Le chaos de la diplomatie européenne-JSF menace le traité

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Il y a désormais, des “scénarios-catastrophes” qui courent dans les couloirs des bâtiments, fort nombreux, des institutions européennes. Ils s’appuient tous sur une effrayante hypothèse: et si tout n’était pas prêt pour avril prochain?

@PAYANT La grâce du traité de Lisbonne, c’est notamment et particulièrement l’établissement d’un système de politique extérieure, avec un réseau diplomatique à mesure, qui doit simplifier les procédures, les affiner, leur donner une efficacité à mesure, qui constituerait la structure et l'outil d’une véritable diplomatie européenne. (On a vu à plusieurs reprises les caractères divers de cette nouvelle “diplomatie” européenne : voir notamment le 13 novembre 2009 et le 26 novembre 2009.) Aujourd’hui, après près de trois mois de développement dans ce sens, la situation bureaucratique est complètement dramatique. Une source proche de ces milieux européens observe : «La complexité de la situation du service diplomatique est en train véritablement d’exploser, alors qu’on en attendait une simplification décisive.»

Il s’agit d’un mal étrange, d’un chaos bureaucratique, comptable, salarial, etc. Les causes sont extrêmement triviales, sans gloire ni significations politiques particulières, mais tout de même avec une signification systémique singulière. Il s’agit d’un enchevêtrement d’organigrammes, de chevauchements de compétences, de conflits formels d’autorités simplement par confrontation d’organisations parallèles qu’il s’agit d’intégrer; il s’agit même d’imbroglios pour déterminer quel service versera quel salaire à tel ou tel fonctionnaire, lesquels ont des statuts différents, soit nationaux soit européens, et chacune de ces catégories étant elles-mêmes divisées en sources et orientations variées. «On s’enfonce de plus en plus vers des blocages d’organigrammes et de compétences, dont personne ne sait comment sortir. Plus on avance, plus on s’enfonce…»

Le résultat est simplement l’apparition de ces scénarios catastrophes. Tous sont caractérisés par la possibilité de plus en plus probable qu’à la date d’avril 2010, où l’Europe du traité de Lisbonne devrait apparaître dans toute sa puissance simplifiée et intégrée pour présenter le potentiel d’un véritable très grand ministère européen des affaires étrangères, on découvre plutôt un nœud indémêlable, kafkaïen, chaotique.

Du côté de la direction elle-même, les choses ne vont pas mieux. Lady Ashton campe toujours dans des bureaux provisoires tandis que le cabinet de Solana (ex-Haut Représentant), sans Solana ou avec Solana épisodiquement, continue à fonctionner comme si les anciennes structures continuaient à représenter la politique extérieure. Tout le matériel de fonctionnement, l’information, les analyses des réseaux, continuent à converger vers le cabinet. Cette structure n’existe plus depuis deux mois, et c’est pourtant elle qui continue à fonctionner.

• …Pendant ce temps, les fonctionnaires de nationalité britanniques sont lancés dans une activité débridée, pour favoriser le Royaume-Uni dans la nouvelle structure – si structure il y a... «Ils sont époustouflants, ils montent des réseaux, des actions, pour tenter de débrouiller cet imbroglio et de se mettre en position pour pouvoir occuper les positions stratégiques. On ne peut dire que ce soit une stratégie préparée, parce que les Britanniques attendaient Tony Blair, dont ils espéraient bien une action décisive pour permettre l’organisation des réseaux pro-UK. Tandis qu’avec Ashton, c’est une autre paire de manche, alors ils s’adaptent, improvisent leur stratégie avec un brio exceptionnel…» Des montages exceptionnels ont été réalisés, qu’on peut illustrer par cet exemple d’avoir réussi à faire, par simples intrigues et initiatives individuelles, des divers relais britanniques dans la bureaucratie des réceptionnaires des chaînes de diffusions des documents internes concernant l’organisation de ces services diplomatiques, qui ne leur sont normalement pas destinés. «Vont-ils réussir?, interroge notre source, ils ont tout pour cela mais la situation est tellement chaotique qu’on ne peut vraiment rien avancer d’assuré… C’est un comble ironique: même le brio des Britanniques pourrait se perdre dans le désordre bureaucratique.»

• Pendant ce temps, également, les Espagnols, qui exercent la présidence vieux style (les six mois habituels) qui se poursuit, s’activent avec habileté à verrouiller les pouvoirs qui peuvent l’être pour cette structure temporaire, qui aurait dû être marginalisée par les nouveaux services. Après les Espagnols se pointent les Belges, qui entendent bien poursuivre cette “politique”.

• Cette situation chaotique n’est pas seulement anecdotique. Elle soulève une question plus générale, quasiment existentielle, de savoir s’il n’existe pas des limites fondamentales au développement et à l’intégration bureaucratique, un moment où le désordre temporaire par lequel il faut passer pour parvenir à de nouvelles structures intégrées finit par devenir trop fort, trop puissant, et empêche effectivement l’établissement de cette nouvelle structuration intégrée. Il faut noter que cette question doit être mise en parallèle avec le développement du technologisme, qui est un autre caractère du système, qui est également arrivé, parallèlement, à de semblables confins où l’intégration structurelle est menacée de ne plus venir à bout du désordre qui précède nécessairement sa formation – comme par exemple dans le cas du programme JSF américaniste.


Mis en ligne le 21 janvier 2010 à 05H34