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72731 janvier 2004 — Les patrons tremblent sur leurs bases. On fait le nécessaire pour les sauver, que ce soit GW Bush, qui commence à demander des comptes à ses services de renseignement, que ce soit Tony Blair, qui a été chercher le Lord de service pour le tirer d’affaire, au prix d’une relance du dégoût général pour la conduite du gouvernement pendant cette crise irakienne caractérisée par un théâtre général du mensonge.
Fort bien, — façon de parler. Car le coût est énorme, considérable.
• A Londres, des voix s’élèvent pour réclamer les mesures qui s’imposent. D’abord, une enquête sur les circonstances menant à cette guerre, puisque nous feignons tous d’écarter la vérité (nous la connaissons tous). Cette enquête devrait évidemment mener à de nouvelles investigations, un nouveau rapport peut-être, avec un autre Lord de service : si le PM Tony Blair a été “trompé” par ses SR, ce sont les SR qu’il faut faire passer sur le gril. Car, au bout du compte, si l’on veut bien admettre qu’il n’y a pas de coupables, il faut au moins trouver des responsables.
• A Washington, on sonne la retraite générale. GW commence à nous prendre à témoin : comment, on l’aurait trompé ? On va voir ce qu’on va voir. Alors, il demande des comptes. Là aussi, tout le monde sait de quoi il retourne, mais on fait comme si. L’enjeu est pourtant bien élevé : en arriver à mettre en cause les SR américains, la CIA en premier, c’est ouvrir une sacrée boîte de Pandore. Tout le monde sait bien la vérité dans cette affaire, mais il faut bien continuer à jouer la comédie. Là aussi, il nous faut des responsables. Il n’est pas sûr que les gens de la CIA, qui ont été en général contre l’intervention, qui ont bien des arguments et des documents pour le prouver, soient preneurs ...
Maintenant, laissons ce théâtre d’ombre et revenons-en au réel. Nous recommandons de lire ce texte de Jon Wolfsthal, directeur adjoint pour la non-prolifération au Carnegie Endowment for International Peace (qui s’est déjà signalé par un rapport explosif sur les non-ADM de Saddam).
Wolfsthal, qui vient de visiter l’Asie, revient avec des nouvelles alarmantes. Il semble qu’on y soit de moins en moins convaincu par les affirmations et les “preuves” washingtoniennes sur les capacités nord-coréennes :
« ...China, a key player in the six-party talks with North Korea, has now begun to express doubts about the US allegations that North Korea has an HEU program. Chinese Embassy spokesman Sun Weide says China doesn't know if North Korea has an HEU program. Now, quietly, South Korean officials are beginning to express the same doubts. Echoes of these doubts are being heard in Japan. Even if these countries have other reasons for differing with the US, the failure to find WMD in Iraq gives them an excuse to question the reliability of American intelligence. In turn, this makes holding a united front against North Korea more difficult for the Bush administration.
» US failure to share the location of any HEU facilities in North Korea, and its apparent refusal to share evidence of the program with South Korea, compounds doubts.
» If the US was wrong — or manipulated intelligence — in Iraq, how can it be completely trusted in North Korea? »
C’est un sentiment qui commence à se répandre et se résume par ce constat : la puissance américaine n’est pas du tout ce qu’on (les Américains) nous disait qu’elle était. Même un ministre de la défense belge, André Flahaut, se permet de juger l’armée américaine « inefficace », dans une interview à l’hebdomadaire Humo. Qui, aujourd’hui, se battrait pour lui donner tort ?
Alors, si l’on ouvre complètement la boîte de Pandore, en faisant des SR anglo-saxons les responsables de la colossale erreur irakienne, en plus des avatars et des erreurs sur le terrain, en plus du spectacle d’une armée conduite à ses limites par ce conflit ? C’est l’un des facteurs-clé du système de puissance anglo-saxon, la puissance militaire (dont la capacité de renseignement fait partie, évidemment) qui menace de s’effondrer. Mais l’alternative est qu’ils (les patrons, PM et président) ont manipulé l’information, et cela, c’est impossible, — avec les élections qui arrivent.
Alors : menteurs ou incompétents ? C’est une piètre alternative pour la plus grande puissance qu’ait connue notre histoire du monde.