La Turquie appelle à l’aide

Bloc-Notes

   Forum

Il n'y a pas de commentaires associés a cet article. Vous pouvez réagir.

   Imprimer

 781

La Turquie appelle à l’aide

Lors d’une rencontre au niveau ministériel entre l’UE et la Turquie, la partie turque a demandé une aide de l’UE, financière et logistique, pour le contrôle des réfugiés syriens installés en Syrie. Il s’agit d’une dimension différente de la seule question humanitaire. Les Turcs sont inquiets du point de vue de la sécurité et de l’ordre public, notamment du point de vue du contrôle de ces réfugiés parmi lesquels se trouvent évidemment de nombreux groupes de rebelles, dont des radicaux type al Qaïda. Dans leur intervention auprès des Européens, les Turcs citent expressément ces questions d’ordre public dans les villes avoisinant les camps.

Des articles et reportages sur cet aspect de la question des réfugiés syriens en Turquie et sur la situation turque paraissent de plus en plus souvent, bien qu’on s’efforce d’en faire la moindre publicité possible. Par exemple, ce court article de la RTBF, du 18 septembre 2012 :

«Dans le vieux souk d'Antioche, des jeunes filles en robe légère croisent de vieux ottomans en costumes traditionnels et les minarets côtoient les clochers. Dans cette ville qui abrite la première Eglise d'Orient fondée par St Pierre, toutes les confessions religieuses cohabitent en harmonie. Mais le flot de réfugiés syriens qui fuient la guerre perturbe cet équilibre. En principe, les réfugiés syriens sont regroupés dans des camps fermés, le long de la frontière, mais certains, plus fortunés, arrivent à louer des appartements en ville. L'arrivée de femmes voilées de noir et d'hommes à longue barbe, contribue au malaise, comme l'explique Mehmed, étudiant en droit : “Il y a des Syriens avec une longue barbe et sans moustaches et on peut voir les gens qui achetaient des choses militaires dans les boutiques militaires.”»

Ces situations ne se limitent d’ailleurs plus aux seules provinces et villes frontières de la Syrie. Des témoignages parcellaires commencent à parvenir sur ce type de “réfugiés” “syriens” (“Syriens avec une longue barbe et sans moustaches”, selon Mehmed) à Ankara même, où certains s’implantent (achat d’appartements, etc.), suscitant une psychose naissante dans certains quartiers, par exemple pour les jeunes filles turques habillées à l’occidentale.

L’étrangeté de la situation générale turque se mesure quand le même pays se trouve confronté à des accusations, d’origine syrienne et d’autres sources, sur l’aide qu’il apporte effectivement à des incursions en Syrie de groupes armés effectivement de tendance islamiste radicaux, les mêmes “barbus sans moustaches” évidemment. (Voir par exemple le texte de Kurt Nimmo, sur Infowars.com, le 17 septembre 2012, sur l’activité d’al Qaïda et d’autres groupes du même type, en Syrie à partir de la Turquie, avec notamment une lettre du ministre syrien des affaires étrangères résumant le problème : «Syria’s Foreign Ministry has written a letter to the U.N. Security Council and Secretary-General Ban Ki-Moon accusing neighboring Turkey of allowing thousands of al-Qaeda and “Takfiri and Wahhabi terrorists” to cross the border to “kill innocent Syrians, blow up their properties and spread chaos and destruction.”»)

Le chaos de la situation générale est parfaitement substantivé par le chaos de la situation syrienne en connexion active avec celles de ses voisins, quelles que soient leurs positions. Le chaos est tel, les évènements sont si rapides, les effets des évènements sont eux-mêmes si contractés dans les évènements eux-mêmes, qu’il existe une contraction générale où s’entremêlent ces évènements et leurs effets y compris les plus contradictoires, presque simultanément. Ainsi constate-t-on la simultanéité du fameux effet blowback rendu célèbre par le langage de la CIA (parlant d’un effet négatif et inattendu pour une force qui a déclenché une action plus ou moins clandestine, plus ou moins affichée). Ainsi la Turquie expérimente-t-elle, en même temps, son action subversive, pseudo-expansionniste, contre la Syrie, et l’effet-blowback instantané de cette action.

A cause de cette rapidité évènementielle, celui qui prend l’offensive subversive peut ainsi en connaître les effets négatifs avant même que cette offensive soit menée à bien, jusqu’à des situations où il se trouve objectivement manipulé par celui qu’il croit manipuler, jusqu’à un point où il est envahi par celui qu’il croyait intrumenter pour “envahir” son voisin, jusqu’à cette occurrence extraordinaire où il se trouve en danger d’être lui-même déstabilisée avant même que celui qu’il veut déstabiliser l’ait été à son propre avantage, décisivement. On peut même envisager, sinon constater que cette contraction et cette accélération changent radicalement certaines situations fondamentales qui justifiaient le choix de départ d’une action subversive. Ainsi, les groupes islamistes, al Qaïda & Cie, pourraient-ils évoluer selon les situations qu’ils constatent, jusqu’à conclure dans telle ou telle circonstance qu’une action subversive donnée en Turquie serait plus intéressante qu’une action subversive donnée en Syrie qu’ils s’apprêtaient à lancer.

Bien entendu, cette contraction de l’histoire immédiate est infiniment facilitée par ce que nous nommons en général “le chaos”, et qui se manifeste dans la confusion souvent contradictoire des idéologies, des perceptions, des alliances, avec la multiplicité également souvent contradictoire des références (politique, religieuse, culturelle, etc.). A cet égard, le système de la communication joue, à nouveau, un rôle capital, bien plus que les facteurs géopolitiques. Cela conduit à des situations à fronts renversés, à des situations où des acteurs négligent leurs intérêts les plus fondamentaux, à des situations où des acteurs ne savent plus reconnaître leurs intérêts fondamentaux. La “perte des repères”, comme l’on dit dans les jargons sociologiques et socio-culturels, impliquent la perte de la perception de l’importance structurante des principes, avec l’amollissement et la dissolution accélérée de la politique, conséquence de telles positions politiques. Ainsi, la Turquie, pays qui s’imposait par sa force de conviction et sa politique structurante jusqu’il y a un peu plus d’un an, qui pouvait s’enorgueillir en conséquence d’une politique dite de “zéro problème avec nos voisins” et d’une position de plus en plus indépendante vis-à-vis des consignes-Système (USA, OTAN), se retrouve en complète position d’inversion ; en querelle plus ou moins ouverte avec tous ses voisins ou presque, soumise aux pressions US et de l’OTAN, faisant bon marché du principe structurant de la souveraineté (dans le cas de la Syrie), et se trouvant elle-même menacée par un effet blowback instantané dans tous ces domaines, et notamment celui de sa souveraineté.


Mis ebn ligne le 19 septembre 2012 à 05H34