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2953• Articles du 21 novembre 2021. • La situation de la gauche face à l’immigration, appréciée d’un oeil extrêmement critique, mais sans forcer le trait tant la “trahison” de ses idéaux par la gauche est chose évidente. • Mise en perspective de cette évolution, qui conduit la gauche à être un des plus utiles « idiots utiles de la globalisation », alors qu’elle était, dans les années 2000, et souvent au côté d’une droite anti-impérialiste, l’adversaire le plus déterminé du Système. • Contributions de dedefensa.org et Jean-Philippe Mallé (interview de RT-France).
Ce qu’il y a de plus indécent, disons de plus obscène, ou finalement de plus “pépère” dans la trahison de la gauche, c’est l’impunité de conscience qu’elle s’offre à elle-même en brandissant le poing marxiste-léniniste/wokeniste et en encaissant les gros talbins de $100-$1 000 par piles et conteneurs, que le capitalisme de l’hyper-luxe globalisé lui balance comme par hélicoptère.
(Fameuse image du président de la Fed Ben Bernanke, décidant en 2009 d’imprimer des talbins par tonnes pour lutter contre la crise, et les distribuer à foison et par dizaines de kilos, comme par hélicoptère, – d’où le fameux surnom d’“Helicopter Ben” [Bernanke]... Voyez Diallo, zieutez Traoré, oyez la cheffe-Patrisse des BLM, tout.es activistes fameusement intégré.es.)
Dans son émission régulière ‘Le désordre mondial’, l’excellente chroniqueuse de Spoutnik-français Rachel Madsen faisait le 10 novembre un commentaire politique d’introduction à une interview de l’écrivain Philippe-Joseph Salazar. Elle se demandait si nous ne sommes pas en train de vivre la confirmation voyante d’un bouleversement des clivages politiques.
Elle notait donc qu’il existe désormais un affrontement entre d’une part “les élites progressistes” et globalistes, – c’est-à-dire ce qu’on nomme désormais “la gauche”, – et d’autre part le “camp anti-establishment”. Pour notre compte, nous constatons que sa remarque conduit principalement à mettre clairement les “élites progressistes et globalistes ” (la gauche) du côté du Système. Si elle parle principalement de la situation américaniste, notre propos est bien d’étendre ce constat à l’ensemble du bloc-BAO au moins, selon les règles évidentes de la globalisation qui est complètement partie prenante.
« Barack Obama a récemment critiqué la notion de divisions idéologiques. “L’heure est grave et nous avons besoin de gens sérieux. Nous avons trop à faire pour revenir en arrière”, a déclaré l’ancien Président américain.
» “Nous essayons de nous remettre d’une pandémie mondiale qui a tué plus de 700.000 Américains et mis des millions de personnes en danger. Nous n’avons pas de temps à perdre avec de fausses guerres culturelles ou de faux scandales que les médias de droite ne colportent que pour faire monter leur audience.”
» Au cas où vous ne l’auriez pas remarqué, la classique ligne de fracture droite-gauche n’est plus le principal clivage politique au sein des sociétés occidentales. Elle a depuis été remplacée par l’opposition entre ceux qui adhèrent au discours de l’establishment sur les problèmes clefs de nos sociétés et les sceptiques qui défient cete bienpensance.
» C’est donc fort de café qu’Obama fustige maintenant les guerres culturelles qu’alimente depuis tant de temps la propagande de l’establishment qu’il propage pour son compte depuis si longtemps. Vous ne pouvez pas réciter le catéchisme mondialiste de gauche et recevoir l’onction du mouvement anti-establishment, désormais dominé par la droite politique. »
Ce qu’on nomme “la gauche” a eu une attitude variable depuis la fin de l’URSS. Une espèce de prétention à la référence hors de toute critique s’est établi dans le bloc-BAO, comme une sorte de “discours de la bienpensance”, notamment vis-à-vis des événements internationaux qui, à notre sens, sont les moteurs des principales évolutions intérieures, sociétales, etc., justement dans la mesure où ils se sont élargis à des matières sociétales en même temps que les conflits prenaient une forme très variée (“hybride”) où justement entrent en ligne des matières jusqu’alors étrangères aux conflits.
La gauche a certes soutenu en général la première guerre du Golfe sans beaucoup de mal, compte tenu de la quasi-unanimité engagée derrière ce simulacre de “guerre juste” suivant un piège tendu par les USA, – par l’ambassadrice April Gaspie à Saddam Hussein en juillet 1990 (le piège, consistant à dire à Saddam que les USA ne réagiraient pas à une invasion du Koweït, ayant été monté, semble-t-il, à l’insu de Gaspie qui aurait transmis l’information en la croyant fondée). La longue guerre civile de l’ex-Yougoslavie, terminée par l’infamie de la guerre du Kosovo, sema une grande confusion entre opposants et partisans en grand désordre par rapport aux étiquettes politiques. C’est à partir de l’“ère 9/11” que les choses se précisèrent.
Très vite, la guerre projetée contre l’Irak (printemps 2003) réussit à provoquer une synthèse qu’on jugerait, – aujourd’hui, rétrospectivement sans aucun doute, – rien moins que miraculeuse. Un immense mouvement antiguerre (en février 2003, des manifestations regroupant des dizaines de millions de personnes dans le monde) se déploya, avec en plus le soutien parallèle de gouvernements très importants (France et Allemagne) s’opposant à la guerre. La conjonction droite-gauche dans un sens complètement antiSystème dans la circonstance fut absolument remarquable. (On relira les chroniques de Justin Raimondo, libertarien d’extrême-droite aux USA et remarquable commentateur de cette période, pour prendre la mesure du phénomène. [Son site ‘Antiwar.com’ avait déjà été très actif dès la guerre du Kosovo.])
Tout cela changea avec l’arrivée de Sarkozy en France et d’Obama aux USA, – comme marques politiques symboliques de l’alignement pro-Système de nombre d’activistes progressistes, – ce changement devenant “opérationnel” avec le pseudo-‘printemps arabe’ de 2010 ; savoir, essentiellement la catastrophique aventure libyenne et surtout la longue guerre de Syrie où tous les regroupements volèrent en éclats. Plus que de “gauche” et de “droite”, l’on parlerait en effet de Système et d’antiSystème, les premiers étant décidés à détruire Assad, fût-ce au prix du triomphe de l’islamisme-Daesh et de son djihad. La confusion des étiquettes étant acquise, on découvrit la gauche et une droite particulièrement stupide mêlées pour soutenir ces incomparablement stupides guerres de déstructuration. Bien entendu, ces guerres interventionnistes conduisaient à du terrorisme en Europe et des migrations déstabilisantes ouvrant une énorme perspective intérieure à partir d’une politique étrangère affectiviste, c’est-à-dire à la fois hystérique, aveugle et incohérente.
Effectivement, la bataille, tout en gardant une nécessaire dimension extérieure, est devenue essentiellement intérieure (communautarisme, souverainisme, jusqu’au wokenisme d’aujourd’hui). Pour comprendre ce qui se passe aujourd’hui dans les crises intérieures, il est impératif de les envisager comme des productions des crises extérieures, l’ensemble donnant la Grande Crise installée à partir de 2016-2020 (Covid + wokenisme, populisme & tradition versus progressisme-sociétal & globalisation). La droite s’est finalement à peu près regroupée en antiSystème, comme le note Madsen, mais sans pour autant bien comprendre la dimension extérieure jusqu’à poursuivre dans des erreurs d’un complète inversion. La gauche, elle, a complètement basculé dans la trahison de sa fonction essentielle, comme le notait James Carden, le 7 juillet 2020 :
« Dans ses mémoires récemment publiées, ‘Circle in the Darkness’, l'auteur et journaliste Diana Johnstone rappelle qu'il y a seulement “quelques décennies, la ‘gauche’ était considérée comme le centre de l’opposition à l'impérialisme et le champion du droit des peuples à l’autodétermination”.
» Diana Johnstone fait partie d'une lignée distinguée d'écrivains américains expatriés qui, peut-être en raison de l’objectivité conférée par la distance, voyaient leur pays plus clairement que nombre de leurs contemporains restés aux États-Unis. Parmi les membres de ce club figurent William Pfaff, qui a écrit depuis Paris pendant de nombreuses années, et Patrick Lawrence, correspondant de longue date en Asie. Johnstone, basé à Paris, apporte une clarté morale aux questions de guerre et de paix qui est, hélas, trop souvent absente de la plupart des écrits contemporains sur les affaires étrangères. Son absence quasi-totale au sein de la gauche durant les années Trump devrait donner lieu à une réflexion et à une inquiétude. »
Du côté français, comme exemple parallèle de cette trahison de la gauche “Antiwar” mais sans aucunement la dignité si intelligente d’un Pfaff ou d’une Johnstone sans nul goût pour la trahison, nous avons Mélenchon, ou pépère-Mélenchon. Nommons-le ainsi puisqu’après tout il s’agit d’une trahison-pépère, c’est-à-dire très confortablement installée dans son idéologie primaire, radicale et aguicheuse (le “camp du Bien”, quoi), de la gauche par elle-même. Mélenchon garde une belle vision de politique extérieure qui ne lui sert pratiquement à rien puisque, dans sa politique intérieure, il en est là, au milieu sinon en tête (la morale porte beau) de la trahison de la gauche dans son soutien enthousiaste même si non-affichée (on a ses pudeurs) au capitalisme globalisé que projettent les bandes américanistes :
« Ainsi se conclut pour le temps présent l’affligeante histoire de l’ex-trotskiste, par définition spécialiste de l’“entrisme”, victime de cette même tactique de la part des minoritaires indigénistes/wokenistes, et par conséquent tout cela nous menant à la belle trouvaille de la “créoalisation”.
» Mélenchon sera conduit à boire le calice jusqu’à la lie en s’imaginant que c’est un grand cru, lorsqu’il verra confirmés ses soupçons sur l’une des origines et dans tous les cas un des moteurs puissants de ces mouvements. Assa Traoré, Rokhaya Diallo et toute la compagnie sont des compagnes directes de la Fondation Obama, qui les finance, leur fournit des postes de prestige et ainsi de suite. “Elle est très intelligente ou très bien conseillée, elle répond exactement à ce que les Américains attendent. Ils doivent être très contents d’elle”, dit François-Bernard Huyghe de Assa Traoré. »
Avec le texte ci-dessous, nous passons à un aspect particulier de cette vaste fresque où il est impératif de mêler événements extérieurs et événements intérieurs pour y vraiment comprendre quelque chose, et parce que ces deux politiques forment un tout. Ainsi notera-t-on que le fameux rapport de l’Institut ‘Terra Nova’ cité dans ce texte, qui servit de feuille de route au changement complet d’orientation de la gauche en France, est de 2011, en même temps que démarrait le ‘printemps arabe’ et la guerre en Syrie qui servirent d’exercice pratique extérieur et de producteur de catastrophes [migration, etc.] pour ce tournant : en plus d’être de la “chair à canon”, les victimes de ces conflits furent de la “chair à idéologie” pour la gauche hyper-progressiste et si contente de l’être.
Il s’agit d’une interview de L'ex-député socialiste Jean-Philippe Mallé sur l’attitude de la gauche vis-à-vis de l’immigration, – Mallé ainsi présenté : « Vice-président d'Oser la France (fondé par le député Les Républicains Julien Aubert), ce gaulliste de gauche dresse un constat sans concession sur son ancien camp politique. » Ce texte, paru le 19 novembre 2021 sur RT-France, a comme titre initial : « Immigration : “La gauche a désormais une haine contre l’idée de nation” ».
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RT France : « Les candidats Fabien Roussel et Arnaud Montebourg ont essayé d'aborder le sujet de l'immigration lors de leur campagne respective sans en faire un sujet tabou. En réponse, une grande partie de la gauche les a attaqués, de La France insoumise jusqu'aux socialistes en passant par les écologistes. Que révèle selon vous cette levée de boucliers? »
Jean-Philippe Mallé : « Cela révèle le fait que la gauche est dans une forme de déni de la réalité nationale. Je l’ai vécu au sein du Parti socialiste. Au sein de La France insoumise et des écologistes c’est au fond la même chose. Majoritairement à gauche, il y a une défiance vis-à-vis de la nation. Historiquement, la gauche a pourtant porté – depuis la Révolution française en particulier – l’idée de nation comme construction politique, vue comme un idéal universaliste. Elle a désormais abandonné le triptyque Nation-Etat-République, source d’émancipation, au profit d’autres choses, d’autres objectifs. »
RT France : « Quels sont pour vous ces objectifs ? »
Jean-Philippe Mallé : « Il suffit de lire la note désormais très connue de Terra Nova [un think tank influent proche du Parti socialiste], qui en 2011 a marqué un tournant. La gauche était alors dominée par le Parti socialiste. Terra nova a fait le constat que les classes populaires et les classes moyennes inférieures ne votaient plus pour la gauche. Pour Terra Nova, elle devait donc se lancer dans d’autres combats, basés sur des revendications minoritaires par segment. C’est le marketing appliqué à la politique. Et c’est donc tout ce que vous savez : le combat pour les minorités et orientations sexuelles, les immigrés, les communautarismes...
Lorsqu’Arnaud Montebourg a fait cette proposition de bloquer les transferts de fonds privés [pour les pays étrangers non coopératifs] ou lorsque d’autres politiques font des propositions comme la suppression du droit du sol... il ne s’agit pas d’interdire totalement l’immigration ou d’aller vers une immigration zéro. Il s’agit de réguler l’immigration. Sauf que lorsqu’on aborde ces questions, la gauche pousse des cris d’orfraie, parce que le communautarisme devient sa clientèle électorale. »
RT France : « Vous sentez-vous très éloigné de cette gauche, vous, ancien élu socialiste ? »
Jean-Philippe Mallé : « La gauche d'aujourd'hui, ce sont les idiots utiles de la globalisation. Même si elle a toujours eu une dimension d'émancipation individuelle, elle avait, dans l'histoire, d'abord une ambition collective à travers la nation ou la lutte des classes. Désormais c’est l’individualisme XXL, avec les revendications des droits de l’individu, de la communauté, de la minorité. C’est tout ce qu’on appelle la gauche woke.
Cela n’est que le revers de la médaille de la globalisation. On peut l'illustrer avec Assa Traoré et ses chaussures Louboutin. Le marché mondialisé ne veut pas de frontières et de cultures nationales.
J’ai plus de respect pour les anciens militants communistes ouvriers des années 80 qui avaient bien compris qu’une immigration non régulée, cela pouvait peser sur le coût du travail en France. Et c’était très clairement dit. »
RT France : « Oui, Georges Marchais durant sa campagne présidentielle de 1981 notamment… »
Jean-Philippe Mallé : « Bien sûr. Donc, j’ai plus de respect pour ce Parti communiste que pour la gauche actuelle qui se drape d’humanisme et des droits de l’homme, mais qui fait beaucoup de tort aux classes populaires en France. Car l'immigration pèse sur le coût du travail. Les classes populaires le voient bien. Si le Rassemblement national et Eric Zemmour sont à ce niveau, la gauche en est responsable et coupable. C’est son déni de réalité du fait que, pour elle, il n’y a plus de frontière, plus de nation... il n’y a plus de peuple. Mais les Français, notamment les plus modestes et fragiles, ont bien compris qu’il n’y aura pas de débouché social, hors de la nation. »
RT France : « Selon vous, les électeurs de gauche ont-ils massivement glissé chez Marine Le Pen et Eric Zemmour ? »
Jean-Philippe Mallé : « Surtout Marine Le Pen... Et on les comprend. On se retrouve dans cette situation où l'ensemble de la gauche réuni aujourd’hui est à 25%. Et elle ne se remet même pas en question. C’est assez fascinant.
Aussi, quand quelqu’un comme l'écologiste Emmanuelle Cosse – qui a été ministre sous François Hollande – déclare qu’il faut dissoudre l’État-nation, c’est totalement irresponsable. Si vous défaites l’architecture “Nation, État, République”, que reste-t-il ? Il reste des clans, des tribus, des communautés et l’individu. C’est ce que nous a préparé la gauche. »
RT France : « Pour vous, le tournant idéologique date véritablement et seulement de 2011 avec la note de Terra Nova ? »
Jean-Philippe Mallé : « Structurellement, on peut remonter aux années 60, particulièrement la date symbolique de 1968, avec la montée du consumérisme, de l’individualisme, avec la remise en cause des grandes structures verticales comme l’Etat mais aussi le Parti communiste, tout comme l’Église catholique. Tout cela au profit d’une atomisation de la société. On est passé d’une société holiste à une société individualiste.
Néanmoins, 2011, sur le plan du champ politique de la gauche et du Parti socialiste, c’est une date importante. En effet, avec la note de Terra Nova, désormais, tout cela est écrit, conceptualisé, théorisé, écrit noir sur blanc. »
RT France : « A vous écouter, la gauche semble avoir arrêté de réfléchir sur l’immigration. Cela a-t-il eu une conséquence sur sa réflexion à propos de la nation ? »
Jean-Philippe Mallé : « Pour la gauche, l’immigration ne mérite même pas d’être pensée car elle a désormais une haine contre l’idée de nation. Elle ne veut pas voir les conséquences sur les communautarismes, sur le fait qu’on n’arrive pas à assimiler. La nation est devenue leur ennemi.
Il y a quelques mois, un homme d'une gauche devenue ultra-minoritaire, Didier Leschi [directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration], a fait une interview retentissante et juste dont le titre était : “Une hospitalité pour tous est une hospitalité pour personne.” Tous ces gens de gauche devenus majoritaires, si humanistes, si attachés à accueillir tout le monde, ils ne mesurent pas leurs échecs sur les politiques d’intégration et même d’assimilation. La nation est devenue leur ennemi.
En conséquence, la gauche a abandonné l’universalisme républicain. Beaucoup d’intellectuels ont pesé autrefois sur elle comme Jacques Julliard. Il suffit de lire ses éditos d'aujourd'hui. Comme d'autres, cet intellectuel de la CFDT et de la deuxième gauche ne se reconnaît plus dans la gauche d’aujourd’hui. Celle-ci ne parle plus que de races, de communautés.
La situation de la gauche est catastrophique. Mais je constate que la droite Les Républicains a aussi arrêté de réfléchir sur l'immigration et la nation. On peut même remonter au RPR de Jacques Chirac qui a “dé-gaullisé” ce parti. Un phénomène qui s'est poursuivi sous Nicolas Sarkozy. »
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