La logique du pire, ou la sauvegarde par la séquestration

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La logique du pire, ou la sauvegarde par la séquestration

Harlan Ullman développe, le 8 août 2013 pour UPI, une proposition entièrement basée sur la logique du pire. Il s’agit de l’état du Pentagone, de la dynamique de la séquestration, et de l’évolution des forces armées des USA dans les dix années qui viennent. Ullman s’exprime sans pincettes, comme il a l’habitude de faire, par exemple lorsqu’il remarque que “la meilleure chose” qui soit arrivée ces derniers jours est le départ en vacances du Congrès puisque, pendant ce temps, son action n’aggrave pas la situation à Washington («Perhaps the best thing that happened to the United States last week was Congress abandoning Washington for a 5-week break deferring all the major issues and problems.»)... En attendant, à son retour de vacances, problèmes, blocages et impasses seront toujours là, empilés, plus pressants que jamais («Will anything improve when Congress returns? The answer isn't reassuring»). Bref, Ullman, a enfourché son thème favori qui est la crise sans fin du pouvoir washingtonien, en y ajoutant son expérience d’expert dans les matières stratégiques puisqu’il fit une carrière dans l’U.S. Navy (c’est à lui qu’est attribuée la paternité de la doctrineShock & Awe”).

Ullman détaille la crise budgétaire que la séquestration a déclenchée, spécifiquement dans le cas du Pentagone. Il estime que cette crise doit affecter le Pentagone dans une mesure considérable dans les prochaines années, en se référant à des règles économiques et financières strictes. On peut effectivement admettre cette approche dans la mesure où, justement, la séquestration impose un cadre législatif rigide, interdisant le moindre arrangement bureaucratique et politicien du type de ceux qui ont jusqu’ici fonctionné entre le Pentagone et le Congrès. Cette rigidité est effectivement tout ce qui fait la particularité sans précédent de la séquestration pour des entités de la puissance et de l’importance du Pentagone. Ullman qualifie justement la séquestration d’“épée de Damoclès” qui conduit le Pentagone à une situation catastrophique, – concrètement la nécessité de doubler les dépenses de défense dans les dix ans s’il voulait maintenir les forces armées à leur niveau actuel, alors que la séquestration induit au contraire une réduction d’au moins 10% (de 25% pour certains) des dépenses de défense sur la même durée (voir le 5 août 2013).

«But, the effect of the financial Damoclean Sword can be made more obvious. The banking Rule of 10 explains why. Money deposited at an annual interest rate of 7 percent doubles every 10 years; at 10 percent, it doubles every seven years. Conversely, money that declines annually at 7 percent is cut in half in 10 years and at 10 percent in seven. The annual costs of defense to maintain current capability amount to about 7 percent because of the exploding expense of people – active, reserves and retirees – medical care and advanced weapons systems, plus inflation that is about 3 percent.

»Conclusion: Despite appeals to cut waste and inefficiency that achieve little, by the end of this decade, in gross terms, the Rule of 10 (or seven) means doubling defense spending to maintain the current force or cutting the current force by about half.»

Ullman termine en se demandant comment les événements vont progresser. C’est là, espère-t-il, que l’épée de Damoclès de la séquestration pourrait faire son effet après tout, en forçant la chose (le Pentagone) aux décisions draconiennes que nécessite son état... Ce qu’il développe est bien cette logique du pire. Observant que le Pentagone se trouve d’ores et déjà (avant même la séquestration, d’ailleurs) dans l’état extraordinairement catastrophique où on le voit, complètement déliquescent dans son océan de gaspillage et d’aberrations de gestion, impuissant à se réformer, il juge que les conditions draconiennes qu’impose la séquestration donnent une occasion unique de forcer le Pentagone à se réformer, et, pour ceux qui le dirigent, de se forcer eux-mêmes à imposer sa réforme au Pentagone. Les deux termes sont évidemment liés et l’un ne va sans l’autre : il faut que le Pentagone soit en position où il ne peut faire autrement que se réformer (la séquestration met en place cette situation), mais il faut aussi qu’une direction soit en place qui ait la volonté politique, le courage politique d’effectivement pousser à cette réforme. On en revient alors à cette condition du “courage politique”, donc à la situation de la direction-Système de Washington. Bien... Si Ullman développe effectivement sa logique du pire, l’on sent tout de même, selon l’habitude qu’on a des sentiments dominants chez ce personnage, que lui aussi se force à proposer un terme encourageant. A force de développer la logique du pire, dans une situation où il n’y a aucune place pour une autre logique, on en arrive à manquer de conviction pour proposer quelque chose qui ne soit pas le pire.

«What can be done? A cynic or pragmatist experienced in U.S. politics might say nothing. But doing nothing won't defend the nation.

»Desperate times call for desperate measures. U.S. Secretary of Defense Chuck Hagel has demonstrated his courage in battle and in the Senate. The uniformed senior military leadership and the people they lead have repeatedly demonstrated bravery in war and in peace. Now, political courage is essential.

»When Congress returns, the Pentagon must show in specific terms the stark choices it and the American people face regarding the size and shape of the future military with sequestration and the ludicrous requirement to take all cuts “equally” across all programs as if we can build 90 percent of a ship, bullet, missile or rifle. The purpose isn't to seek more money for defense. Indeed, given the struggling U.S. economy and the looming debt ceiling, budget and other financial issues this year, defense spending is likely to be further reduced. When interest rates rise, which they will, budgets will be slashed to reflect the increases in non-discretionary spending.

»The purpose is to produce a range of force options at likely projected levels of defense spending rather than wishful thinking that somehow Congress will save the day, which it won't. Congress and the public can draw their own conclusions about the consequences.

»Here, if we don't spend much more money, the two basic choices are keeping a larger but less prepared and probably unready force OR accepting a much smaller but highly capable force. The driving assumptions for both choices are that global or very large regional wars are unlikely for some time and can be deterred or avoided through cleverer strategies, more rigorous assessments of dangers, greater reliance on allies and partners and polices to reconstitute and rebuild capabilities when and if needed. The second choice ensures greater likelihood of success for forces deployed in harm's way.

»Such a stark presentation will shock and stun many. Critics will claim this approach is overly pessimistic while aiding our adversaries by underscoring our weaknesses. And large reductions will be painful. If we are, however, to prevent the condition of financial national insecurity from emasculating defense, truth, realism, candor and objectivity are essential. Without them, we may scrape by. But don't count on that.»

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