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7133• Poutine et Xi se sont parlés hier pendant une heure trente : deux « vieux amis » qui se sont rencontrés plus de trente fois depuis 2013, qui pourtant et au-delà de cette vieille “amitié” scellent en cette année 2021 un partenariat stratégique qui va devenir l’axe du monde et peut-être la seule force capable d’arrêter la folie dans laquelle se vautre la civilisation occidentale, USA en tête, leur folie jusqu’au bout de la nuit. • Désormais, Russes et Chinois ne prennent plus une décision géopolitique d’importance sans avoir informé leur partenaire et obtenu leur approbation. • C’est beaucoup plus qu’une alliance, c’est une dynamique commune, qui est déclenchée par la pression et l’urgence du danger commun, – le danger qui, finalement, nous menace tous, nous qui sommes à la fois fous et menacés par les fous. • Ainsi, aujourd’hui et désormais, toute menace ou simulacre de l’OTAN ou des USA adressé à la Russie concerne également, directement la Chine. • Nul ne sait sur quoi va déboucher cette résolution, mais peu importe : ce qui importe c’est d’avoir atteint ce qu’on nomme en psychologie “le point de basculement”.
16 décembre 2021 – Notre copine Rachel Marsden (‘Le Désordre Mondial’) a reçu très récemment, c’est-à-dire hier 15 décembre, son ami Pépé Escobar (qui parle, comme elle, un excellent français). Elle lui a demandé ce qu’il fallait retenir de l’année 2021, dans tous les cas ce qu’il en retenait. Voici le passage qui nous intéresse...
Escobar : « ...Quoi d’autre [pour 2021] ? ... Tout ce qui est lié à la relation stratégique entre la Russie et la Chine... »
Marsden : « Mais ça, cela dure depuis longtemps... »
Escobar : « Mais justement, parce que c’est une relation stratégique qui vient de loin... »
Marsden : « Mais pourquoi cette année est-ce si important ? »
Escobar : « Justement, ils l’appellent désormais avec une terminologie extraordinaire, ils l’appellent ‘Strategic Comprehensive Partnerships’ [Partenariat Stratégique Complet/Global] ... Le mot ‘Comprehensive’, du point de vue chinois c’est très important, ça veut dire, énergie, économie, investissements, investissements militaires, échanges des données informatiques, sécurité... Tout ! Et maintenant, c’est solidifié, structuré, ; les ministres des affaires étrangères ne peuvent rien échanger sans d’abord affirmer, “notre partenariat global”, toujours plus solidifié, inextricable...
» Et c’est vrai, parce qu’ils prennent désormais leurs décisions géopolitiques en tandem, à deux... Ca veut dire... Par exemple, toutes les relations [très importantes lors des événements d’août 2021] des Russes avec le nouveau gouvernement taliban ont été décidées après une consultation avec les Chinois... »
Cette idée est retrouvée dans une récente analyse de Chas Freeman, un ancien et excellent diplomate US, de la grande et vieille école de la diplomatie américaine, quand elle existait encore... Freeman, considérant avec une ironie un peu triste le fait extraordinaire que la politique du bloc-BAO, spécialement celle des États-Unis bien sûr, avait réussi le tour de force extraordinaire de réunir la Russie et la Chine comme jamais on n’aurait pu l’imaginer ; et c’est effectivement, comme le dit Pépé, un des très-grands événements de l’année 2021 ; et c’est effectivement, comme nous nous le dirions à nous-mêmes de concert avec Freeman, une remarquable performance de la part de quasiment la seule politique extérieure des USA
« C’en est au point, confiait Freeman à un journaliste en marge d’un récent séminaire, – au point où aucun des deux ne prend une décision importante sans avoir consulté sur le fond son partenaire pour arriver à un accord avec lui, donc sans avoir son complet soutien. Les Russes ne feront rien concernant l’Ukraine sans être tombés d’accord avec les Chinois, les Chinois ne feront rien sur Taiwan sans être tombés d’accord avec les Russes. »
... C’est-à-dire que quand l’un fera quelque chose avec l’Ukraine, et l’autre avec Taïwan, ce sera un bloc de près de deux milliards d’habitants, rassemblant deux des trois plus grandes puissances du monde, et certainement les deux plus puissantes (avec Russie comme la plus puissante) du point de vue militaire, – c’est-à-dire que c’est ce bloc qui agira. Nous rendons-nous compte, nous du pathétique bloc-BAO, de ce que nous avons réussi à faire ? Dis-nous, bloc-BAO, te rends-tu compte ?! Silence assourdissant en réponse, où l’on papote plutôt à l’infini et à vau l’eau du racisme qui nous guette et du sort social et sociétal des transgenres. “Pardonnez-leur, Seigneur”, leur dirait-on, ils ne savent même pas qu’ils y sont parvenus, à être aussi parfaitement crétins dans l’usage de la bêtise...
Le colonel Lang, empruntant un commentaire du ‘Telegraph’, l’appuie de tout son poids et de toute son expérience, toujours selon le mode : “Regardez donc, les gars, ce que vous avez réussi à provoquer...” Ce commentaire concerne le sommet télé-virtuel entre Xi et Poutine, hier :
« “Pékin soutient la demande de Moscou de garanties de sécurité contraignantes selon lesquelles l’Otan ne s'étendra pas en Ukraine ou ailleurs en Europe de l'Est”, selon le Kremlin.
» Poutine s’est entretenu mercredi avec le dirigeant chinois Xi Jinping, lors d'un appel vidéo, au sujet des “menaces croissantes que font peser sur les intérêts nationaux de la Russie les États-Unis et le bloc de l'OTAN, qui déplacent constamment leurs infrastructures militaires à proximité des frontières russes”, selon un debriefing.
» En réponse, Xi a dit qu’il comprenait les préoccupations de la Russie et a “spécialement déclaré son soutien” à Moscou sur cette question, a déclaré le conseiller russe des affaires étrangères Youri Ouchakov.
» Xi a ajouté que “la Chine et la Russie doivent mener davantage d'actions conjointes pour sauvegarder plus efficacement notre sécurité et nos intérêts”, selon la chaîne de télévision publique chinoise CCTV.
» “À l'heure actuelle, certaines forces internationales s'ingèrent arbitrairement dans les affaires intérieures de la Chine et de la Russie sous couvert de démocratie et de droits de l'homme, et foulent brutalement aux pieds le droit international et les normes des relations internationales”, aurait déclaré Xi. »
Malgré la froideur covidienne des échanges via la méthodologie sanitaire de la téléconférence, l’ambiance était remarquablement chaleureuse entre les deux hommes qui se connaissent si bien (plus de 30 rencontres depuis 2013 !). La chose est mise en évidence, certes par des sources officieuses mais largement encouragées par la communication officielle. Poutine et Xi ont mis en scène une illustration humaine de l’événement dont nous parle Pépé Escobar. ‘ZeroHedge.com’ ne tarit d’aucun détail qu’on pourrait croire élogieux à ce propos, comme pour bien appuyer sur l’absurdité de la politique américaniste conduisant inéluctablement à cette entente, et exprimer indirectement une sorte de nostalgie devant cette sorte de dirigeants dont on peine à trouver l’équivalent, même lointain, dans notre civilisation pourtant si satisfaite d’elle-même. :
« Bloomberg a décrit le ton de la rencontre comme étant celui de deux dirigeants “plus proches que des alliés” : “Le président chinois Xi Jinping a salué les relations avec la Russie comme étant meilleures qu'une alliance lors d’un appel vidéo avec le président Vladimir Poutine, selon le Kremlin, alors que les deux dirigeants ont fait preuve de solidarité dans un contexte de tensions croissantes avec l'Occident”.
» Qualifiant Poutine de “vieil ami”, Xi a décrit les relations avec la Russie comme allant au-delà de celles des alliés et partenaires traditionnels, déclarant : “Une telle expression figurative reflète très précisément l'essence de ce qui se passe actuellement dans les relations entre nos deux pays.”... »
Enfin, quelques précisions sur l’environnement et la chronologie immédiate des actes des dirigeants de cette alliance, effectivement déjà bien connue comme le note Marsden, mais entrée dans une phase nouvelle et décisive comme l’affirme Escobar. Xi et Poutine se verront pour les J.O. d’hiver en Chine, sans la partie américaniste et quelques suivistes, qui boycottent à tout hasard, selon la politique du réflexe pavlovien.
« Xi a en outre salué les relations Chine-Russie comme “un véritable modèle de coopération interétatique pour le 21e siècle”, – observant que “l’étroite coordination entre la Russie et la Chine sur la scène internationale, l’approche conjointe responsable pour résoudre les problèmes mondiaux urgents, sont devenues un facteur de stabilisation dans les affaires internationales.”
» Jadis rivaux et ennemis au 20e siècle, puis “frères-ennemis”, et aujourd'hui alliés stratégiques et de plus en plus coopératifs, la Russie et la Chine semblent avoir forgé une alliance qui semblait improbable, sur la seule base de la réunion de leurs forces contre l’agression de Washington avec la politique des sanctions et la rhétorique des droits de l'homme. Les présidents Xi et Poutine se sont rencontrés plus de 30 fois depuis 2013.
» La prochaine rencontre entre les deux dirigeants aura lieu lors de la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques d'hiver de 2022. En référence indirecte au boycott diplomatique américain des jeux organisés à Pékin “Poutine a également souligné que Moscou et Pékin se sont toujours soutenus mutuellement en ce qui concerne la coopération sportive internationale, y compris la non-acceptation de toute tentative de politiser le sport ou le mouvement olympique”, selon TASS. »
Le 8 décembre, Europe1 recevait l’inamovible Soviéto-Russe de Paris, Vladimir Fédorovski, devenu Français entretemps. Fédorovski a pris ses distances avec les nouveaux pouvoirs après un cheminement au côté de Gorbatchev. Quoi qu’il en soit, il a aujourd’hui un discours bien moins critique des affaires intérieures de l’URSS puis de la Russie qu’il n’avait dans les années 1990 et suivantes. Aujourd’hui, il a rejoint le camp des évidences pour juger de la position de la Russie vis-à-vis de l’Europe et du camp occidental, notre bloc-BAO, et pour distiller une critique fondamentale du bloc que les Russes sont de plus en plus nombreux à partager, Poutine ou pas, “libéraux” ou pas, – mais Russe d’abord... Ainsi donc Fédorovski laisse-t-il, ce 8 décembre, parler au nom de la Russie des traditions qui nous manquent tant, sa femme “qui sort de la salle de bains” :
« Hier ma femme sort de la salle de bains et elle me dit : “Vladimir, nous les avons sauvés une première fois, à Stalingrad, autrement Hitler serait là... Nous les avons sauvés, puisque c’est nous, franchement, qui avons tué ce régime totalitaire... Et peut-être nous allons les sauver encore une fois mais je n’en suis pas sûre parce qu’ils se couchent devant l’islamisme et nous, nous sommes le symbole, quand même, de la défense des valeurs traditionnelles de l’Europe”... »
Et du même, toujours porte-parole de sa femme qui, décidément n’en rate pas une, de nous rapporter cette conséquence inattendue et bienvenue de la pluie de sanctions qui s’abat sur la Russie (argument que l’on trouve fort répandu du côté russe, chez des gens comme Orlov) :
« Vous savez, les Américains ont compris que les sanctions ça ne marche pas, mais elle, encore ma femme, dit que les Russes ils adorent les sanctions parce qu’ainsi la Russie peut s’occuper de ses problèmes... »
Cette parole de sagesse qui vaut pour la Russie, vaut également pour la Chine, puisqu’on voit aujourd’hui les deux pays si proches, bien au-delà de l’alliance, se mettre d’accord, via Poutine et Xi hier, pour mettre en place un système d’échange financier qui remplacera l’accès au SWIFT dont on veut priver au moins la Russie, façon-sanctions bien engtendu. Fédorovski note justement, sans aucune démonstration nécessaire, que c’est le bloc-BAO qui a jeté la Russie et la Chine dans les bras l’une de l’autre. Il aimerait bien, – vieux réflexe de “libéral” soviéto-russe, – que l’Europe comprenne que c’est de son intérêt de s’ouvrir à la Russie pour équilibrer ce rapprochement avec la Chine, mais l’on sent bien qu’il parle sans grande conviction parce qu’il a compris ce que vaut l’Europe aujourd’hui.
Poutine et Xi l’ont évidemment compris, eux aussi, et peut-être ont-ils attendu jusqu’au dernier moment des effets bienfaisants par réaction de survie comme fait un vaccin quand il marche, – un peu moins de folie progressiste et proaméricaniste, un peu plus de sagesse diplomatique, – de la crise Covid et des soubresauts du wokenisme. En vain, tout cela, alors que les absurdes zombies qui nous servent de ministres profèrent des menaces contre l’“invasion russe” de l’Ukraine en cours incessamment-sous-peu depuis 2014 (l’extraordinaire ministre macronien des affaires étrangères Le Drian, le visage gris de colère, a encore éructé dans ce sens avant-hier au bras de son ami Blinken).
Ainsi, le rassemblement entre la Chine et la Russie, qui est si aisément explicable qu’il en est évident, représente également tel que nous le percevons, comme une nouvelle importante, si l’on veut quelque chose comme on parle du “point de basculement” en psychologie. Nous parlerions presque d’une sorte de “bruit de fond” qui fait penser que, malgré l’absence d’un fait concret décisif et spectaculaire, on a la sensation d’un événement important en cours. On doit se reporter à cet égard à l’idée selon laquelle, désormais, comme de facto dirait-on (l’évidence, là aussi), les grandes décisions géopolitiques de l’un ou de l’autre, ou bien entendu des deux ensemble, se prennent en commun. A aucun moment on ne ressent l’impression d’une prise en main de l’un des deux par l’autre, mais plutôt d’une entente absolument commune, de la même substance, entre deux puissances dont on connaît bien la sensibilité pour ce qui concerne leur propre situation de souveraineté.
Plus encore, l’on ressent l’impression que ce rapprochement puissant prend un aspect à la fois décisif et pressant, là aussi sans qu’il soit nécessaire d’une procédure de communication spectaculaire (c’est dire si les américanistes le rateront, eux qui ont autant d’intuition que quelque DJ-junky en surdose de crack).
Pour évoquer une analogie pour ceux qui ont vécu l’époque, – ce qui est complètement notre cas par délégation de PhG, – on se croirait à l’aube de l’année 1984, à cette époque bizarrement quoique logiquement célébrée comme “l’année d’Orwell” et symboliquement caractérisée par une chanson dont retint plus une rime que le titre (« C’est d’quel côté la mer ? » par Didier Berbelivien) :
« C'est de quel côté la mer ? C'est de quel côté les dunes ?
» C'est de quel côté l'amour ?
» Y'a des oranges amères, ça sent drôlement la guerre
» Passez-moi mon tambour ! »
C’était aussi une époque où l’on sentait de terribles et sourds craquements, caractérisée par une tension absolument terrifiante (la crise des euromissiles, la destruction du vol Korean Airlines 007 le bien-nommé). Tout le monde à l’Ouest craignait une guerre nucléaire déclenchée plus à cause de la crise du pouvoir en URSS, balbutiant d’un octogénaire toussotant l’autre ; Mitterrand avait fameusement quoique discrètement confié à des intimes qu’il craignait une conflagration générale pour 1984. Finalement, dans un fantastique épilogue totalement imprévu, nous eûmes Gorbatchev, la glasnost et la perestroïka, enchaînant sur la désintégration du système soviétique du fait même de l’action intérieure de son nouveau et jeune secrétaire général du PCUS (et nullement du fait de la pression extérieure des soi-disant “vainqueurs“ de la Guerre Froide).
Aujourd’hui, ceux qui craignent une conflagration sont de l’autre côté, Russes et Chinois puissamment armés mais cherchant désespérément un signe de bon sens du côté du bloc-BAO pour desserrer l’étreinte de cette terrible tension, de la terrible folie irresponsable des USA affaiblis et blessés à mort mais pourtant menaçant et provocateurs dans une complète inconscience de la réalité du danger commun... Mais aussi, et ceci explique cela, Russes et Chinois parvenus à un point d’entente et de coordination de la décision de ne plus laisser aller cette attitude hystérique construite sur des simulacres, de lui fixer des “lignes rouges”...
Et ainsi Alastair Crooke écrit-il ceci, qui pourrait servir de sous-titre explicatif à la conférence télé-virtuelle de Poutine et de Xi, et à la proximité stratégique que les deux hommes ont établie entre les deux puissances :
« Ce point est essentiel : lorsque l’Occident s’exprime, il ne fait que regarder par-dessus son épaule l’impact psychique national et alentour lorsqu’il “remporte une victoire” (par exemple, en pratiquant des exercices d’attaques par des bombardiers à capacité nucléaire aussi près des frontières de la Russie qu’ils l’osent). Mais lorsque la Russie et la Chine disent “Voici notre ligne rouge”, ce n’est pas une sornette, – ils pensent vraiment ce qu’ils disent. »
« Ca sent drôlement la guerre », certes ; reste à voir sous quelle forme, par quelle voie, de quelle façon aurons-nous notre événement-Gorbatchev renversant absolument tout le sens de cette époque qui en manque si complètement.