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1433L’éditorial du Washington Post du 1er septembre 2014 doit être considéré, par son contenu autant que les effets qu’il a engendrés, comme le symbole de ce qui pourrait être un événement considérable. Parvenue à ce degré d’inversion de la vérité de la situation, – les mots de “mensonges” ou de “propagande” sont désormais très loin d’approcher le commencement d’une explication du phénomène, – la presse-Système est menacée d’un effondrement de son crédit, de son statut, de sa perception d’elle-même, de sa capacité à s’assumer dans une atmosphère absolument imprégnée de la folie de son inversion, c’est-à-dire de son existence même en tant qu’organisation d’information et de communication. Cette perspective est d'une importance fondamentale parce que, dans un Système de plus en plus appuyé sur la communication pour manifester et développer sa surpuissance, la presse-Système est le socle essentiel de toute l'organisation et de toute l'activité du Système.
On ne s’attardera, ni à une citation directe du texte du Post, ni à sa critique, qui constitueraient des exercices trop faibles, trop incomplets pour mesurer l’ampleur du phénomène. Nous préférons donner deux extraits de sources réputées dans les réseaux et dans l’information antiSystème, pour leur sérieux, leur constance dans la justesse de l’évaluation du commentaire et de la critique directe de la presse-Système. Il s’agit de deux réactions de formes différentes, – au travers desquelles on trouvera d’ailleurs des extraits du texte du Post, “de seconde main” si l’on veut, mais toujours dans les mêmes termes.
• Il s’agit d’abord de Robert Parry, dans ConsortiumNews, le 2 septembre 2014 : «...But the hysteria over Ukraine – with U.S. officials and editorialists now trying to rally a NATO military response to Russia’s alleged “invasion” of Ukraine – raises the prospect of a nuclear confrontation that could end all life on the planet. [...] This madness reached new heights with a Sept. 1 editorial in the neoconservative Washington Post, which led many of the earlier misguided stampedes and was famously wrong in asserting that Iraq’s concealment of WMD was a “flat fact.” In its new editorial, the Post reprised many of the key elements of the false Ukraine narrative in the Orwellian context of accusing Russia of deceiving its own people.
»The “through-the-looking-glass” quality of the Post’s editorial was to tell the “Big Lie” while accusing Putin of telling the “Big Lie.” The editorial began with the original myth about the aggression waged by Putin whose “bitter resentment at the Soviet empire’s collapse metastasized into seething Russian nationalism. …
»“In prosecuting his widening war in Ukraine, he has also resurrected the tyranny of the Big Lie, using state-controlled media to twist the truth so grotesquely that most Russians are in the dark — or profoundly misinformed — about events in their neighbor to the west.” [...] “In support of those Russian-sponsored militias in eastern Ukraine, now backed by growing ranks of Russian troops and weapons, Moscow has created a fantasy that plays on Russian victimization. By this rendering, the forces backing Ukraine’s government in Kiev are fascists and neo-Nazis, a portrayal that Mr. Putin personally advanced on Friday, when he likened the Ukrainian army’s attempts to regain its own territory to the Nazi siege of Leningrad in World War II, an appeal meant to inflame Russians’ already overheated nationalist emotions.”
»The Post continued: “Against the extensive propaganda instruments available to Mr. Putin’s authoritarian regime, the West can promote a fair and factual version of events, but there’s little it can do to make ordinary Russians believe it. Even in a country with relatively unfettered access to the Internet, the monopolistic power of state-controlled media is a potent weapon in the hands of a tyrant.” “Mr. Putin’s Big Lie shows why it is important to support a free press where it still exists and outlets like Radio Free Europe that bring the truth to people who need it.”
»Yet the truth is that the U.S. mainstream news media’s distortion of the Ukraine crisis is something that a real totalitarian could only dream about. Virtually absent from major U.S. news outlets – across the political spectrum – has been any significant effort to tell the other side of the story or to point out the many times when the West’s “fair and factual version of events” has been false or deceptive, starting with the issue of who started this crisis.»
• Moon of Alabama a pris le problème d’une façon différente, le 1er septembre 2014. Effectuant une rapide incursion dans le texte du Post, il a surtout rapporté la réaction des Russes, qui ont simplement retranscrit le texte du Post affirmant que les citoyens russes vivent sous l’empire d’une monstrueuse désinformation/mésinformation, selon une réaction que MoA qualifie assez justement de “pleine d’humour”... Puisqu’on cache tout aux Russes, autant leur faire lire directement, traduit dans leur langue, le texte qui dit qu’on leur cache tout. L'intervention de MoA est très courte, on la retranscrit en entier (avec le souligné en gras de l’auteur)...
«The Washington Post Funny pages have added a really good one today: “In prosecuting his widening war in Ukraine, [Putin] has also resurrected the tyranny of the Big Lie, using state-controlled media to twist the truth so grotesquely that most Russians are in the dark — or profoundly misinformed — about events in their neighbor to the west. Most Russians get their news from state-controlled broadcast outlets, which have moved beyond mere propaganda into outlandish conspiracy theories and unhinged jingoism.
»To prove the Washington Post editors right the state-controlled Russian internet outlet inoSMI, personally advised by Vladimir Vladimirovich Putin, "moved beyond mere propaganda into outlandish conspiracy theories and unhinged jingoism" by immediately translating the WaPo editorial into Russian so that Russians can now dive further “into the dark” and "profoundly misinform" themselves by reading this editorial of the Washington Post in their native language.
»Dear Washington Post. Your funny pages can not beat Russian humor.»
Parry parle, pour qualifier aussi bien le comportement des officiels de Washington que celui de la presse-Système, – le Post en l’occurrence, – d’“hystérie” et de “folie”, d’ailleurs haussée d’un cran («This madness reached new heights»). Il n’étonnera personne que nous accordions une importance première à l’état psychologique du personnel-Système, notamment dans les cas évoqués, du fait que nous tenions la pathologie comme le caractère essentiel, fondateur et producteur, du phénomène abordé ici. (Mais Stealth Pathology, certes, comme exposé le 2 septembre 2014.) Notre sentiment est que cette attitude, cette sorte de rage hystérique et furieuse, profondément déstructurante sinon dissolvante pour ceux qui la manifestent, ne pourront se poursuivre longtemps à ce rythme et de cette façon, avant que quelque événement de rupture ne survienne.
Il faut bien marquer, et répéter sans cesse, que la situation présente est entièrement due dans ses circonstances opérationnelles, comme l’on parle d’une catharsis, d’un paroxysme, à un ensemble comprenant la crise ukrainienne, la crise des relations avec la Russie, et la perception que ces psychologies s’imposent à elles-mêmes de la Russie et de Poutine lui-même. Il s’agit d’une tension intérieure, par rapport à la vérité de la situation qui s’exprime régulièrement par des interférences, des polémiques, des évidences, des éclairs puissants de la réalité, etc., qui est d’une telle force qu’elle contient effectivement les ingrédients d’une rupture.
Nous n’avançons pas une hypothèse au strict sens rationnel où on l’entend couramment, d’une part parce que nous jugeons selon le principe qui s’est imposé par le fait de la situation courante qu’on ne peut plus en rester à ce “strict sens rationnel où on l’entend couramment” ; d’autre part parce que nous jugeons également que le “strict sens rationnel où on l’entend couramment”, justement, n’existe plus aujourd’hui dans ces milieux et les débats qui les agitent, qui se situent au-delà, dans une zone nouvelle où les facteurs de l’hystérie et du paroxysme de la représentation du monde sont entrés dans une nouvelle phase, dans un domaine nouveau, et qui supplantent tout le reste d’une façon écrasante. Cette situation phénomélogique est expressément lié à l’ensemble Ukraine-Russie-Poutine ; et cela est garant de sa durabilité parce que, à notre sens, cet ensemble n’a aucune chance de s’apaiser par une issue arrangée de compromis, de négociation, etc., mais doit durer, s’amplifier, lui aussi établissant de nouveaux paroxysmes, vers une issue qui ne peut être que paroxystique et donc rupturielle. Cette dynamique, par conséquent, implique effectivement, de plus en plus puissamment, une issue rupturielle, sinon catastrophique.
Dans cette perspective, et parce que cet ensemble Ukraine-Russie-Poutine se situe presqu’entièrement dans le domaine de la communication comme nous ne cessons d’en développer l’hypothèse (voir le 1er septembre 2014 et le 2 septembre 2014), la presse-Système nous paraît engagée sur une course folle, dans ses montages, ses fantasy-narrative, qui ne peut que conduire à une rupture. Nous ignorons sans aucun doute quelle forme prendrait cette rupture, quelles modalités elle utiliserait, quels effets concrets elle produirait, mais nous croyons sans aucun doute à l’existence de cette course et à son extrême puissance (suscitée par la surpuissance produite par le Système). Encore une fois, la psychologie est le premier moyen de cette évolution, à cause des pressions terrifiantes qu’elle subit de plus en plus constamment, qui lui sont imposées par le Système et sa surpuissance (et nous parlons dans ce cas de la psychologie du personnel de la presse-Système). Il nous semble inutile parce que trop faible, dans la critique qu’on en fait, de se référer à des expériences telles que la presse totalitaire, la presse communiste aux pires temps du stalinisme, etc., pour définir la situation actuelle de notre presse-Système et cette course dont nous parlons. Nos avons très largement dépassé ces épisodes, du point de vue de l’information et de la communication. Il s’agit d’une autre forme de distorsion et d’inversion quasiment de l’ordre du métaphysique (et métaphysique-simulacre, pour situer la qualité de la chose), littéralement insupportable sur le terme, qui est en plein développement, qui n’a aucun précédent, qui ne s’arrange d’aucune référence historique. Bien entendu, la puissance presque exclusive de la communication dans la machinerie et la machination des événements est un facteur fondamental pour soutenir notre hypothèse.
Cela nous pousse paradoxalement à envisager des perspectives qui ne sont pas les plus abruptement catastrophiques, dans le dilemme que nous avons identifié dès l’origine de cette crise ukrainienne arrivée à maturité (voir le 3 mars 2014 : «La crise ukrainienne, et la réalisation que les pressions du Système (du bloc BAO, son factotum) peuvent conduire à l’extrême catastrophique des affaires du monde, peuvent aussi bien, grâce au “formidable choc psychologique” dont nous parlons et à l’immense crainte qu’il recèle, déclencher une autre dynamique d’une puissance inouïe. Notre hypothèse à cet égard, rencontrant l’idée de la formidable puissance symbolique du centenaire de la Grande Guerre (voir le 2 janvier 2014), est que cette dynamique est celle de l’effondrement du Système dont rien, absolument rien ne réclame qu’il se fasse dans l’apocalypse nucléaire...») Notre conviction est que le comportement de la presse-Système, jusqu’aux abysses rupturiels dont elle s’approche à grand pas, sera l’un des premiers signes les plus significatifs de l’issue catastrophique de plus en plus probables de notre aventure Système/contre-civilisation, et qu’il se manifestera à l’intérieur de cette grande crise Ukraine-Russie-Poutine.
Mis en ligne le 3 septembre 2014 à 06H18
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