La “New Europe” commence à mesurer le poids des faveurs US

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La “New Europe” commence à mesurer le poids des faveurs qu’on lui fait


6 septembre 2003 — Cela n’a pas été vraiment très long. Entre les déclarations lyriques des philosophes américanistes de service, — Donald Rumsfeld à Washington et les dirigeants de la “New Europe”, ex-Europe communiste, — et l’irruption de la réalité, on compte le temps d’une gestation très humaine. Il faut compter neuf mois entre les premières déclarations de Rumsfeld (“New Europe ” contre “Old Europe) et les premiers signes sérieux de désenchantement de la New Europe . De ces signes-là, on en signale un, extrêmement fort, venu de la Hongrie, qui signale, par la voie de la presse transatlantique “officieuse” (International Herald Tribune) qu’elle commence à être gênée aux entournures par la désinvolture stupéfiante, mais au reste extrêmement habituelle, des Américains.

Résumé de l’affaire :


« A U.S. plan to send 28,000 Iraqis to Hungary for police training will not work because the country does not have the facilities for them, Hungary's prime minister, Peter Medgyessy, said Tuesday. Medgyessy said he would not exclude allowing a smaller number of Iraqis to train in a military base 200 kilometers, or 125 miles, southwest of Budapest. But having 25,000 or 30,000 Iraqis at the base was “out of the question,” he said. “We just don't have the capacity,” Medgyessy said in an interview.

» Last week, Bernard Kerik, then the top U.S. official at the Iraqi Interior Ministry, announced a plan to send up to 28,000 Iraqis on a staggered basis to the Taszar military base in Hungary. The plan was described as an emergency measure to address the security crisis in Iraq. Kerik, who has since left Iraq, told The New York Times that he had received permission from the Hungarian government for the plan and that the first Iraqi police cadets could arrive in Hungary within four months. »

» But Medgyessy said his government had never formally discussed the idea with Washington and learned of the details of Kerik's plan only from news reports. “We have not received any formal, official request so far,” Medgyessy said. »


Le Guardian du 29 août nous avait déjà avertis à propos de cette affaire du camp d’entraînement pour Irakiens, en y ajoutant la précision troublante que ce n’était pas la première fois qu’une telle chose arrivait, — à savoir, que le public hongrois (et d’autres pays de l’Europe ex-communiste) soit averti par les voies de la presse américaine de décisions les concernant et prises en leur nom.


« When 10 governments in central and eastern Europe lined up behind Washington last February in support of the war in Iraq, the general publics from Lithuania to Albania were the last to know. Leading politicians and diplomats across the region, indeed, found out about their governments' backing for war from American press reports.

» Hardly surprising, given that the “Vilnius declaration” of the 10 states was penned not in eastern Europe, but in New York and Washington.

» In Hungary this week, the same thing happened again. A New York Times report from Baghdad triggered apprehension and bafflement in Budapest with the news that some 28,000 Iraqi policemen were to be trained by the Americans at a Hungarian airbase. »


On comprend que toutes ces situations où les pays de la “nouvelle Europe” se trouvent placés devant les exigences US, sans même qu’ils soient consultés, ne sont évidemment pas accidentelles. Elles constituent le courant des relations entre les USA et ces pays, à l’image des relations habituellement entretenues entre les Américains et les pays satellites. Elles n’iront évidemment pas en s’améliorant, au fur et à mesure, notamment, que s’exacerbent les conditions de la crise, particulièrement en Irak, qui ont un effet direct sur tous les rapports d’alliance avec les USA.

Ces relations entre les pays d’Europe de l’Est et de l‘UE vont directement interférer sur le statut de nouveaux membres de l’UE de ces pays de l’ancienne Europe communiste. On le voit déjà avec les problèmes qui surgissent, notamment des accords bilatéraux de 6 des 10 nouveaux membres avec les USA, qui contredisent les règles de l’UE. L’élargissement va donc s’effectuer dans les pires conditions possibles, les nouveaux pays membres n’étant pas des “sous-marins” des USA mais des destructeurs de l’UE à cause de leurs liens avec les USA autant que de leur impréparation pour entrer dans l’UE. L’issue inéluctable est la séparation au sein de l’UE entre les pays libres de tous liens contraignants avec les USA et les autres, — ces “autres” pouvant rejoindre peu à peu le noyau central au fur et à mesure qu’ils se libèrent de leurs liens avec les USA, si c’est le cas. Cette situation était déjà évidente lors de l’inauguration du nouveau commandant de l’Eurocorps, la semaine dernière à Strasbourg. Les Polonais ont montré un grand intérêt à devenir un des “pays-cadres” de l’Eurocorps, mais les actuels membres de cette unité repoussent cette idée. La raison en est simple et elle a été dite, à haute voix même si officieusement : ils ne veulent pas d’un pays inféodé aux USA, qui interdise par son vote éventuel le fonctionnement d’une unité européenne (l’Eurocorps fonctionne à l’unanimité de ses membres).

Très vite, les anciens pays d’Europe de l’Est vont se trouver coincés entre des relations de plus en plus difficiles à supporter avec les USA, et la méfiance, voire l’ostracisme d’un certain nombre de pays-membres au sein de l’UE.