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639Nous avons vu hier le documentaire-fiction du Britannique Gabriel Range, Death of a President, sur la chaîne belge Be TV. Il s’agit d’une fiction sur l’assassinat du président des Etats-Unis (POTUS, ou President Of The United States) George Walker Bush, le 19 octobre 2007 à Chicago. Le document a été réalisé en 2006, avec des documents d’archives, des montages, mélange de personnages vrais dans d’autres situations et d’acteurs. En général, l’accueil aux USA a été gêné ou indigné, et un boycott partiel a été organisé. Après avoir reçu un prix au festival de Toronto en septembre 2006, le document a été présenté plutôt d’une façon erratique et, parfois, avec une certaine gêne.
Certaines réactions connues devant ce film nous montrent plus la réalité de la crise psychologique américaniste que quoi que ce soit d’autre. Ainsi de cette réaction d’Hillary Clinton («I think it's despicable; I've never seen a movie so horrible in my life. I think it's absolutely outrageous. I mean, sure most people don't like Bush, but this is beyond bad. It's evil. That anyone would even attempt to profit on such a horrible scenario makes me sick»), – suivie de l’affirmation jamais démentie par elle qu’elle n’avait pas vu le film, – la chose speaks volume, comme disent les Britanniques. Justement, cette réaction d’Hillary, qui nous dit tout du pourrissement de sa psychologie par le conformisme US, nous conduit à ce qu’il y a de meilleur dans ce document (outre la prouesse technique du montage et du découpage de l’attentat): la description implicite du conformisme US qui accompagne l’enquête, conduit à des pressions sur les enquêteurs, transforme les preuves, bref conduit à monter un cas (celui de l’assassin évidemment innocent) qui soit conforme à la “narrative” US et pas à la réalité US.
Le document tend à faire de GW Bush un martyr, ont dit certains critiques. C’est exact et c’est assez justement observé, et cela ne nous paraît pas devoir être critiqué: il est probable que ce serait le cas… Ou bien, nous dirions: que ce serait le cas, lorsque le film fut réalisé (en 2006), peut-être moins sûrement aujourd’hui. Peut-être un tel assassinat aujourd’hui (19 octobre 2007) ouvrirait-il une période de grand trouble, tant l’exacerbation aux USA de la politique en cours est grande. Mais ce n’est qu’un “peut-être” minoritaire, et la description implicite d’une réaction patriotique, de la fabrication presque inconsciente (le conformisme du “narrative”) d’un assassin conforme (un Américain d’origine syrienne, soupçonné de liens avec Al Qaïda puis présenté ouvertement comme tel), est beaucoup plus probable. (Le vrai assassin est un Noir, un ancien militaire, père désespéré de deux fils soldats en Irak dont l’un a été tué, qui se suicide aussitôt après l’assassinat.)
Là où, peut-être (encore un “peut-être”), le film fait la partie trop belle à GW Bush, c'est de montrer le président, avant sa mort, un peu trop conscient de l’opposition, de l’exacerbation que soulève sa politique. Nous ne pensons pas que Bush soit aussi conscient de la chose. Sa force se trouve dans son travers psychologique de vivre complètement dans sa “bulle”, à la fois par le dispositif qui l’y maintient et par sa propre psychologie.
Le vrai sujet politique, qui est évoqué peut-être trop rapidement, n’est-il pas celui-ci : Dick Cheney devenant le 44ème POTUS? De ce point de vue, le film est plus faible. Il décrit la tentative rapide de Cheney de faire endosser le crime à la Syrie, avec attaque à la clef, tentative finalement abandonnée devant les réactions du Congrès. (Par contre, l’assassinat permet à Cheney de resserrer encore le dispositif policier aux USA, avec une loi “Patriot-3”.) Au contraire, il nous semble qu’un tel événement nous donnerait un Cheney président enchaînant directement sur une attaque contre la Syrie, devant un Congrès au garde-à-vous. Mais, aujourd’hui, cela est dépassé : ce ne serait plus la Syrie bien sûr, ce serait l’Iran.
Dans tous les cas, une vision de ce film n’est pas du temps perdu.
Mis en ligne le 19 octobre 2007 à 08H33
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