs politiques et leurs bureaucraties de sécurité nationale, parce que les infirmations que les premiers reçoivent des secondes ne correspondent pas à leur attente, ni tout simplement à ce qu’ils croient puisqu’ils répètent la mème chose depuis des mois, – au nom de Dieu ! En d’autres mots, certains services jusqu’ici bien dans les rangs commencent à fournir, devant l’évidence de la catastrophe, des informations qui rompent les rangs du simulacre.
«Là aussi, la mauvaise humeur est générale et tout se passe comme si, expliquent nos sources, la fureur constatée chez les commentateurs antiSystème commençait à gagner les rangs des hauts fonctionnaires, de certains conseillers, etc. »
Là-dessus, je dois dire d’abord ma surprise. Cette fureur des commentateurs antiSystème, avec les effets de diffusion qu’on constate, existait dès l’origine de cette guerre et je pensais, malgré mon pessimisme optimiste, qu’elle finirait par être étouffée par la puissance colossale de l’appareil de simulacre du Système. Or, c’est le contraire qui se produit, et si l’on me dit évidemment que les événements y sont pour beaucoup, notamment ma maîtrise et la puissance des Russes, je n’en avoue pas moins ma surprise évidemment ravie.
C’est qu’alors le ‘Règne de la quantité’, tout écrasant qu’il soit, n’a pu vaincre la qualité ; et c’est d’ailleurs peut-être bien cet écrasement, cette énormité du simulacre, son poids insupportable, cette façon qu’il a de provoquer au bout du compte une nausée irréversible, qui ont fini par entamer les nombreux et braves “soldats Ryan” qui s’activaient à alimenter la machine grondante du simulacre de nouvelles les plus incroyables les unes que les autres. Tout se passerait, le plus bêtement du monde, comme si leur psychologie était en train de se révolter sous le poids de cette torture que le Satan selon Douguine leur impose : le mensonge, vous savez, est dur à porter, – il est aussi dur à porter que « les escaliers de la Butte sont durs aux miséreux »...
S’impose alors un constat fondamental : ce courant que je vous rapporte, qui n’est certes pas de l’analyse rationnelle mais bien pour l’essentiel du travail d’intuition, ne peut qu’enfler, se diffuser, se démultiplier. Et la question de s’imposer, énorme, énigmatique et mystérieuse : que se passera-t-il quand ce courant commencera à se rapprocher de l’irrésistibilité et qu’un événement malheureux pour les égos de nos valeureux dirigeants se produira, plus marquant qu’un autre, plus humiliant qu’aucun autre, plus énorme et tonitruant qu’aucun autre et alors impossible à cacher, ou à repeindre, ou à remodeler ? Que se passera-t-il lorsque le simulacre se désintégrera en autant de milliers de morceaux inutiles et pathétiques ? Que se passera-t-il lorsqu’une lumière nouvelle inondera de sa clarté irrésistible le champ de ruines que nous avons laissé s’amonceler ? Je ne peux vous cacher qu’il existe sans aucun doute un côté sombre à cette perspective catastrophique que j’évoque, c’est-à-dire une catastrophe pour nous tous, même ceux qui ont tant lutté pour prévenir la venue de la dite-catastrophe. Je ne peux ni ne veux rien vous cacher : le chemin de Damas, lui aussi, “est dur aux miséreux”.
Et c’est ainsi que nous passâmes dans une nouvelle immense contrée de la terra incognita qui est désormais notre pain quotidien, et celle-là, bien entendu, encore plus incognita que précédemment...
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