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328Il y a depuis quelques semaines une activité marquée des cartels mexicains de la drogue sur la frontière avec l’Arizona et en Arizona même. On peut se reporter à ce propos à notre Ouverture libre du 19 juin 2010. D’autres nouvelles sont publiées à ce sujet.
• Le site WarNews signale le 22 juin 2010 plusieurs de ces informations, dont une de CNN, le 21 juin 2010, concernant des menaces des cartels contre les divers agents de services de sécurité US qui tenteraient d’entraver leurs voies de pénétration en Arizona.
• Le site de Fox.News du 22 juin 2010 confirme la nouvelle donnée par un journal local (relayée sur Ouverture libre du 19 juin 2010). Il s’agit de l’installation de “points d’appui” ou “bases” permanentes des cartels en Arizona.
@PAYANT Ce qui est caractéristique, évidemment, c’est le choix de l’objectif des pressions qui sont actuellement mises en évidences de la part des cartels, contre les USA, – dans le cas qui nous intéresse, contre l’Etat de l’Arizona, dont on sait qu’il se trouve lancé dans une querelle contre le “centre” washingtonien à propos de la loi contre l’immigration illégale que l’Etat vient de promulguer. Est-ce un hasard des frontières ? On a quelque peine à le croire complètement.
L’occurrence est d’autant plus remarquable qu’en même temps que fleurissent ces nouvelles sur la pénétration et la pression des cartels sur l’Etat de l’Arizona, le gouvernement mexicain, – puisqu’il s’avère que la chose existe, – concrétise sa querelle avec l’Arizona. Le président Calderon est l’un des opposants les plus stridents à la loi anti-immigration de l’Etat de l’Arizona, ce qui représente un cas intéressant d’ingérence puisque cette loi ne concerne après tout que l’Etat de l’Arizona et éventuellement le gouvernement fédéral des USA. Ce n’est pas l’avis de Calderon, qui vient de porter plainte contre l’Etat de l’Arizona (voir ce 23 juin 2010, sur AP relayé par Google.News).
Ces diverses nouvelles conduisent au constat que “le Mexique” (cartels et gouvernement) exerce objectivement des pressions fortes sur l’Etat du Colorado, comme s’il s’agissait du “maillon faible” dans la succession d’Etats des USA formant la frontière avec le Mexique. Les buts poursuivis peuvent évidemment n'être pas similaires, ni même coordonnés bien sûr, mais le résultat objectif est une accentuation de la tension autour de l’Etat de l’Arizona dans l’ensemble américaniste, aussi bien pour les questions des droits et prérogatives des Etats (le droit ou non d’avoir sa propre loi anti-immigration illégale), que pour la question de l’aspect “humanitaire” contestée de la loi anti-immigration illégale, que pour la question de sécurité au sens le plus large (immigration illégale, trafic de drogue, insécurité due à l’activité des cartels) des relations des USA et du Mexique sur leur frontière commune.
Cette question de la situation de l’Etat de l’Arizona est bien entendu loin d’être centrale à Washington, aujourd’hui, avec les crises majeures de l’“oil spill” du Golfe, de l’Afghanistan avec “l’affaire McChrystal”, de la situation économique et sociale générale, etc. Un aspect de cette question est la promesse d’Obama de l’envoi de 1.200 hommes de la Garde Nationale sur la frontière entre l’Etat du Colorado et le Mexique, qui semble être difficile à tenir. D’autre part se poserait la question, si ces 1.200 hommes étaient effectivement envoyés, de leur déploiement dans une zone si contestée, et dont certaines parties sont hors du contrôle des autorités américanistes, ou de Washington, ou de l’Etat lui-même. Une querelle existe d’ores et déjà entre les forces de sécurité de l’Etat de l’Arizona et les forces de sécurité fédérales qui y sont déjà déployées (4.000 agents de différentes agences, du contrôle des frontières à la DEA anti-drogue), qui dépendent du département de la sécurité intérieure (Home Security Department). La querelle porte sur la forme du déploiement, les forces de sécurité de l’Arizona estimant que les forces du HSD sont concentrées à la frontière, ce qui permet aux cartels d’utiliser les zones frontières les plus faiblement protégées, de les percer pour pénétrer sur un territoire de l’Arizona sans surveillance sérieuse, et d’y installer des “points d’appui”. Le HSD a répliqué qu’il appliquait au contraire une stratégie de défense en profondeur, justement pour éviter ces implantations, mais les dernières révélations semblent montrer que les cartels sont réellement installés.
L’Arizona pose un cas très particulier. D’une part, ses initiatives juridiques le placent en conflit avec le pouvoir fédéral central, ce qui envenime la coopération pour tenter d’assurer la sécurité de l’Etat. D’autre part, cette sécurité semble de moins en moins porter sur la protection des frontières, et de plus en plus sur l’éventualité ou pas d’une “reconquête” de zones qui seraient actuellement aux mains des cartels. Les deux facteurs illustrent deux des plus graves problèmes intérieurs qui menacent aujourd’hui la cohésion des USA, à l’heure de l’affaiblissement du pouvoir central à Washington.
Mis en ligne le 23 juin 2010 à 20H02
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