Le “chaos du bien” versus The Machine

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Nous avons un peu transformé le titre («WikiLeaks vs The Machine») de l’article de The Independent du 9 décembre 2010, qui détaille quelques-unes des contre-attaque de la “cyber-insurrection” contre le Système (ou contre The Machine). Attaque contre MasterCard, contre Visa, contre Paypal, etc., coupables d’avoir lâché WikiLeaks ; déballonnage partiel de Paypal qui avoue avoir cédé aux pressions du département d’Etat plutôt que d’avoir lu les Tables de la Loi de la Vertu américaniste avant de décider de lâcher Wikileaks, etc.

L’idée du “chaos du bien”, elle, est empruntée au groupe Anonymous interviewé, dans le chef de son porte-parole, – étrange époque où le groupe “Anonyme” se blinde d’un porte-parole sous surnom pour véhiculer son message, – par le Guardian hier (voir Ouverture libre, ce 8 décembre 2010).

«A 22-year-old spokesman, who wished to be known only as “Coldblood”, told the Guardian that the group – which is about a thousand strong – is “quite a loose band of people who share the same kind of idéals” and wish to be a force for “chaotic good”.»

(…Texte où nous préférons traduire “chaotic good par “chaos du bien” plutôt que “bien chaotique”, car l’essentiel est bien le chaos plus que le bien dont tel ou tel croit détenir la recette… Non, non, plutôt le chaos, le chaos d’abord pour frapper le Système, – The Machine, – et l’on verra bien le bien qui en sortira ; car il ne peut en effet en sortir qu’une dynamique vers le bien puisque le Système représente le Mal dans ce qu’il a de plus absolu, par inversion du bien, comme la “source de tous les maux”…)

L’expression (le “chaos du bien”) nous séduit parce qu’elle exprimer parfaitement ce mouvement de “cyber-insurrection”. Les arguments, les explications, les professions de foi des “cyber-insurgés” sont aussi diverses, confuses, conformistes, sans intérêt, loufoques, surréalistes, utopiques, etc., que ces insurgés sont nombreux et anonymes. Observez combien cela rejoint en ce sens le mouvement Tea Party aux USA ( voir, par exemple, notre texte du 16 septembre 2010), dont nul ne sait ce qu’il représente, ce qu’il veut, etc., qui est chargé à la fois de tous les vices et de toutes les vertus, qui n’a aucun programme structuré, etc. Les esprit cartésiens, appuyés sur la raison humaine dont on connaît les inégalables performances dans les quelques derniers siècles, y voient une très grande faiblesse. Nous y voyons, nous, la plus grande Vertu possible de ce mouvement informe qui attaque le Système. « Nihilisme contre nihilisme», disions-nous, et contre le Système c’est bien la seule méthode.

Si vous montez à l’assaut du Système avec un programme superbement pensé en un coup d’Etat, treize points ou 110 propositions (est-ce le bon chiffre ?), circa Lénine-1917, Wilson-1918 ou Mitterrand-1981, vous serez gobés en moins de temps qu’il ne faut pour vous digérer, par la corruption, la flatterie, la division, la vanité par nécessité de la spéculation intellectuelle à la fascination de laquelle toujours la raison humaine succombe. Le Système sait y faire, pour ces occurrences-là.

Par contre, si les attaques se font en ordre dispersé, chacun frappant contre le Système au nom de quelque utopie baroque ou pour le goût du sport, ou pour les droits des animaux, ou pour n’importe quoi, parce que quelque chose d’irrésistible (et pourquoi donc, irrésistible ?) l’invite à frapper, il apparaîtra bientôt évident à tous que la seule nécessité aujourd’hui est de frapper contre le Système, sans adresse de retour pour avoir une réponse, disons “poste restante”, sans demander d’explications, d’aveux ou de confession dudit Système. Face à cela, le Système est totalement impuissant, car il ne sait plus qui corrompre, sur quel sujet exercer sa flatterie, comment fomenter les divisions d’une attaque déjà divisée, où riposter exactement avec toute sa puissance.

Le résultat de ce “chaos du bien” qui caractérise les contre-attaques “cyber-insurrectionnelles” est, pour l’instant, après une réaction initiale du Système qui semblait devoir avoir raison de Wikileaks, une avancée et une consolidation extrêmement prometteuses. Une synthèse de Antiwar.com sur ce sujet, ce 9 décembre 2010, nous en informe, en mettant l’accent sur le désarroi du Système, jusqu’aux propositions loufoques du point de vue américaniste, – et pourtant si logiques du point de vue du droit, si droit il y a, – du sénateur Lieberman, cherchant à soumettre le sacro-saint New York Times aux mêmes soupçons dégradants que les condamnations lancées contre Wikileaks.

«Sen, Joe Lieberman (I – CT) may have seen some early success in his attempts to censor WikiLeaks, but his increasingly shrill calls to silence anything related to the site (including the New York Times) is becoming the butt of jokes. The facts are clear – efforts to shut down WikiLeaks or other dissident websites may be popular with US officials, but censoring a worldwide information network is a lot harder than they expected…»


Mis en ligne le 9 décembre 2010 à 12H25