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43016 mai 2010 — Décidément, nous ne tenons rien de nos délais, – avec la parution de cette Troisième Partie, encore en retard sur nos prévisions. C’est une grande pitié, cette absence de “politesse des rois”, et l’explication est d’une piètre banalité… La charge du travail, qui est parfois surcharge, qui doit pourtant se porter ; les ennuis de l’intendance, laquelle devrait “suivre” et se taire si l’on en croit les grands esprits, mais qui rechigne, qui traîne des pieds. Piètre banalité, vous dit-on.
C’est une rude bataille que de conduire ce site sur les voies choisies. A l’intérieur de cette bataille, le développement de La grâce de l’Histoire en parutions, partie par partie, en est une autre. C’est une bataille intellectuelle et c’est une bataille technique, encadrées par les interrogations que nous avons sur la façon de conduire à bien cette opération jusqu’à l’édition normale (le bon vieux papier) de l’ouvrage.
Comme bien souvent, également, nos attentes du point de vue des engagements d’achats en souscription de l’ouvrage ne sont pas rencontrées comme nous le voudrions, et comme nous l’attendions. Cela fait bien entendu partie des diverses difficultés que nous mentionnons plus haut. Nous engageons nos lecteurs à eux-mêmes s’engager plus nettement dans cette aventure, qui est la leur comme elle est la nôtre. C’est une expérience assez inédite pour un auteur de poursuivre et d’achever la rédaction d’une œuvre d’une telle catégorie, alors même que les premières parties ont été mises en lecture et qu’une opération de souscription est déjà engagée. D’une certaine façon, le soutien de toutes les sortes des lecteurs de dedefensa.org, y compris leurs commentaires bien entendu, alimente l’énergie et le travail qui sont des sources importantes de l’inspiration qui doit caractériser l’ouvrage.
D’un point de vue plus élargi, ajoutons que nous espérons beaucoup d’une éventuelle synergie qui se créerait, qui est déjà en train de se créer nous l’espérons, entre le développement de La grâce de l’Histoire et la série des DIALOGUES en cours entre Jean-Paul Baquiast et Philippe Grasset, à propos du livre du premier, Le paradoxe du Sapiens et, justement, de La grâce de l’Histoire. Il est évident que ces deux initiatives évoluent de concert et doivent s’influencer l’une l’autre de la façon la plus féconde possible. Pour le cas de Philippe Grasset, c’est l’évidence même comme lui-même le souligne dans plusieurs de ses textes, notamment le dernier en date (le 12 mai 2010), où il met une fois de plus en évidence combien l’hypothèse de Jean-Paul Baquiast sur les systèmes anthropotechniques lui donne une assise rationnelle particulièrement bienvenue pour l’exposé de son hypothèse centrale de La grâce de l’Histoire.
Ce dernier point nous permet de passer au principal de cette courte présentation de la mise en ligne de la Troisième Partie de
D’un certaine façon, cette Troisième Partie est déjà notablement située, justement dans ce même texte de Philippe Grasset dans la série des DIALOGUES, à cette date du 12 mai 2010. C’est ainsi que l’on sait, depuis la lecture de ce texte, que cette Partie 1919-1933 forma la base initiale du livre, et les limites modestes qui en étaient alors déterminées.
«Au départ, ce livre n’avait nulle prétention. Il était, au sens propre du mot, étriqué. Il entendait s’attacher au phénomène historique de l’observation qu’à une certaine période, – que j’identifie dans les bornes des années 1919-1933, – un vaste mouvement intellectuel européen, et surtout français, avait parfaitement identifié tous les caractères et les fondements de la crise de civilisation dont nous connaissons aujourd’hui l’explosion tempétueuse. En un sens, 1919-1933 avait mieux compris que nous les comprenons nous-mêmes les causes fondamentales de la terrible crise qui nous emporte aujourd’hui.»
Effectivement, il s’agissait alors d’offrir une analyse d’une période, entre 1919 et 1933, où l’axe majeur de la préoccupation intellectuelle en Europe et, surtout, en France, porta sur l’interrogation à propos du nouveau type de civilisation qui était en train de s’installer, notamment aux USA, avec l’apparition des USA comme acteur mondial de puissance et d’influence. On peut avancer sans beaucoup d’audace que l’essentiel des réflexions et des critiques sur cette “nouvelle civilisation” perçue en réalité, fort justement, comme une “crise de la civilisation” en général, fut écrit, commenté, discuté durant cette période, et pourrait aussi bien être publié aujourd’hui, apportant beaucoup plus que les tonnes d’ouvrages que produit en grande série notre système de la communication. Au reste, nous connaissons aujourd’hui des re-publications d’ouvrages de l’époque, pratiquement disparus, le plus fameux d’entre eux étant Le cancer américain de Arnaud Dandieu et de Robert Aron, édité en 1931 et réédité en 2008 (L’Âge d’Homme). (Il est effectivement beaucoup question de cet ouvrage dans la Troisième Partie de La grâce de l’Histoire.)
L’idée chronologique centrale qui domine cette partie, outre l’appréciation de la critique fondamentale de la crise qui y est développée, est qu’il se produisit durant l’entre deux guerres une rupture, une sorte de kidnapping de la réflexion occidentale et européenne (française) particulièrement, dans les années 1933-1934, qui fit passer l’essentiel de cette réflexion de la crise de la civilisation occidentale aux affrontements idéologiques entre fascisme, communisme et libéralisme démocratique. Nous parlons bien d’un kidnapping parce qu’ainsi la pensée passa de l’essentiel à l’accessoire, bien que cet “accessoire”-là ait provoqué et justifié des massacres et des destructions absolument épouvantables, – un “accessoire” par rapport au fondement de la crise, suffisamment perverti pour amener ces effets épouvantables, et qui devrait finalement être perçu comme une ruse du grand mouvement historique de déstructuration qu’on décrit, pour détourner l’attention de l’ennemi central. Effectivement, si la réflexion et la lutte n’avaient pas basculé dans les idéologies en 1933-1934, peut-être nous serions-nous épargnés tant de drames et de tragédies dont la gratuité et l’inutilité apparaissent aujourd’hui en pleine lumière.
Le terrain idéologique ouvrit la porte à l’activité essentielle de l’esprit moderniste, qui est l’acquisition et l’entretien constant de la bonne conscience, avec l’affrontement des morales conçues par l’esprit humain, et l’abandon, sauf en de très brèves périodes, des réflexions fondamentales sur la civilisation, son fonctionnement, ses bases fondamentales, son sens et son absence de sens. La bataille idéologique dura ainsi, d’idéologies en idéologies, jusqu’en 1989-1991, au point que nous parlons volontiers d’une “parenthèse monstrueuse”’, entre 1933-1934 et 1989-1991, au cours de laquelle la réflexion humaine fut mise en vacance sur l’essentiel pour s’attacher aux querelles idéologiques et ainsi justifier des carnages, des destructions, des tensions épouvantables, des contraintes et des investissements de l’esprit par l’influence et la propagande. Cette “parenthèse monstrueuse” représente un sommet de la tromperie de l’esprit humain par l’esprit humain, sous l’impulsion du système de l’idéal de puissance.
Bien entendu, cette période de 1919-1933 est d’abord considérée, dans La grâce de l’Histoire, du point de vue de son apport pour la réflexion sur la crise, et pour la compréhension de la crise, – la “vraie”, celle que nous affrontons aujourd’hui, la crise de la “deuxième civilisation occidentale”. Cette interrogation des années 1919-1933 se cristallise évidemment par une appréciation critique extrêmement vigoureuse, détaillée, extrêmement bien documentée, du phénomène de l’américanisme. On est très étonné de constater combien cette réflexion si avancée régressa ensuite, durant la période que nous qualifions de “parenthèse monstrueuse”, qui constitua de ce point de vue un remarquable succès du système de la communication, qui est un des deux composants, avec le système du technologisme, du système anthropotechnique qu’est le système de l’idéal de puissance constituant le cadre de contrainte suicidaire où a été enfermée notre civilisation. L’idée sous-jacente, qui soutient l’argument essentiel de l’essai, d’une force historique d’une puissance formidable en action depuis la rupture XVIIIème-XIXème siècles est bien entendu très fortement présente dans l’analyse.
Cette partie de La grâce de l’Histoire se termine par le rappel d’un événement sémantique et “sociologique”, – ou bien un “événement” de communication, – qui marque effectivement le début de l’offensive du système de communication pour étouffer la réflexion critique contre le système entamée d’une façon systématique en 1919. Il s’agit de la définition sociologique offerte en 1931 de l’“American Dream”, qui diffère totalement du “rêve américain”, tel qu’il a été évoqué dans la partie précédente, «Le “rêve américain” et vice-versa», mise en ligne le 3 avril 2010.