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2238Le 21 mars 2014, le site Zero Hedge annonce la signature prochaine de ce qu’il nomme Holy Grail pour désigner le gigantesque accord gazier entre la Russie et la Chine, qui doit constituer parallèlement une attaque massive contre le pétrodollar. Tyler Durden place cet accord, à ce moment, comme un signe fondamental de basculement des puissances au détriment du bloc BAO.
«If it was the intent of the West to bring Russia and China together – one a natural resource (if “somewhat” corrupt) superpower and the other a fixed capital / labor output (if “somewhat” capital misallocating and credit bubbleicious) powerhouse — in the process marginalizing the dollar and encouraging Ruble and Renminbi bilateral trade, then things are surely “going according to plan.”
»For now there have been no major developments as a result of the shift in the geopolitical axis that has seen global US influence, away from the Group of 7 (most insolvent nations) of course, decline precipitously in the aftermath of the bungled Syrian intervention attempt and the bloodless Russian annexation of Crimea, but that will soon change. Because while the west is focused on day to day developments in Ukraine, and how to halt Russian expansion through appeasement (hardly a winning tactic as events in the 1930s demonstrated), Russia is once again thinking 3 steps ahead... and quite a few steps east.
»While Europe is furiously scrambling to find alternative sources of energy should Gazprom pull the plug on natgas exports to Germany and Europe (the imminent surge in Ukraine gas prices by 40% is probably the best indication of what the outcome would be), Russia is preparing the announcement of the “Holy Grail“ energy deal with none other than China, a move which would send geopolitical shockwaves around the world and bind the two nations in a commodity-backed axis. One which, as some especially on these pages, have suggested would lay the groundwork for a new joint, commodity-backed reserve currency that bypasses the dollar, something which Russia implied moments ago when its finance minister Siluanov said that Russia may regain from foreign borrowing this year. Translated: bypass western purchases of Russian debt, funded by Chinese purchases of US Treasurys, and go straight to the source.»
L’accord pourrait être signé en mai, lors du voyage de Poutine à Pékin. Il instituerait une relation structurelle fondamentale entre le principal producteur de gaz et le principal consommateur de gaz, dans le chef des relations des deux pays et en considérant leurs propres activités énergétiques. (On y ajoutera l’élément que cette année, la Chine est devenue le premier importateur de pétrole russe, dépassant l’Allemagne.) Un expert russe de la Chine, Vasily Kachine, de l’Institut Analysis of Strategies and Technologies (CAST), estime que dans de telles conditions, il est complètement absurde de parle de l’“isolement” de la Russie, – et l’on pourrait considérer au contraire que c’est le bloc BAO qui est sur la voie de l’isolement, d’autant que Durden poursuit : «Bingo. And now add bilateral trade denominated in either Rubles or Renminbi, add Iran, Iraq, India, and soon the Saudis (China's largest foreign source of crude, whose crown prince also happened to meet president Xi Jinping last week to expand trade further) and wave goodbye to the petrodollar.»
Durden fait un tour d’horizon des relations de la Russie avec les principaux pays alternatifs au bloc BAO (Chine, Inde, etc.), pour estimer que leurs relations avec la Russie sont en bonne voie de se stabiliser dans un sens positif dans la sillage du choc qu’a constitué la crise ukrainienne. Durden ajoute que des mesures de coopération hautement symboliques et très significatives sont en cours de préparation dans d’autres domaines de coopération («CAST's Kachine said the prospects of Russia delivering Sukhoi SU-35 fighter jets to China, which has been under discussion since 2010, would grow»).
« The punchline: “A strong alliance would suit both countries [Russia & China] as a counterbalance to the United States.” An alliance that would merely be an extension of current trends in close bilateral relations, including not only infrastructure investment but also military supplies... [...] To summarize: while the biggest geopolitical tectonic shift since the cold war accelerates with the inevitable firming of the “Asian axis”, the west monetizes its debt, revels in the paper wealth created from an all time high manipulated stock market while at the same time trying to explain why 6.5% unemployment is really indicative of a weak economy, blames the weather for every disappointing economic data point, and every single person is transfixed with finding a missing airplane.»
Ce qui est le plus impressionnant dans cette analyse, qui renforce des bruits et des prospectives diverses, des déclarations d’officiels russes, etc., c’est le schéma d’extension accélérée de la crise ukrainienne, – dans ce cas, passant au problème fondamental du rôle/du statut du dollar dont on sait le poids qu’il pèse dans le dispositif d’hégémonie du Système. Il s’agit de mesurer comment et à quelle vitesse cette crise passe d’une dimension régionale à une dimension globale, comprenant tous les domaines, remettant en cause tous les facteurs des restes encore à peu près stables des relations internationales, et cela dans un sens systématiquement défavorable au bloc BAO. Pendant ce temps, le bloc suit une dynamique dans l’autre sens, notamment dans le cadre de l’élaboration des sanctions antirusses. On assiste alors, pour ce cas, au phénomène étonnant d’une sorte de “provincialisation” de la globalisation. L’image n’est pas outrée ni caricaturale, lorsqu’on se rapporte aux échos venus notamment des organismes européens, où l’on plonge dans les détails les plus dérisoires pour faire s’accorder des paquets de sanctions calculés au millimètre et à l’euro près, en cherchant à satisfaire toutes les parties prenantes, les pays-membres certes, mais aussi les lobbies, les industriels, les forces diverses. (On cite l’exemple significatif par sa dimension picrocholinesque d’une petite société autrichienne, très efficace dans le lobbyisme, alors que son pays est très réticent pour les sanctions, qui dispose d’une commande de €30 millions en Russie, qui proteste contre cette perte et menace de mettre le cas sur un plan juridique, qui est sur la voie d’obtenir une indemnisation de €30 millions des institutions européennes en échange de l’abandon de son lobbyisme et de ses récriminations, voire de ses projets d’aller au tribunal, – et ainsi de suite... C’est à ce niveau de “micro-management”, de parcellisation folle des mesures envisagées que l’on se trouve réduit...)
Un autre phénomène sémantique apparu dans le texte de Durden, c’est la prise en compte de la Crimée comme d’une cuisante défaite géopolitique US, comme l’a été, auparavant, la crise syrienne d’août-septembre 2013 («...the shift in the geopolitical axis that has seen global US influence... [...] decline precipitously in the aftermath of the bungled Syrian intervention attempt and the bloodless Russian annexation of Crimea»). Là aussi, il s’agit d’une formidable extension de la crise ukrainienne, cette fois dans le domaine de la perception et de la communication. Bien entendu, cette extension est totalement ignorée par la bloc bAO, parce que totalement verrouillée par les narrative écrasantes en cours dans les directions du bloc, qui n’ont jamais été aussi lourdes, aussi prégnantes, aussi impudentes, et qui emprisonnent à double tour toutes les pensées officielles (celles qui s’expriment à haute voix, celles qui apparaissent finalement sur les talking point ou les rapports définitifs en moins d’une page sur tel ou tel aspect de la crise, etc.). Là encore, le décalage entre le bloc BAO et l’“autre côté” dans la crise (la Russie, mais sans doute bien plus que la Russie) est stupéfiant. Et là-dessus, pour faire bonne mesure et considérant l’ambiance de micro-management où se trouvent plongés tous les outils de puissance du bloc BAO, il nous apparaît bien improbable que le bloc se rende compte de ce qui se passe précisément, dans cette affaire générale commentée ici (l’axe Russie-Chine et le pétro$), comme dans d’autres domaines du dispositif global du bloc.
Pour paraphraser Duden, et en ne limitant pas nécessairement la remarque à la Russie, «Russia is [...] thinking 3 steps ahead»... Mais quoi, l’on se rend compte par ailleurs de ce qu’est la véritable préoccupation des citoyens US (voir ce même 22 mars 2014), ce qui renforce la logique de la situation en faisant de cette circonstance un facteur complémentaire de type antiSystème (les Américains contre le système de l’américanisme/contre le Système) à l’action Russo-chinoise & Cie, et dessine ce qui pourrait déboucher sur une révolte générale antiSystème. Certes, il s’agirait d’une opportunité et d’une tentative de plus dans ce sens, mais toujours plus sérieuse que les précédentes, et cette fois tellement plus sérieuse que les précédentes avec les facteurs impliqués qu’on est fondé à la juger comme ayant des chances à la fois fortes et d'une grande dynamiques d’être proche de s’avérer décisive.
Mis en ligne le 22 mars 2014 à 08H52
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