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750Les Etats de l’Union se révoltent contre la loi sur les soins de santé que vient de voter la Chambre des Représentants le 21 mars. Pendant que Washington et tout l’establishment démocrate célébraient le “victoire historique” du président, les Etats commençaient à déposer plainte pour contester le caractère constitutionnel de cette loi.
Le Daily Telegraph du 24 mars 2010 expose les circonstances de cette riposte générale des Etats. Jusqu’à maintenant, 14 Etats ont pris des dispositions légales et d’autres devraient suivre. Certains envisagent de mettre en place des législations bloquant certains aspects de la loi votée par la Chambre
«“This lawsuit should put the federal government on notice that Florida will not permit the constitutional rights of our citizens and the sovereignty of our state to be ignored or disregarded,” said Florida Attorney General Bill McCollum. Mr McCollum, a Republican who is running for state governor in the upcoming election, said the federal government had no right to impose a “tax on living” by forcing people to buy insurance. […]
»The lawsuit filed in a Florida federal court calls the reform bill an “unprecedented encroachment” on state sovereignty by requiring states to spend billions on expanding health care coverage to the poor. “This is not a partisan issue,” he told reporters. “It's a question for most of us in the states of the cost it is to our people and to the rights and freedoms of the individual citizens.”
»McCollum was joined by the Republican attorneys general of Alabama, Colorado, Idaho, Michigan, Nebraska, Pennsylvania, South Carolina, South Dakota, Texas, Utah, and Washington, as well as the Democratic attorney general of Louisiana. Asked about the challenges, Democratic House Majority Leader Steny Hoyer replied: “We clearly believe that the bill's provisions are, in fact, constitutional and will be so held.”
»Virginia filed a separate suit on Tuesday asking a federal judge to invalidate the entire health care reform act because the federal government overstepped its authority in requiring people to buy health insurance. “There has never been a point in our history where the federal government has been given the authority to require citizens to buy goods or services,”Virginia Attorney General Ken Cuccinelli said in a statement.
@PAYANT La “victoire historique” d’Obama a eu lieu à Washington et a satisfait l’élite washingtonienne, d’autant qu’elle est présentée d’une façon consensuelle par un Barack Obama qui se place complètement dans une logique bipartisane même si le vote fut placé sous le signe d’une féroce opposition partisane. Dans ce cas, c’est l’esprit de la chose qui compte, comme l’expliquait Michael Tomasky que nous avons déjà cité, et c’est bien l’esprit bipartisan qui signifie la recherche de l’unité de l’establishment qui domine, et cette démarche qui ne peut que satisfaire l’estalishment. (Tomasky: «It's my bet that Obama, to the disappointment of progressives, won't take away from this fight the lesson that he needs to give up on bipartisanship once and for all. He went to the partisan mat when he had to, but his instinct is and will continue to be to try to find common ground where possible because that's how he fundamentally sees himself – as one who has spent his life bridging divides (not least within himself, given his parentage)…»)
Les républicains qui ont affronté Obama à Washington sont comptables de leurs électeurs et de diverses autres forces d’influence, et ils continueront leur bataille. Mais, sur le fond, pour le cas présent tel qu’on le présente, ils ne peuvent qu’approuver par solidarité de système cet état d’esprit d’Obama, qui reste plus que jamais centraliste et washingtonien. C’est dans ce cadre, dans cet état d’esprit régnant à Washington, qu’il faut considérer ce qu’on doit apprécier comme une véritable “révolte” des Etats qui est en train de se développer. Elle est pour l’instant majoritairement le fait d’Etats dirigés par des gouverneurs républicains, mais il y a déjà quatre Etats concernés, parmi les 14, qui ont des gouverneurs démocrates (le Colorado, le Michigan, la Pennsylvanie et le Washington) et l’un des Attorney Generals qui a déposé la plainte, celui de Louisiane, est lui-même démocrate. Cela donne une forte substance à l’affirmation que cette “révolte” des Etats est non partisane et porte légalement et politiquement sur la question de la souveraineté des Etats contre Washington, comme l’affirme l’Attorney General de Floride.
Bien entendu, le contexte est pressant, c'est celui de la crise colossale des finances publiques que connaissent la plupart des Etats de l’Union avec les menaces de faillite qui vont avec, et il met justement par ce biais le cœur du lien fondamental qui lie ces Etats au centre fédéral. Il s’agit bien de ce lien “contractuel”, dont la question de l’intervention publique au niveau des impôts et des taxes est un aspect essentiel. Washington impose, avec cette loi, des dépenses à des finances publiques qui sont exsangues. Ces Etats sont eux-mêmes exsangues, au bord de la faillite, donc dans des situations prospectives désormais encore aggravées par la loi votée par la Chambre alors que l’aide washingtonienne aux Etats a été jusqu’ici avaricieuse (on préfère aider Wall Street).
La réaction légale des Etats est extrêmement forte. Elle met en avant le fondement de la souveraineté de ces Etats. Derrière l’argutie technique, il y a l’argument historique fondamental: Washington peut-il menacer, à cause d’une loi fédérale, l’équilibre du gouvernement et de la structure publique de ces Etats? La question va au cœur des relations entre les Etats et le “centre” et pourrait conduire à un conflit fondamental, – légal d’abord, politique ensuite, dans les deux cas de l’issue du conflit, si les Etats n’ont pas satisfaction où si la loi votée par la Chambre est déclarée inconstitutionnelle. (Les plaintes vont évidemment devant la Cour Suprême.)
Outre le climat économique, il y a le climat de l’opinion publique, souvent avec le soutien des autorités; le mouvement Tea Party, les positions l’un ou l’autre gouverneur (le gouverneur du Texas ayant déjà parlé de sécession lors d’un discours enflammé en avril dernier). Les ingrédients sont d’ores et déjà présents, d’ores et déjà en ébullition, pour conduire le cas à la possibilité d’un affrontement entre les Etats de l’Union et le “centre” washingtonien. Il ne s’agira plus des démocrates contre les républicains, ce jeu affectionné par le “parti unique” de Washington, mais bien de la bataille fondamentale des USA, celle de la souveraineté, celle des Etats de l’Union qui devaient être au départ affirmées (en 1783) et qui fut notablement réduite par la Constitution définitive de 1788.
“Victoire historique” pour BHO, d’accord, – et peut-être doublement d’accord. Elle a le potentiel pour mettre le feu aux poudres du conflit fondamental des USA, celui qui n’a jamais été résolu, qui a resurgi avec la crise économique causée essentiellement par l’irresponsabilité et la corruption de Washington.
Mis en ligne le 24 mars 2010 04H29
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