La très-riche Dream Team de USA-2020

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La très-riche Dream Team de USA-2020

Qui l’eut cru ? Tout le monde, sans doute : on ne pouvait imaginer les présidentielles USA-2020 sans qu’à un moment ou l’autre ne pointe le sourire engageant de la Lady McBeth du “D.C.-la-folle” de USA-2016. C’est chose faite. A côté des hypothèses et supputations sans nombre, voici qu’une nouvelle semi-sérieuse, un peu FakeNewsistemais tout de même  à demi prise au sérieux, apparaît dans les cercles prétendants de USA-2020. Comme cela vient de la vedette dissimulée mais écrasante du showdes primaires démocrates, – Michael dit-“Mini-Mike” Bloomberg, ex-maire de New York et $61 milliards de fortune personnelle, – il est temps d’imposer un peu de sérieux aux oreilles du chroniqueur.

« Jason Schechter, directeur de la communication de la campagne Bloomberg, a déclaré au réseau CNBC : “Nous nous concentrons actuellement sur les primaires et le débat, pas sur les spéculations concernant le choix d’un[e] vice-président[e]”. Un porte-parole de Clinton n'a pas répondu immédiatement à une demande de commentaires. »

Cette précision est extraite d’un texte de CNBC qui nous donne par ailleurs quelques précisions concernant le scoop duDrudge Report, selon lequel Bloomberg, candidat présumé et ultra-riche, favori du DeepState, de l’establishmentet des 1% pour être le candidat démocrate, aurait demandé à/choisi Hillary Clinton pour la candidature à la vice-présidence. Comme on le remarque bien entendu, le directeur de la communication de la campagne Bloomberg se garde bien de démentir la révélation du Drudge Report ; il botte en touche la patate chaude, ce qui pour beaucoup vaut quasiment confirmation im-pli-ci-te.

« Le candidat à la présidence Mike Bloomberg envisage d'engager Hillary Clinton comme colistière pour la vice-présidence après un sondage interne positif sur le jumelage potentiel, selon le Drudge Report, qui a cité des sources proches de la campagne de Bloomberg.
» Selon Drudge, dans un tel partenariat, Bloomberg changerait sa résidence officielle de New York pour le Colorado ou la Floride. La Constitution suggère qu'il peut y avoir des limitations dans le cas où les deux membres d'un scrutin présidentiel résident dans le même État. »

Alors, vrai ou faux ? La campagne USA-2020 étant ce qu’elle est, et “D.C.-la-folle” toujours aussi fou, on admettra que tout est possible et qu’un retour d’Hillary, – virée par la porte, revenant par la fenêtre, – est vraiment du domaine des possibilités. Il n’est pas infâme ni déraisonnable de spéculer à ce propos, et c’est même recommandé.

Dans tous les cas, cela permet au moins de situer Bloomberg, le personnage, le rôle qu’il peut prétendre jouer. Bloomberg, on l’a vu, est cousu de $milliards et de dollars. Il s’est déclaré officiellement candidat à la désignation démocrate mais il n’entrera dans la danse que lors du Super-Tuesdaydu 3 mars. Depuis qu’on sait qu’il a déjà mis $300 millions dans sa campagne, il inspire à la fois sérieux et respect. Dans les sondages nationaux sur le candidat démocrate contre Trump, il est brusquement monté à 30% (+12%) derrière Sanders à 32%, et devançant tous les autres qui s’épuisent face à Sanders.

Bloomberg est certainement une sorte d’archétype de l’image de l’homme politique américaniste dégénéré jusqu’à reproduire comme un clone la caricature qu’on doit en faire dans la situation où l’on se trouve, et dont Trump était déjà l’esquisse très appuyée. Bloomberg, républicain passé indépendant, bénéficie d’une métrique de base, du type ultra-simple : il a assez d’argent pour acheter la désignation démocrate à la présidentielle USA-2020.

La campagne des primaires montre le désarroi extraordinaire où l’a conduite la politique erratique des quatre dernières années de la direction démocrate, – entre l’obsession narcissique d’Hillary Clinton au départ et le développement sociétal-progressiste et gauchiste qui a suivi, choisi comme tactique (“façon de faire” pour se refaire un électorat) et devenue stratégie (“façon d’être”, ontologie modifiée façon transgenre). Bloomberg représente une “remise à niveau” dans la bonne vieille tradition, mais cette fois exposée d’une façon absolument transparente, sans aucun souci de dissimulation, – du fric à profusion et de la complète corruption du processus “démocratique” (c’est-à-dire du parti démocrate).

WSWS.org a plusieurs textes incendiaires sur Bloomberg. L’un d’euxest consacrées à Bloomberg et sa popularité chez les Africains-Américains. L’exposé de remarques jugées hyper-racistes” qu’il a faites en 2015, et qui viennent d’être révélées par une fuite inamicale, et la façon qu’il a de sauver la mise, en sortant toute tranquillité ses cartes bancaires, valent d’être détaillés. On sera édifié, aussi bien sur Bloomberg que sur le DNC démocrate, que sur les élus africains-américains démocrates du Caucusau Congrès, ainsi que d’autres personnalités de la même diversité... Par les temps qui courent, c’est un sujet si sensible, mais le milliardaire et le camp démocrate l’expédient avec quel brio.

« Un enregistrement audio a été publié mardi[11 février], dans lequel le candidat démocrate milliardaire à la présidence Michael Bloomberg se vante du fait que la politique du ‘stop-and-frisk’ [fouille au corps en pleine rue] qu’il a défendue en tant que maire de New York ait délibérément ciblé les jeunes des minorités.
» Dans ses commentaires ouvertement racistes, faits devant un auditoire de collègues oligarques à l’Aspen Institute en 2015, Bloomberg déclare que “95%” des meurtriers sont des jeunes gens issus de minorités.
» “Vous pouvez simplement prendre une description, la photocopier et la distribuer à tous les flics... C'est vrai à New York, c'est vrai dans pratiquement toutes les villes”, dit-il. Pour faire baisser le taux de criminalité, il est donc nécessaire, conclut Bloomberg, de “mettre beaucoup de flics là où se trouve le crime, c'est-à-dire dans les quartiers où vivent les minorités.”
» Il ajoute que la meilleure façon de “retirer les armes des mains des jeunes” est de “les plaquer contre un mur et de les fouiller”.
» Ces remarques ne sont guère différentes des vues fascisantes du président Donald Trump, qui a conseillé à la police de ne pas être “trop gentille avec les suspects” lors de leur arrestation.
» La tactique de ‘stop-and-frisk’ permet aux officiers de la police de New York d'arrêter toute personne dans la rue sans qu’elle ne soit soupçonnée d’un crime, de la fouiller et de l’interroger en public. Sous la direction de Bloomberg, les policiers en patrouille opéraient comme des gangs armés itinérants, qui ont agressé des millions de New-Yorkais de la classe ouvrière, ciblant principalement des hommes noirs et hispaniques simplement parce qu’ils marchaient dans la rue.
» Pendant le mandat de Bloomberg, le nombre de ces ‘stop-and-frisk’ est passé de 92.000 en 2002 à un pic de 685.724 en 2011. Au total, il y a eu plus de cinq millions d’interpellations de ce type pendant son mandat, qui s’est terminé en 2013. Bien qu’à un niveau très réduit, en réponse aux protestations populaires contre la politique et les poursuites judiciaires intentées au nom des victimes par l'ACLU (American Civil Liberties Union), ces fouilles au corps se poursuivent sous le maire démocrate Bill de Blasio.
» La réponse immédiate d’un certain nombre d’élus démocrates afro-américains à la révélation des propos racistes de Bloomberg n’a pas été de lui demander de se retirer de la course à la Maison Blanche, mais plutôt de soutenir l'ancien républicain et indépendant et de le promouvoir comme le seul candidat démocrate capable de battre le président Donald Trump en novembre.
» Mercredi, Bloomberg a annoncé avoir reçu le soutien de trois membres du caucus noir du Congrès : Lucy McBath, membre du Congrès pour la Géorgie, Gregory Meeks, membre du Congrès pour New York, et Stacey Plaskett, déléguée des îles Vierges américaines. Ce vote a été précédé par l'appui du membre du Congrès pour l’Illinois Bobby Rush, ancien membre des Black Panthers, qui avait soutenu la sénatrice californienne Kamala Harris jusqu’à ce qu’elle abandonne sa campagne en décembre.
» Meeks, le président du Parti démocrate du comté de Queens, co-présidera le Conseil national de direction de ‘Mike for Black America’ et dirigera les efforts de la campagne de Bloomberg pour gagner les votes des Afro-Américains. “Pour la communauté afro-américaine, il y a deux priorités : un, battre Trump, et deux, le progrès et le succès – car en effet nous admirons les gens qui réussissent”, a déclaré Meeks à City & State. Meeks a ajouté que bien qu’il n’ait pas “aimé les mots qui sont sortis” de l'enregistrement audio qui a fait l’objet d’une fuite, il a été rassuré par les récentes excuses de Bloomberg concernant le ‘stop-and-frisk’.
» Le soutien de McBath fait suite à un don de 4,5 millions de dollars pour sa candidature au Congrès en 2018, venu de Everytown, un groupe de pression pour le contrôle des armes à feu créé par Bloomberg. Mme Plaskett a noté dans son soutien que Bloomberg avait donné généreusement aux îles Vierges américaines ces dernières années et elle a promis que sa présidence apporterait “la création de richesse aux communautés de couleur”.
» Outre les représentants du Congrès, un nombre croissant de maires afro-américains, actuels et anciens, ont jeté leur dévolu sur Bloomberg, notamment Muriel Bowser (Washington, D.C.), Sylvester Turner (Houston), Michael Nutter (Philadelphie), London Breed (San Francisco), Wellington Webb (Denver), Michael Tubbs (Stockton), Lovely Warren (Rochester) et Frank Scott (Little Rock).
» L’appui d’éminents politiciens afro-américains a déjà eu l'effet escompté. Le dernier sondage Quinnipiac montre que Bloomberg s'est hissé à la deuxième place parmi les électeurs noirs aux primaires démocrates, avec 22 % de soutien par rapport aux 27 % de Joe Biden, bien qu’il ne soit pas encore apparu dans un débat.
» Qu’est-ce qui explique que ces démocrates se rallient à un candidat alors même qu’il est démasqué pour avoir des opinions racistes ? Tout autre candidat surpris à tenir des propos aussi clairement racistes serait probablement exclu de la course et aucune excuse ne suffirait à sauver sa campagne.
» Si ces personnalités prétendent parler au nom de la “communauté noire”, elles représentent en fait la classe moyenne supérieure aisée, qui n'a aucune empathie pour la classe ouvrière et les pauvres, noirs ou blancs, et qui est au mieux indifférente aux abus dont les travailleurs et les jeunes des minorités sont victimes de la part de la police. »

Cet extrait de texte est long mais il nous offre un intermède sympathique et bien significatif du “politiquement-correct” amendé pour la circonstance et de l’atmosphère régnant aujourd’hui dans les milieux démocrates, par rapport aux vertus progressistes et sociétales affichées à grand bruit. Justement, il y a là un véritable problème.

L’on comprend bien que Bloomberg, – avec ou sans Hillary, on verra bien, – apparaît comme le candidat au doigté d’or au DNC coincé entre sa pourriture courante et les vociférations quasiment “socialistes” des partisans de Sanders. Cette attitude vient de ce fait que, malgré les interventions avantageuses lors des décomptes qu’effectuent le DNC et ses affidés, il semble bien que ni le jeune “Mayor Pete” Buttigieg, ni l’un ou l’autre des concurrents-conformes sans parler du catastrophique Biden, ne semble en capacité de stopper le vieux Bernie. Ainsi Bloomberg est-il le “grand espoir riche” ou le “grand espoir blanc” du DNC face à la furie “socialiste” dont ce même DNC a lui-même allumé l’incendie, et cela dans une orgie d’intégrationnisme multiculturel de l'élite démocrate entre Caucasiens-Américains (ou WASP) et Africains-Américains, tous également corrompus selon les standards de l’américanisme déchaîné jusqu’à l’autodestruction..

« Le Parti démocrate, férocement antisocialiste et capitaliste jusqu'à l'os, voit en Bloomberg le “grand espoir riche” qui peut les sauver d'une désignation de Sanders et supprimer une vague croissante de sentiment socialiste, qui trouve une première expression limitée dans la campagne du sénateur du Vermont. Parmi eux, on trouve des responsables démocrates afro-américains, tout comme leurs homologues blancs... »

Ce “Grand Jeu” qui ne cherche même pas à se cacher d’un masque, qui ne prend pas la peine de se déguiser en simulacre, qui constitue une opération de rachat de la désignation et de l’élection à ciel ouvert, est à la fois évident et irrésistible, désespéré et somme toute risqué. Personne, au DNC, ne peut dire comment réagiraient les militants et autres électeurs si Bloomberg entrait dans la danse alors que Bernie continuerait, dans une position très favorable pour sa désignation dans ces primaires, à dénoncer les ultra-riches qui gangrènent la démocratie 

Les sondages ont l’air de dire que Bloomberg aurait de bonnes chances de s’imposer aisément, si l’on s’en tient à la forte hausse qu’il y a enregistrée ces derniers jours où l’on parle désormais ouvertement, et de sa candidature, et de sa puissance d’argent pour la mettre en évidence et étouffer les autres. A l’inverse de cette logique assez classique du Système, et conforme assez classiquement à la manière de raisonner du Système, il y a l’hypothèse que l’apparition physique et opérationnelle de Bloomberg dans la compétition pourrait provoquer une réaction de rejet en raison justement de cette évolution à ciel ouvert, et une exacerbation de la colère et de l’allant des supporteurs de Sanders et d’autres électeurs démocrates.

Il faut admettre que la corruption et l’ultra-richesse sont peu à peu devenues “officiellement” suspectes au pays de la corruption et de l’ultra-richesse, que le simulacre, – authentique celui-là, – monté par le parti démocrate contre Trump depuis quatre ans, passant par la dénonciation de sa richesse et de la politique de favorisation des riches, a fini par être pris au sérieux, presque comme une  vérité-de-situation, par nombre de démocrates. De ce point de vue très psychologique, Bloomberg n’est pas vraiment le candidat idéal, même avec ses moyens considérables.

Il y a une autre inconnue : quelle va être la réaction de Trump ? Quelle stratégie choisirait-il contre Bloomberg ? On croit en général que Trump craint plus Sanders qu’aucun autre candidat, de même qu’il pensait en 2016 que Sanders serait plus difficile à battre qu’Hillary. Mais l’inconnue est surtout intéressante au cas où Bloomberg serait désigné comme candidat démocrate : c’est alors que Trump ressortirait son mouchoir de populiste pour pouvoir mieux pleurer sur le sort du pauvre “Américain moyen” ; et même si personne n’est dupe, c’est pour le coup qu’il accentuerait la colère de la gauche du parti démocrate, jusqu’à créer une situation de rupture à l’intérieur de ce parti démocrate, qui n’interviendrait pas seulement pour l’élection, mais qui constituerait de façon bien plus large un formidable outil de division interne et du parti, et d’un pays déjà affreusement fracturé, jusqu’à faire envisager les événements décisifs dont la possibilité est dans les esprits depuis cinq ans.

 

Mis ebn ligne le 16 février 2020 à 14H05