L’avenir du monde : les scientifiques lient la menace nucléaire et la crise climatique

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Mercredi avait lieu à la Royal Society de Londres, en grand apparat, une conférence organisée par le Bulletin of Atomic Scientists pour annoncer la décision de son conseil de direction de rapprocher la fameuse aiguille de minuit — de minuit moins sept à minuit moins cinq. (La “Doomsday Clock”, ou horloge de l’Apocalypse, mesure depuis 1947 l’urgence du danger d’une possible guerre nucléaire, en le figurant par l’anvancement ou le recul de la grande aiguille des minutes vers minuit. Hier, il a été décidé de signaler que, durant les cinq dernières années, le danger s’était notablement accru.)

Une présentation publique a été faite par Stephen Hawkins, le très fameux cosmologiste de Cambridge. Son discours a été centré sur la conjonction de deux terribles menaces : la crise climatique et la renaissance de la menace nucléaire.

Quelques mots de The Independent d’hier

«Professor Hawking said that we stand on the precipice of a second nuclear age and a period of exceptional climate change, both of which could destroy the planet as we know it.

»He was speaking at the Royal Society in London yesterday at a conference organised by the Bulletin of Atomic Scientists which has decided to move the minute hand of its ''Doomsday Clock'' forward to five minutes to midnight to reflect the increased dangers faced by the world.

(…)

»“As we stand at the brink of a second nuclear age and a period of unprecedented climate change, scientists have a special responsibility, once again, to inform the public and to advise leaders about the perils that humanity faces,” Professor Hawking said. “As scientists, we understand the dangers of nuclear weapons and their devastating effects, and we are learning how human activities and technologies are affecting climate systems in ways that may forever change life on Earth.

»“As citizens of the world, we have a duty to share that knowledge. We have a duty, as well, to alert the public to the unnecessary risks that we live with every day, and to the perils we foresee if governments and societies do not take action now to render nuclear weapons obsolete and to prevent further climate change.

»“We are here today to outline the results of the Bulletin's recent deliberations and to warn the public about the deteriorating state of world and planetary affairs by moving the hand of the clock,” Professor Hawking said.»

Lord Rees of Ludlow, président de the Royal Society, a parlé en même temps que Hawkins pour affirmer que l’effet des activités humaines sur la biosphère, le climat et les océans est sans précédent. Le savant appelle ces menaces nées de la dégradation de l’environnement des “menaces sans ennemis” (par opposition aux “menaces” d’ordre politique et idéologique, de nature humaine directement identifiées). Il considère qu’elles doivent être considérées comme une priorité politique au moins aussi forte que les menaces (affrontements nucléaires) que connut l’humanité durant la Guerre froide. Lord Rees observe que les technologies au XXIème siècle «could offer immense opportunities to everyone but it would also present new threats that were more diverse and more intractable than those posed by nuclear weapons».

Deux points fondamentaux doivent être soulignés à l’occasion de cette présentation de cette mise à l’heure de la “Doomsday Clock”.

• Le premier est la “politisation” accélérée de la crise climatique, — dans le bon sens du terme. La crise climatique est en train de prendre une place fondamentale, aussi importante que les matières politiques et idéologiques les plus fondamentales. Le fait qu’elle soit considérée de la même façon que le danger d’affrontement nucléaire, qui est un événement hautement politique, est significatif.

• La mobilisation évidente et générale du monde scientifique devrait susciter et s’accompagner d’une évolution psychologique et intellectuelle essentielle. L’optimisme scientiste, qui est la base du progrès, est en train de se transformer, devant les conséquences du progrès technologique, en pessimisme. Paradoxalement par rapport à l’idée optimiste qui s’attache à la science selon la vision moderniste du monde, c’est un “pessimisme scientiste” qui est en train de naître. Une telle évolution intellectuelle serait une véritable “contre-révolution copernicienne”, c’est-à-dire une orientation radicalement différente jusqu’à l’opposé de celle des quatre siècles qui ont précédé (à part le précédent de la bombe atomique qui, pendant cinq ans, de 1945- 1950, avait provoqué une même vague de “pessimisme scientiste”, qui fut prestement étouffée).


Mis en ligne le 19 janvier 2007 à 08H38