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17 avril 2003 — Il y a deux jours, nous publiions un Faits & Commentaires concernant une déclaration de Lawrence Eagleburger, où l’ancien secrétaire d’État de Bush-père estimait qu’une attaque unilatérale des USA contre la Syrie devrait conduire à la destitution du président, Bush-fils. Depuis, nous avons reçu la transcription complète de la déclaration de Eagleburger, en fait la transcription complète de sa réponse à la question sur ce sujet qu’on lui posait dans une interview de la BBC.
Voici cette réponse :
Lawrence Eagleburger, laughing : « I can only tell you….maybe I’ll be made of fool of when I say this but I can’t even imagine that and I’ve only recently heard somebody else say that this is a possibility. I just don’t think that anybody who says that truly understands the American people. You saw the furor that went on in this country before the President got sufficient support to do this. We’re just not built like that. Whether anybody is prepared to admit it or not, this is still a democracy and public opinion and the public still on these issues rules. If George Bush decided that he was going to turn the troops loose on Syria now, and Iran after that, he would last in office for about 15 minutes. You’re talking to somebody who frankly wishes we could knock Syria around a bit because I think they have been absolutely outrageous for years in terms of their support for terrorism. But, because I happen to believe that, doesn’t mean it’s going to happen. If President Bush were to try it now, even I would feel that he ought be impeached. You can’t get away with that sort of thing with this democracy. It’s ridiculous. »
Ce qui nous a poussé à compléter le précédent Faits & Commentaires en publiant cette réponse, c’est le ton de cette réponse. Eagleburger est catégorique, comme nous l’avions noté, et il s’agit bien d’un “message” qu’on adresse à l’administration GW Bush, et à GW lui-même. Mais il y a plus, beaucoup plus, et peut-être est-ce le plus important : l’incrédulité du ton d’Eagleburger. Il dit non seulement qu’un tel projet — l’attaque de la Syrie — se heurterait à une forte résistance, mais encore il semble dire qu’il s’agit de quelque chose de si inconcevable, de si impensable que c’en est presque risible.
Ce n’est pas du tout notre avis. Nous pensons que les événements vont, au niveau de la perception qu’on en a, à une telle rapidité qu’ils sont “hors de contrôle” et que les divers pouvoirs ne parviennent pas à en reprendre le contrôle. (Quelle rapidité ? En moins d’un mois, une guerre qui apparaît comme une promenade de santé, puis comme un bourbier type-Viet-nâm, puis comme une victoire-éclair inattendue ; la guerre même pas terminée, l’après-guerre qui semble apparaître d’abord comme un triomphe américain, puis très vite tourne en désenchantement et en désordre hostile ; là-dessus, les premières menaces contre la Syrie.)
Dans un tel climat de rapidité des choses et d’absence de contrôle sur leur développement, ce que l’establishment type-Eagleburger juge impensable peut très bien s’imposer avant qu’on y ait pensé sérieusement. La conclusion que nous voulons en tirer est que, face à ces possibles développements “impensables”, s’ils se produisent, les réactions seront d’autant plus fortes et, elles aussi, out of control, et pouvant mener à des tensions intérieures qui peuvent paraître, elles aussi, pour l’instant, complètement impensables.