La réalité inventée avec des leurres

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La réalité inventée avec des leurres

Récemment, l’agence de l’OMS chargée de recherche sur le cancer a classifié l’herbicide Rondup, glyphosate de son nom chimique, parmi les substances potentiellement cancérigènes pour l’homme. La production et la vente de ce produit de synthèse résultant de l’addition d’un dérivé phosphonate à l’acide aminé le plus simple de la nature, la glycine, a fait la fortune du groupe Monsanto qui l’a mis au point.

Aucun pas scientifique ni technique n’avait été franchi pour l’élaboration d’une telle molécule.

Au moment de son brevetage par la firme américaine en 1970, étaient connus et décrits depuis longtemps tous les acides aminés, il en existe 22, ainsi que les processus enzymatiques de leur synthèse. De même qu’appartenait au domaine public l’usage de leurres biologiques, ce que sont la plupart des antibiotiques et les premiers anticancéreux.

Le glyphosate est présenté en masse à une voie de synthèse essentielle pour les végétaux d’acides aminés plus complexes à partir de la glycine, il inhibe alors cette activité enzymatique car cette fausse glycine sature les sites d’insertion. ‘Si est introduite une clé très semblable à l’originale dans une serrure, la serrure est bloquée, occupée, et rendue non fonctionnelle.’ (*)

Quelque temps après, la firme a tiré profit des avancées dans la description de l’organisation des gènes. Le gène d’une variante de l’enzyme qui n’est pas affectée dans sa fonction par la fausse glycine a été amplifié dans des microorganismes puis sa séquence introduite dans des végétaux. Du soja, du maïs, du coton ont vu leur génome agrémenté de morceaux de codes génétiques développés sur des animaux.

Indépendamment des innombrables problèmes environnementaux et de santé publique posés par l’emploi conjoint et obligatoire de l’OGM et de l’herbicide auquel il résiste, le brouillage de la césure entre le règne végétal et le règne animal aurait dû être appréhendé comme un scandale éthique.

Parmi les candidats leurres, le glyphosate a été retenu pour sa qualité d’être très peu onéreux à produire et de permettre une agriculture dite de conservation qui dispense de retourner la terre après désherbage et économise donc du travail humain. Payer Monsanto et non un ouvrier agricole met à disposition bon nombre de paysans pour un exode qui les entassera dans les périphéries urbaines.

Très vite après l’adoption dans des sous-continents entiers dont l’Amérique latine des plantes transgéniques, émergèrent des plantes sauvages dotées de variantes enzymatiques qui contournent efficacement le glyphosate. Des ambrosies, des fougères, des ivraies tolérantes, de minoritaires et sporadiques qu’elles étaient, se sont multipliées sous l’inévitable sélection induite par l’environnement appauvri par l’herbicide et concurrencent les OGM. Les employés de laboratoire de Monsanto avaient oublié que c’est dans la nature qu’ils ont puisé le gène de l’enzyme sélectionnée. Cloisonnés dans leur interprétation du champ du vivant limité à la minuscule fenêtre de cette enzyme, ils semblaient ignorer tout des premiers travaux de Charles Darwin consignés dès 1859 dans ‘De l’origine des espèces’.

Le rendement de la culture des OGM est en baisse drastique et c’est cela qui freinera significativement leur usage. On peut dès lors annoncer que l’acide aminé artificiel est doué d’un potentiel effet carcinogène.

La présentation d’un probable potentiel pathogène du désherbant réalise un véritable masquage sur un effet certain de son épandage par millions de tonnes. Sous sa pression métabolique, des bactéries multirésistantes aux antibiotiques connus et susceptibles d’être pathogène chez l’homme ont été sélectionnées. Ainsi a été réalisé un curieux effet miroir.

Un morceau de génome de bactérie inséré dans du végétal pour rendre celui-ci insensible à un leurre analogue à un antibiotique par un effet darwinien a fait émerger des bactéries insensibles à tous les antibiotiques.

Les principes autrefois érigés de d’abord ne pas nuire et de précaution sont pour les actionnaires et spéculateurs des archaïsmes opposés au Progrès. Les intenses activités de lobbying des groupes économiques qui travaillent pour ce Progrès, outre qu’elles ont conduit à des déforestations et des pertes de diversité du vivant, compromettant irréversiblement des écosystèmes, ont nourri de corruption des classes dirigeantes et de faux intellectuels idéologues de divers pays avec à la clé expropriations de terres et prolétarisation à outrance.

L’invention du vivant

En 2000 un ancien chercheur du NIH, Craig Venter, devenu homme d’affaires s’est fait connaître du grand public car sa firme a achevé le séquençage du génome humain simultanément avec un consortium international. Ce genre de tâche, un singe avec un puissant ordinateur pourrait le faire a commenté James Watson, l’un des deux chercheurs qui ont révélé le code génétique.

En 2010, Craig Venter et son équipe, au sein d’une nouvelle firme avec des apports financiers de Novartis et de la NASA, annoncent la fabrication de la première cellule capable de se reproduire à partir d’un chromosome artificiel.

Le chromosome synthétique, fait de plusieurs centaines de milliers de paires de bases, reprenait de larges morceaux de la bactérie Mycoplasma genitalium. Il a été implanté dans une cellule bactérienne préexistente déplétée de son propre matériel génétique.

Ce résultat est dû à une itération de procédés confiés à des calculateurs qui proposent des réassortiments d’éléments du vivant et à ce titre, l’allégorie du singe est assez juste. Le principe de la recherche des gènes à assembler pour générer le chromosome synthétique fut de supprimer des gènes dans le chromosome de la bactérie initiale sans que ne soient grevées sa survie ni sa reproduction.

La règle éthique sous-jacente à ce type de travail stakhanoviste est tout entière inscrite dans la formule « Pourquoi ne pas faire ce que nous pouvons faire ? »

Cette fausse prouesse a vu le jour - mais aura-t-elle un lendemain ? - en raison de l’accouplement aveugle d’applications de recettes techniques et certainement pas d’une avancée scientifique théorique avec un appétit aiguisé pour le gain.

En mai dernier, dans la revue de référence Nature, une équipe de San Diego s’est targuée d’avoir créé de la vie synthétique à partir d’éléments inexistants dans la nature.

Watson et Crick, nobélisés pour leur travail en 1962, avaient mis en évidence la structure en double hélice de l’ADN et son alphabet réduit à 4 lettres les bases représentées par les lettres A G T et C.

Floyd Romesberg et ses collègues ont incorporé deux nouvelles fausses bases appelées X et Y dans un chromosome de synthèse introduit dans une cellule bactérienne, comme fait précédemment par Craig Venter, capable de se reproduire. Cette implantation aléatoire de nouvelles bases triplerait le nombre de codons (**) et de 64 le porterait à 192. Ils seraient susceptibles de coder pour des acides aminés n’existant pas dans la nature et leur assemblement composerait des protéines par définition inédites.

Il est possible d’imaginer que la lettre ° et la lettre + soient ajoutées à l’alphabet français.

Des mots comme ab°°+ seraient générés, puis des phrases avec ce type d’outils, puis des textes plus complexes… Si l’exercice n’était coûteux en terme de recherche, il pourrait être vu comme un enfantillage.

À ces nouveaux codons, il faudrait imaginer une machinerie cellulaire qui leur attribue de nouveaux acides aminés. Mais surtout, il faudrait des séquences génomiques capables de produire des protéines ayant une fonction.

Bien entendu, ces traficotages sur des paillasses ont été traduits immédiatement par la création de start-up et des afflux financiers facilités par le QE et les prêts à taux négatifs de la Fed.

Une base qui n’existe pas dans la nature a été synthétisée dès la fin des années cinquante. C’est le premier antimétabolite anticancéreux, base leurre employée comme anti-cancéreux cytostatique, le 5 fluoro-uracile qui continue d’être utilisé dans l’arsenal thérapeutique en oncologie. Très modestement et très efficacement.

L’ingénierie développée dans les laboratoires de biologie moléculaire est à la recherche ce que l’ingénierie financière est à l’économie réelle, plus souvent toxique qu’inutile.

L’invention de la science

À un niveau de complexité au moins de deux ordres inférieurs, l’expérience du glyphosate laisserait songeur sinon inquiet.

La récente publication du Washington Post qui exhibe au public non averti la masse d’articles scientifiques ‘revus par des pairs’ et publiés dans des revue de grand prestige mentionne un taux de 15 à 20% de validation de publications trafiquées ou complaisantes. Taux sans doute sous-estimé comme ne peuvent que l’être les estimations du nombre des athlètes dopés lors des grandes manifestations internationales. Ceux qui ont ne serait-ce qu’un peu travaillé en biologie savent que le plus clair du temps est consacré à répéter fastidieusement des conditions d’expérience avec très peu de chances de résultats quand l’hypothèse de travail du départ est un jour validée. Dans ces conditions, publier sans cesse pour mériter des subventions conduit inévitablement à la fraude.

Une bonne part de l’enseignement du Maître soufi fondateur de la Voie Qadiryia, Abdelkader Jilani, pourrait se résumer à l’autolimitation. Le Sage parle peu et mange peu. Il réfléchit avant d’agir aux effets de ses actes et paroles et le plus souvent s’abstient.

L’invention d’un leurre réel et sa réalité meurtrière

Comment enfin ne pas rapprocher les leurres biologiques des leurres employés dans la stratégie de contention de l’espace planétaire humain par le système occidental ?

Pourtant, le texte de l’allocution du Général Vincent Desportes qui explicite la fabrication de Daesch par les Us(a) devant le Sénat français est partout disponible.

Est à la portée de qui veut l’entretien accordé par le Lieutenant Général Mickael Flynn à Mahdi Hasan sur la chaîne d’Al Jazeera qui indique comment furent ignorées ses recommandations de chef du DIA aux politiques et à l’administration de la Maison Blanche.

Moins connus sont les gazouillis envoyés à son million de followers par le directeur général de la police de Dubaï, poète à ces heures, avec un franc-parler parfois déroutant pour un homme de son rang politique dans un pays appartenant au Conseil de coopération du Golfe.

Dahi Khalfane écrit clairement que Daesh est doté de capacités qui ne peuvent être octroyées que par un puissant État protecteur, Israël et/ou Usa.

Ce leurre ubiquitaire est d’une efficacité redoutable.

Il recrute des exécutants désoeuvrés et désespérés ou en quête de sensations fortes. Ceux-ci viennent de pays heureux de se débarrasser d’indésirables qui seront manipulés s’ils revenaient vivants de leur aventure ou bien emprisonnés.

La question de l’autonomisation de la milice mafieuse par rapport à ses créateurs est vite résolue par une preuve indirecte. Elle ne porte pas atteinte aux intérêts du gouvernement turc qui lui assure une base arrière, bien au contraire, celui-ci lui vient en aide en combattant le PKK qui l’a mise en danger. Elle n’intervient pas en Jordanie, autre base arrière et autre lieu de transit de son armement. Elle ne déclare pas la guerre à Israël qu’elle pourrait atteindre aisément au Golan ni au monde juif malgré son islamisme radical affiché mais ne s’en prend qu’au Hamas. Pourtant, le Hamas est davantage ‘islamiste’ que le parti d’Erdogan.

Les systèmes de surveillance étasunien et israélien sont capables de cartographier au cm2 ce qui se produit dans toute la région. Leur incapacité de localiser Baghdadi dans le mouchoir de poche où il se meut et sévit laisse présager qu’il a une durée de vie assurée pour au moins dix ans avant qu’un scénario à la Abbottabad ne vienne signifier son épilogue.

Badia Benjelloun

Notes

(*) Le mécanisme d'action de cet herbicide est une inhibition de l'enzyme 5-enolpyruvoyl-shikimate-3-phosphate synthase (ou EPSPS), une enzyme de la voie de biosynthèse des acides aminés aromatiques.

(**) En réalité 5, car l’ARN chargé de traduire en protéines dans le cytoplasme le code intranucléaire utilise une autre base U en place du T qui en est légèrement différente