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1769L’affaire Freeman sonne-t-elle, sinon le glas, au moins le début du déclin de l’influence du Lobby pro-israélien, le fameux AIPAC qui fait la loi au Congrès des Etats-Unis? C’est l’enseignement que Justin Raimondo tire de l’affaire Freeman, sur Antiwar.com le 13 mars.
La thèse est simple: pour avoir la peau de Freeman, le Lobby est sorti au grand jour, ce qui est le contraire du bon fonctionnement d’un lobby. Si l’influence se fait à découvert, ses aspects les plus insupportables sont également à découvert, – et la question se pose alors de savoir combien de temps cela est effectivement supportable.
«The nixing of Charles "Chas" Freeman from a post as head of the National Intelligence Council is not, as is commonly averred, a victory for the Israel lobby. It is, instead, a Pyrrhic victory – that is, a victory so costly that it really amounts to a defeat for them. Sure, they managed to keep out a trenchant critic of their Israel-centric and grossly distorted view of a proper American foreign policy, and, yes, they managed to smear him and put others on notice that someone with his views is radioactive, as far as a high-level job in the foreign policy establishment is concerned. And yet – and yet …
»They – the Lobby – have now been forced out in the open. “A lobby,” says Steve Rosen, the ringleader of the “get Freeman” lynch mob, “is like a night flower: it thrives in the dark and dies in the sun.” If so, then the Israel lobby is slated for oblivion, because as frenetically – and pathetically – as they tried to mask the centrality of their involvement, and as much as they tried to make this about other issues (his alleged ties to Saudi Arabia, his supposed views on China), everybody knows it was really all about Israel and Freeman's contemptuous view of the “special relationship” which requires us giving Tel Aviv a blank check, moral as well as monetary. As a foreign policy realist, he thinks we ought to put our own interests first, in the Middle East and elsewhere, not those of a foreign country, no matter how much political clout – and campaign cash – its American fifth column can muster. [...]
»The real fanatics are the Israel-firsters, who have used every subterfuge, no matter how low, to maintain their parasitic grip on the American policymaking process. The really dangerous ideologues are the Likudniks and their American amen corner who willfully distort and deform American policy into a means to empower and succor a militaristic settler colony that is increasingly anti-democratic and aggressive. The Freeman affair has exposed the Israel lobby for precisely what they are: it has flushed them out of the woodwork, and brought them in from the shadows. That in itself is a great victory, one that means much more in the longterm than anyone presently imagines.»
L’avis est intéressant pour sa valeur de référence subjective. Raimondo est un acharné anti-Lobby, dénonçant constamment l’influence d’Israël à Washington; il a plutôt tendance à la grandir qu’à la minimiser; d’où sa tendance à faire du Lobby une puissance inexpugnable... S’il juge que le Lobby a remporté une “victoire à la Pyrrhus” avec la départ de Freeman, c’est que le sentiment a un certain fondement, qu’il est sans doute partagé. Dans ce domaine de l’influence, où tout est question de perception et de communication, un tel sentiment est un événement important qui va contre la puissance du Lobby.
Il est vrai que les échos, hors des cercles directement intéressés à l’affaire, partisans ou adversaires du Lobby, ces échos vont souvent dans le sens du constat que l’affaire Freeman a plutôt ouvert un affrontement à découvert qu’elle n’a conduit à une victoire (du Lobby) sans autre conséquence. Par exemple, c’est l’avis de Richard Silverstein, du Guardian, le 11 mars: «Chas Freeman's resignation is the first skirmish in what will be a long war between the Obama administration and the Israel lobby.»; ou bien, celui de Rupert Cornwell, dans The Independent du 13 mars: «Fears over the Jewish lobby's excess influence on US foreign policy flared anew yesterday after a former diplomat and strong critic of Israel backed out of a key national intelligence post, saying his appointment by President Barack Obama had been torpedoed by a campaign of lies against him.»
Il est vrai que, dans ce court affrontement, la frénésie et l’absence de mesure du Lobby et de ses différents relais dans leurs actions contre Freeman sont apparues manifestes. D’où la perception de l’excès et de l’impudence de ces interventions, qui ont fait ressentir effectivement l’aspect grotesque et insupportable de l’influence du Lobby en général. De ce point de vue, le crédit de l’administration Obama est en jeu. C’est effectivement ce que nous observions le 11 mars, nous interrogeant nous aussi sur la possibilité que cette “victoire” du Lobby soit effectivement “à la Pyrrhus”.
Il y a une cause générale à cette éventuelle évolution, et cette cause générale joua à notre sens un rôle important dans l’excès de la réaction du Lobby. Il est manifeste aujourd’hui, avec la crise générale qui s’est installée, que la politique bushiste et israélienne droitiste de confrontation fondée sur le manichéisme des positions mélangeant l’approche des néo-conservateurs et celle du complexe militaro-industriel apparaît de plus en plus grotesque, déplacée, voire stupide et obscène. Qu’il soit réalisé ou pas, ce fait existe avec toute la puissance de la crise et il pèse sur toutes les situations, toutes les attitudes, tous les comportements. Chez ceux qui sont partie prenant de l’ancienne politique, il déclenche des réactions souvent excessives, à la mesure de leur crainte pour la viabilité de cette politique. A notre sens, cela a été le cas du Lobby, qui a réagi hystériquement à la nomination de Freeman et a ainsi effectivement perdu son avantage principal qui est l’action dissimulée. Comme Cornwell le rapporte dans The Independent, l’un des auteurs du livre qui fit scandale en 2007 (The Israel Lobby and US Foreign Policy) peut effectivement affirmer aujourd’hui que la thèse du livre est totalement confirmée : «For Stephen Walt, one of the book's authors, the Freeman row has proved the point. As he put it yesterday: “For all of you out there who may have questioned whether there was a powerful ‘Israel lobby,’ or who admitted that it existed but didn't think it had much influence, or who thought that the real problem was some supposedly all-powerful ‘Saudi lobby,’ – think again.”»
Mis en ligne le 13 mars 2009 à 11H23
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